[EVENT] Fête du parti Caerwyn

Même si on me juge souvent à ma nature de faune, je vis avec des humains en parfait infiltré depuis un siècle. J’ai vu passer les modes et les époques. Je crois maîtriser assez bien leurs codes. Quand mon attitude ne semble pas socialement correcte, c’est que je ne vois pas l’intérêt de l’être. Pour une humaine, Amy semble plus en décalage que moi avec les attitudes à adopter en société avec sa tenue d’hôtesse de charme censée attirer la curiosité. Mon père l’a-t-il vue ainsi ? Je ne crois pas qu’il serait utile de lui faire observer qu’elle se risque à un avertissement de sa part, elle n’a pas l’air d’avoir saisi ma volonté de lui faire comprendre son erreur de jugement, au contraire. Elle semble ravie que la tenue soit mon premier sujet de conversation. Sa répartie me laisse assez perplexe. Je serais même inquiet si j’avais une quelconque responsabilité envers cette fille. Heureusement, j’ai arrêté depuis longtemps de jouer les chapons pour les filles de bonne famille perdues dans la frénésie des années folles, et ce n’est pas quelque chose qui me manque. J’ai un rire léger, comme si j’entrais dans la complicité. Mais, en vérité, sa question est très déplacée. On ne sous-entend pas aux gens, et encore moins au porte-parole du maire, qu’il est intrigué par votre poitrine. Alors, je ris. Je ne sais pas très bien ce que je pourrais faire d’autre pour éviter de m’impliquer.

– Eh bien, vous m'excuserez mais je n’avais pas prévu d’échanger sur vos seins. – Je ne vois pas très bien quel genre d’autre intérêt et curiosité elle espère susciter. Même si je garde un sourire amusé, je me sens obligé d’ajouter : – Un conseil, si un homme vous aborde en vous affirmant que vous avez l’air intéressante, vous pouvez être assurée qu’il ment.

Je connaissais bien les parades de séduction des humains et j’étais toujours étonné par ces filles qui feignaient de les ignorer. En mettant ses atouts en évidence à l’excès, on s’assure d’avoir l’illusion d’intéresser pour sa personnalité, les hommes le rendent souvent bien. Amy manquait peut-être de confiance en elle, mais je préférais être honnête. Je n’avais aucun intérêt à entrer dans un jeu de dupes, mes cibles ne se trouvaient pas dans cet événement, je ne séduisais que des individus détruits par la vie, sans contacts sociaux ni avenir.

– Je crois que j’ai aimé tout ce que j’ai goûté mais, sans aller aussi loin que moi, vous pouvez tester les tous derniers rhums arrangés en dégustation, ils sont excellents !

Alors que je termine ma phrase, un homme intervient sans gêne pour s’inquiéter que je n’offrais rien à la jeune femme et lui tendre un verre pour imposer son rôle de gentleman. Son attitude cavalière et brutale ne m’inspire pas un grande confiance, c’est justement le genre d’homme que l’on pouvait craindre pour Amy mais, d’un autre côté, je me demande si l’on peut s’en amuser. Je m’écarte avec déférence pour lui permettre d’intégrer notre duo et lui dit d’un air énigmatique :

– Non, j’avais l’intuition que vous alliez venir et que je devais vous laisser cet honneur.

Fête du parti Caerwyn

L’assentiment de Mars s’accompagne d’une surenchère, laquelle m’amuse. Il est moins provocateur que stratège, à mon sens. Il dirige l’attention et tâche de contrôler la situation. Si je ne saurais répondre à ses provocations pour l’instant, je vais également nager dans son sillage pour dissimuler le mien. Quand bien même je mène la danse physiquement.

« Avec les événements récents, New York est devenu le centre du monde. Est-ce bien étonnant de vouloir profiter de ce renouveau d’un âge d’or ? »

Les divinités infernales n’ont jamais eu trop de problème à continuer d’exercer une influence, toujours croissante, sur les sociétés humaines ; après tout, les hommes eux-mêmes les amenaient partout avec eux et contre les panthéons autres que celui auxquelles elles étaient sensément opposées. Plus la société humaine a grandi et s’est industrialisée, plus les péchés capitaux ont gagné en puissance. Si nous sommes tout autant à notre aise dans un monde dévasté et chaotique, la civilisation n’en reste pas moins confortable.

