Les Dieux de New York
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Déesses oubliées [Emilia A. Murphy]

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Le Léviathan
Thomasine T. OcéaneThomasine T. Océane


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Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Vide
MessageSujet: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptyVen 20 Mar - 17:07








Déesses oubliées


Nous sommes le vingt-sixième jour de la lune, j’ai quarante-deux ans. Vêtue d’une robe fourreau noire aux fines bretelles et au décolleté en tulle, j’attends dans la nuit. Le couvre-feu ne va pas tarder, mon invitée non plus. L’appartement, situé dans le Quartier Empire, a nombre de qualités ; l’une d’elles, une grande baie vitrée donnant sur la ville, se trouve à mon côté. Les lumières des rues, au-dessous, et des façades, en face, éclairent un salon assez grand. Une table basse, ronde, accompagne la fenêtre et est elle-même accompagnée de sofas, placés de telle sorte qu’ils puissent tout deux permettre de contempler la vue. Le reste du mobilier est également de bois et de tissus ; des pièces manifestement artisanales, quoi qu’harmonieuses et agencées avec goût. Sur l’un des murs latéraux se tient, massif, le bar séparant cette pièce de la cuisine américaine. Enfin, sur le mur opposé à la baie vitrée se trouve l’arche menant au couloir et au reste de l’appartement, ouvrant directement sur le vestibule et ses penderies ornementées. De tous les appartements liés à Hell Inc., celui-ci est surement l’un des plus beaux. Peu étonnant qu’il serve plus aux employés de passage qu’à l’usage habituel. Lorsque que New York s’est reconstruite, il était clair chez tous les membres du département de l’Envie que nous tenions-là une mine d’or. Par le passé, Manhattan avait déjà été la vitrine d’un mode de vie occidental et le désir de nombre de personnes. Lorsqu’il est devenu évident que la ville allait avoir l’exclusivité du souvenir de cet âge d’or, il était impossible d’estimer combien ressentiraient l’Envie face au "bonheur" ou aux avantages de ses chers citoyens. Mes subordonnés ont fait de leur mieux pour propager les rumeurs le plus rapidement possible. Présidant aux voyages, aux déplacements et aux déménagements, entre autres, j’ai toujours été pleinement volontaire afin de faciliter les flux migratoires. Certains de mes agents s’y investissaient légalement, d’autres non. Qu’importait la méthode, tant que l’âme y était. Pour venir jusqu’ici, l’illégalité est de mise : le client a droit à un petit passage aux Enfers avant de revenir du bon côté du mur magique. Généralement, l’engagement stipulant simplement "New York", mes employés laissent leurs contractés au Quartier Grey ; outre que cela "facilite la dissimulation de l’immigration illégale", cela contribue à notre réputation et offre des possibilités de fidélisation du client. S’il veut sortir du Quartier Grey, le moyen le plus simple est un nouveau contrat ; une nouvelle âme, qu’il doit trouver. Entre ensuite en jeu un circuit de propriétés d’immeubles destinés au logement, que cela soit dans les quartiers Empire ou Helheim, bien souvent obtenu en collaboration avec les clients du secteur de Mammon ; souhaiter l’étriper et le déchiqueter ne m’empêche pas d’être ouverte d’esprit à une collaboration mutuellement bénéfique. Des logements pour les immigrés, des locataires pour les propriétaires, des âmes pour les ayant-droits sur tout ces protagonistes. Tout le monde y gagne, même si certains y gagnent plus que d’autres comme toujours.

Dans le noir, la porte d’entrée se déverrouille puis s’ouvre. La lumière, automatique, immonde le vestibule puis le salon. L’éblouissement me conduit à un mouvement de paupière qui se répercute sur l’entièreté de ma tête. Mon visage est pleinement visible, mes cheveux blonds et bruns tirés en arrière afin de le dégager jusqu’aux oreilles et à leurs boucles en pendentif alternant simili-marbre et simili-fer. Accoudée d’aise au dossier de mon siège, je tourne le regard vers mon invitée et son guide. Lui a entre la vingtaine et la trentaine d’années, le teint d’autant plus pâle que sa chevelure est noire. Elle cascade, drue, jusqu’à son menton moucheté et encadre un visage fort, anguleux, au nez aquilin, aux sourcils épais et aux yeux d’un marron si sombre qu’ils semblent presque noirs, eux aussi. Ses chaussures de cuir suivent cette logique là où son costume trois pièce est lui aussi dans la dualité achrome qui lui sied : seule la chemise