Je guide notre duo jusqu’à ce que son autre moitié ne décide de changer de direction. La raison en est compréhensible ; l’affrontement, lui, est incongrue. Le duel oppose la partenaire de mon accompagnant à un mortel. L’arme est un cupcake. La victoire est sans surprise. La réaction du dieu de la guerre non plus.

Le contact de Mars est fait avec le plus naturel du monde alors qu’il ne l’est pas plus qu’une poignée de main, éclaireurs que nous n’avons envoyer à l’autre jusqu’ici. Sans pouvoir égaler sa masse musculaire, mon épaule encaisse sa tape et s’en revient à sa place alors que mon visage quitte ce que le guerrier désigne du doigt pour le regarder lui. Ses propres yeux s’en lèvent aux cieux, rejoint par l’un des coins de ses lèvres, et il dévoile de son programme politique : c’était mieux avant. Je comprends la nostalgie : non content de tendre la joue, les mortels du passé savaient reconnaitre leur place plutôt que de se croire capables de rivaliser, voire de battre, les divinités.

« Allons rejoindre ma partenaire ! »

Voilà qui clôt l’attente de réponse et dévoile le clou du spectacle. Regarder là où Mars montre c’est prendre le risque de ne pas voir vers où il va. Vers qui il va, en l’occurrence. Mes mignons m’ont beaucoup parlé de la déesse qui accompagne Mars depuis tant d’années, ici comme en bas. Bellone. Ainsi le cupcake n’est-il que le premier, et plus insignifiant, des torts que le mortel risque de subir pour avoir tenu tête à la divinité. Cela ne m’importe pas, ma satisfaction venant du fait que les présentations divines commencent vivement ; peut-être même un peu trop. Mon "guide" tient peut-être à les accélérer, comme il tient peut-être à ne pas faire face seul. Ses tactiques et stratégies me dépasseront toujours, puisqu’elles sont sa propriété. Je saurais serpenter comme à mon habitude, finalement placée dans le sillage physique. J’accélère également le pas pour suivre Mars même si je m’abstiens de sa familiarité finale.

Si Lance Larian continue de diriger les attentions et réclame les informations, je prends l’initiative d’en fournir à mon tour et tends une main à la déesse, l’autre posée sur ma hanche.

« Thomasine Océane, ravie de vous rencontrer. »

Fête du parti Caerwyn

Monsieur Caerwyn Jr peine à me suivre, situation m’étant bien plus habituelle que l’inverse, et rit tout de même, maintenant mon sourire. La déclaration suivante en tient de l’évidence et c’est pour cela que je ne m’inquiète pas de mon décolleté : rares sont les personnes qui discuteront à son sujet, à l’inverse de celles qui lui accordent de la curiosité.

« Un conseil, si un homme vous aborde en vous affirmant que vous avez l’air intéressante, vous pouvez être assurée qu’il ment.

- Je tâcherai de lui prouver qu’il a raison. »

Est-ce une manipulation que de prouver à un homme que son excuse pour vous aborder est vraie ? Je n’en sais rien mais c’est ainsi que j’envisage la chose, de mon côté. Je me moque complètement qu’on m’accoste pour des raisons superficielles, d’autant plus lorsqu’elles n’ont aucune chance d’aboutir, car je confiante en mon talent pour retourner la situation une fois le difficile hameçonnage effectué. Avec monsieur Caerwyn Jr, cela fonctionne : il me conseille via son expérience et le sujet premier est ainsi évacué. Sans aller aussi loin que lui, je vais probablement tester un ou deux verres m’étant désignés comme excellents. Ou pas.

« Vous n'offrez rien à votre cavalière, intervient un inconnu d’une façon analogue, cavalière, en me tendant un échantillon.

- Non, répond monsieur Caerwyn Jr en s’écartant, seconde surprise des dernières secondes. J’avais l’intuition que vous alliez venir et que je devais vous laisser cet honneur.

- Merci beaucoup, enchaine-je en tendant la main pour m’emparer de l’échantillon. Je vous présente Macsen Caerwyn, porte-parole du parti éponyme, et me présente, Amy Orchent, organisatrice de spectacle vivant. Et vous êtes ? »

Je ne bois pas tout de suite, gardant un sourire satisfait et le verre comme on tient un verre à pied. J’ai favorisé la rencontre d’inconnus mais tâche d’éviter un trop grand retrait de monsieur Caerwyn Jr qui est, d’une part, plus connu que moi et, d’autre part, tout aussi invité à la conversation malgré les étapes déjà franchies. Je me demande si Macsen a déjà gouté le rhum qui m’est proposé mais reste majoritairement tournée vers l’inconnu en attendant qu’il dissipe cette condition. Si les raisons pour lesquelles il s’est approché sont évidentes, il est temps pour moi de montrer que je sais ce que je fais. Et de le découvrir, au passage.

C’est un spectacle, où la théorie de la création et la pratique des répétitions se confrontent au public. Attiré par un élément, surpris par un autre, c’est à moi de convaincre et de réussir à conquérir. Evidemment, je prends des risques ; on n’a rien sans rien, après tout.

J'ai mené des armées. J'ai dirigé des milliers d'hommes assoiffés de sang pour qu'ils servent mes buts, même ceux qui ne brillaient pas de noblesse. C'est facile à oublier quand on se concentre sur mes échecs passés. Je n'ai jamais essayé de les cacher ni les nier, malgré ma fierté, et ils pèsent sur ma réputation, mais l'ombre qu'ils font sur les aspects les plus redoutables de ma personnalité me donnent une longueur d'avance pour les combats à venir.

Mars a toutes les chances de remporter les élections et je m'investis avec enthousiasme dans ce projet. Nous aurions pu prendre le pouvoir par la force, et les autres dieux s'attendent probablement à ce genre d'action de la part d'un camp composé de dieux de la guerre, mais faire pencher les citoyens de notre côté promet non seulement la menace d'une force de frappe venue du peuple mais aussi une plus grande liberté pour imposer nos décisions. Loki a eu à gérer des ennemis dieux, un ordre de pirates informatiques, sa propre fiancée… Héra a perdu des alliés puissants chez les créatures quand la population s'est mise à douter d'elle. Nous ne devons pas tomber dans les mêmes pièges qu'eux.

Mes petites impatiences me rendent plus humaine aux yeux du peuple. Je ne suis pas à la tête du parti, ce qui me laisse plus de liberté, mais je suis assez visible pour qu'on s'intéresse à mon comportement. Les politiciens soignent leur image, et on se méfie de leur malhonnêteté. Laisser filtrer des défauts dans lesquels les citoyens peuvent se reconnaître fait partie de ma stratégie. Cette histoire de cupcake risque d'attirer l'attention, mais j'avais déjà décidé de ne pas m'en inquiéter au moment où j'avais pris la pâtisserie pour l'écraser dans le visage du journaliste débile.

Un homme envahit ma bulle sans s'annoncer. Je reconnais Mars avant que son bras ait terminé de se déposer sur mes épaules, donc je ne le pousse pas par terre comme je l'aurais fait avec un inconnu.

-J'en pouvais plus de la Jenkins et j'avais pas la patience de la laisser se ridiculiser toute seule. C'était partir ou la frapper, et elle aurait adoré. Je pouvais pas lui faire ce cadeau!

Je ne suis pas gênée que Mars ait vu mon échange sucré avec le journaliste.

-Je sais pas qui c'était exactement. Un journaliste agressant qui cherchait un peu d'attention féminine. Je ne voulais pas le décevoir.

Je lui tends mon cupcake à demi mangé, mon regard déviant vers la femme arrivée près de moi en même temps que lui.

-J'en ai gardé pour toi.

La femme est une déesse, mais je ne la connais pas. Son nom humain ne me dit rien non plus.

-Brook Hendrix, enchantée aussi.

Je lui souris cordialement, avant de lancer un rapide regard interrogateur à Mars.

-Merci beaucoup.
-Un jour, on pourrait échanger sur notre routine beauté capillaire!

Je sentais le malaise de Peach à notre proximité physique et je m’en moquais un peu. Je n’avais personnellement pas tellement de pudeur, être aussi proche d’une autre femme ne me dérangeait pas. Aussi, à travailler dans un bar, on en venait rapidement à ne plus tellement se soucier de devoir frôler des inconnus pour se déplacer. Et puis, c’était elle qui avait commencé à venir envahir mon espace personnel. J’avais quand même une conscience afin ne pas devenir harcelante ou déplacée à outre-mesure, je n’étais actuellement pas dans la provocation ni dans la prédation quand même. Si elle tentait de se défaire de mon accolade ou si son malaise augmenterait, je la laisserais partir évidemment, mais en attendant je garderais notre proximité.

-Je n’y manquerai pas !
-Super!

Je fis un clin d’oeil à Josh en augmentant légèrement mon pouvoir de charme. Je gardais l’intensité de mon pouvoir sous-contrôle tout de même, je ne voulais pas qu’il me fasse de fausses promesses, alors valait mieux qu’il ait vraiment envie de venir au Velvet, mais je ne voulais pas non plus que ce soit évident que j’utilisais mes pouvoirs sur lui.

-Dans le domaine de l'amour! Vous connaissez l'appli Arrow?
-Mais bien sûr!

C’était donc sûrement de là que je connaissais son nom. Je remarquai que Josh ne s’intéressait plus à nous soudainement. Je froncis les sourcils, vexée et perplexe. Il s’occupait des autres personnes à son stand, leur faisant le même genre de discours qu’il nous avait fait. Était-il un autre bourgeois un peu vide? Je comprenais qu’il devait parler à un maximum de personnes pour que son stand soit un succès et que son restaurant marche bien, mais je le trouvais un peu grossier d’arrêter notre conversation en plein milieu et sans avertissements. Mes yeux s’assombrirent quelques secondes, puis je fis une moue et mon visage retrouva toute sa légèreté habituelle. Je n’allais pas le laisser ruiner ma joie. Je laissai mon pouvoir de charme au minimum, mais je ne le fermai pas complètement.

-De ce que j’en ai entendu, votre appli est merveilleuse. Ma… sœur l’utilise beaucoup et en est très satisfaite.

J’avais hésité sur le terme à utiliser pour qualifier Atara. Depuis notre dispute à propos de Charles Demers, c’était compliqué entre nous.

Je regardai autour de nous la foule quelques secondes, puis je remarquai un stand de kombucha deux places plus loin que j’avais soudainement très envie d’essayer. Je tirai sur le bras de Peach, que je tenais toujours, pour qu’elle se déplace avec moi vers le nouveau stand. En chemin, je parlai à ma nouvelle amie :

-Est-ce que c’est correct avec toi si on se tutoies? Je trouve le vouvoiement un peu lourd à la longue…

Une fois devant le stand, je chuchotai à son oreille :

-J’espère que sa boisson sera meilleure que celle du stand semblable à l’entrée ouest!

[HJ: Ceci est mon post de fermeture, ainsi que pour Psyché.]

Thomasine la démone répond simplement à ma question sur ses motivations. New-York est bien sûr la ville où se rassembler. La catastrophe de 2007 n’a fait qu’accélérer ce vers quoi le monde se dirigeait. L’Europe était mourante sans le savoir à cette époque. Il n’y a pas d’avenir possible sur ce que nous appelions déjà « le vieux continent ». Il y a peut-être des choses à faire ici, oui. Une nouvelle civilisation à construire, même si beaucoup préféraient garder l’ancienne. Je sais d’ailleurs que les démons ont tout intérêt à garder l’ancienne. Nous avons collaborés sans être de réels alliés. Nous utilisons le même genre d’armes. Mon aptitude à semer le chaos et la confusion les attire, et j’apprécie également les voir semer le trouble. Avec Arès, la stratégie est simple. La guerre, c’est aussi tordre toutes les certitudes, tous les repères pour se démarquer. Nous avons bien compris que le discours politique n’occupait plus une place très importante. Les gens élisaient d’abord ceux qui se montraient et dont ils voulaient se sentir proches.

J’entraîne Thomasine avec moi pour rejoindre ma partenaire. Je suis pris dans l’élan du moment. Il n’y a pas d’intention particulière, si ce n’est de rester agréable et naturel en toutes circonstances, en donnant l’impression de ne pas avoir de secrets pour les autres. Nos retrouvailles étaient presque un spectacle. Je m’amuse des réflexions de Brooke sur Jenkins. Le nouveau genre d’ennemis que nous rencontrons dans cette époque reste d’une gestion difficile pour un dieu de la guerre tiré de l’antiquité. Je hausse les épaules en ce qui concerne l’identité du journaliste. Ce n’est pas important. Je suppose que les réseaux sociaux se chargeront très bientôt de nous la donner. Un sourire plus malicieux se forme sur les lèvres quand elle me tend le cupcake entamé.

– Merci, tu sais à quel point j’aime mordre dans la trace de tes jolies lèvres.

J’avale le cupcake sans lui laisser le temps de s’énerver encore tandis que la démone se présente sobrement. Arès réagit avec la méfiance qui s’impose. Elle ignore pourquoi je lui rapporte une divinité inconnus et ça se comprend.

– Nous allions justement prendre un verre avec Thomasine, tu te joindras à nous chère collègue ?

Le bar apportera certainement de nouvelles discussions et de nouvelles rencontres. Nous sommes là pour nous montrer après tout. J’imagine que la petite « sortie » d’Arès apportera déjà son lot de curieux autour de nous.

Fête du parti Caerwyn

Leur échange est amusant, éclairant leurs aventures de jours. Rompre l’échange avec "la Jenkins" a évité une action disgracieuse mais il était impossible d’en faire de même avec "Monsieur Cupcake" du fait de sa profession comme de sa quête. Sera-t-il déçu ? Cela dépendra surement de sa capacité à raconter les événements en sa faveur. Des détails de l’histoire, à l’instar de l’arme qui est confiée au dieu de la guerre tandis que l’attention s’en vient à moi. Celui-ci remercie avec une réplique provocatrice mais dont je ne parviens à percevoir la profondeur, d’autant que mon attention se doit d’être ailleurs.

La présentation m’amène à lever les sourcils, chose qui ne m’empêche de rendre le sourire cordial qui m’est offert. Plus amples détails sont nécessaires de part et d’autre, l’autre déesse ne voyant pas qui je suis et la réciproque s’imposant à moi également. Brook Hendrix. Si les informations qui m’ont été fournies sont bonnes, les siècles d’expérience de ceux chargé de les récolter assurant généralement un minimum d’efficacité, Bellone a pris le nom de Crystal Wise. Je fais donc face à une nouvelle divinité, ce qui augmente ma satisfaction : une connaissance de plus. Méfiante, sans doute, mais connaissance tout de même.

La poignée de main terminée, je laisse l’homme du groupe gérer cette cour dans laquelle il m’invite. Invitation qui s’étend à sa collègue, pour mon plus grand plaisir. Certes, elle est méfiante envers moi et ce d’une manière ouvertement marquée là où le dieu de la guerre continue de se dissimuler. Cependant, elle est une déesse et vraisemblablement d’influence ainsi elle a presqu’autant de mon intérêt que lui. Cela sera abordé prochainement, car, je n’en doute pas mes intentions précédentes devront être développer à défaut d’avoir grande chance de convaincre.

Je ne mens pas lorsque je dis vouloir profiter du renouveau newyorkais. Je ne mentirais pas non plus lorsque je dirais vouloir m’allier au camp des divinités ascendantes. Le parti Kosonen se cherche encore et l’intégration de la divinité qui le dirige parmi ses pairs laisse à désirer, même s’il peut tirer son épingle du jeu à l’avenir. Le parti Caerwyn nécessite plus de temps pour faire fructifier l’héritage de Merwyn, et d’Héra à travers lui, ainsi garde-t-il en réserve ses bons éléments et expédie un relativement douteux. J’ignore jusqu’où vous les plans de Merwyn et si sa retraite est vraie, cependant je le pense dans l’ignorance de mon lien avec Macsen Caerwyn voire du projet de celui-ci ; une passerelle idéale si le besoin s’en fait sentir. Reste ainsi, comme toujours, l’alliance divine majeure. Le parti Larian. Mars, dont l’empire a été l’un des plus grands et des plus avancés de l’Histoire Humaine malgré sa tendance à la guerre civile ; tendance des plus arrangeantes pour les divinités et leur fâcheuse tendance à s’entredéchirer. Rien qui ne soit pas appréciable. Evidemment, j’admettrai mon opportunisme quant à me présenter à lui maintenant qu’il est en lice plutôt qu’à l’aider à préparer cette course. Je ne souhaite pas rejoindre le parti, ni même le gouvernement. Par contre, faire parti de la cour, ou du sénat si l’on en retourne à Rome, peut avoir ses avantages. Apporter des voix du quartier Grey en échange est une base sur laquelle on construira.

RP TERMINE pour Tiamat

Loki pouvait compter sur beaucoup d'alliés. Il doutait secrètement de leur fidélité, mais les dernières années à solidifier ses alliances lui garantissaient un soutien étendu et puissant. Au niveau personnel, c'était plus compliqué. Il avait laissé de côté les relations amoureuses sérieuses et les amitiés basées sur autre chose que l'utilité mutuelle. Officiellement, il n'avait pas le temps; en réalité, il ne savait pas comment entretenir ce type de liens. L'expérience lui avait prouvé que peu de gens allaient réellement le suivre dans ses projets et que ceux qui le faisaient finissaient invariablement par le décevoir ou montrer des facettes plus dangereuses que ce qu'il acceptait de gérer. Chaque nouvelle rencontre lui inspirait la méfiance et une distance initiale qu'il continuait instinctivement à respecter même quand la relation évoluait. Les gens le fatiguaient quand ils dépassaient leur rôle dans ses plans. Ce qu'il avait pu tirer de positif de ses anciennes relations plus émotionnelles ne valait pas les efforts qu'il avait dû mettre. Il n'avait pas le temps de s'investir. Il lui restait de toute manière sa fille. Malgré les nombreuses frictions.

Il ne s'empêchait tout de même pas de s'amuser. En tant que James Hamilton, il participait à des soirées mondaines et des fêtes assez arrosées. Sans être reconnu, il avait un grand cercle social. Il s'était créé une vie aux limites beaucoup plus larges que quand il était maire de New York, mais ses projets nécessitaient une moralité qu'il ne pouvait qu'afficher sans s'y investir entièrement. Quand il avait envie de divertissements immoraux, il prenait temporairement une identité inventée pour protéger la réputation qu'il avait bâtie.

Aujourd'hui, le risque de dérapage était assez élevé pour qu'il ait pris la précaution de venir en anonyme. Se retrouver parmi autant de dieux et de puissants êtres magiques intéressés par la politique lui inspirait surtout l'envie de nuire. Néanmoins, après plusieurs heures à surtout s'ennuyer en calculant les différentes folies qu'il pouvait se permettre sans se faire prendre, il avait plutôt décidé de rester tranquille. Commençait-il à se faire vieux?

Étrangement, son intervention impolie auprès de Macsen Caerwyn et de la fille inconnue fut reçue avec enthousiasme, ce qui lui arracha un sourire plus sournois que ce qu'il comptait afficher comme attitude. Soit il avait affaire à plus fins que prévu, soit il avait affaire à plus cons.

-Enchanté de faire la rencontre d'un couple aussi charmant!

Caerwyn le laissait offrir à boire à la Amy, cela signifiait qu'elle n'avait aucun intérêt immédiat pour lui. Les forcer à assumer leur distance pouvait créer un intéressant malaise social.

Il allait se présenter rapidement avec un titre ridicule, mais on annonça le discours du maire.

-Au plaisir de se revoir, M. Caerwyn. Ici ou en forêt, ajouta-t-il sur un ton à l'innocence forcée. Bonne fin de journée, Miss Emma.

Avec un mince sourire, Loki se fondit dans la foule pour aller observer le maire et les autres personnages politiques de l'heure pendant le discours.

Parfois, les gens mentent sans le savoir. Ils embellissent la réalité pour eux aussi et créent des illusions qui peuvent durer un temps, parfois des années, mais qui ne sont jamais que des illusions. Quand j’avertis Amy, j’essaye de le sous-entendre, mais je sais, au fond, que mon intention est vouée à l’échec. La plupart des gens aiment se convaincre qu’une personne qu’ils trouvent belle est forcément intelligente. C’est une idée plus flatteuse, même si elle n’a aucune valeur. Si Amy veut jouer d’artifices, elle trouvera toujours des hommes pour accepter d’entrer dans ce petit jeu, pour la trouver intéressante peu importe la pertinence de ce qu’elle pourra leur raconter. Avec un sourire mutin, je lui réponds donc tranquillement :

– Je n’en doute pas un seul instant.

La flatterie se mêle à la moquerie dans une ambiguïté qui rend le sens de mes propos difficiles à confirmer car, après tout, comment ne pas convaincre une personne qui souhaite déjà l’être ? L’arrivée d’un étrange personnage tend cependant plutôt à me donner raison. Les individus qui veulent être convaincus coexisteront toujours à côté de ceux qui, plus pragmatiques, traiteront une femme selon les messages vestimentaires qu’elle leur renvoie. Je m’écarte, presque ravi de cette intervention. Je n’oublie pas non plus le petit affront qu’elle m’a fait en présumant de son « pouvoir » sur moi, et je le considère donc également comme une petite vengeance. Ce genre de réaction me fait parfois m’interroger sur ma supposée neutralité à l’égard de toutes choses. Amy cache comme elle le peut son désarroi. Il est évident qu’elle craint de se retrouver en tête à tête avec l’inconnu. Ce dernier garde une attitude très curieuse. Il ne se présente pas, esquisse un sourire peu adapté à la situation, avant de se prétendre ravi de rencontrer un « couple aussi charmant ». Qu’il ignore ou non la nature de notre relation, il cherche à provoquer un malaise. Mon observation se confirme quand il mentionne la forêt. Le faux sourire que je gardais sur mes lèvres baisse légèrement, moins par perplexité que pour s’adapter à cette affirmation étrange : si je comprends le sous-entendu, il n’est pas censé faire sens pour le simple humain que j’incarne ici. Impossible de comprendre davantage ses intentions puisqu’il disparaît dans la foule qui se dirige vers la scène où mon père doit prononcer son discours. Que voulait donc cet individu ? Me faire savoir simplement qu’il connaissait ma véritable nature ? Mais dans quel but ? Je ne peux pas agir pour l’instant et, de toute façon, il n’y a pas de danger immédiat. Les personnes qui pensaient pouvoir me nuire en connaissant les faiblesses de mon espèce se sont souvent trouvées dans l’erreur. Je fais de mon mieux pour chasser les interrogations de mon esprit afin de m’adresser à Amy comme si les interventions de cet homme n’avaient jamais mérité d’être relevées :

– Je crois qu’il est grand temps de nous approcher de la scène !

Je profite cependant de la foule pour « perdre » incidemment la jeune femme afin de garder le plaisir d’aller d’une personne à l’autre sans me sentir de réelle obligation de conversation avec qui que ce soit.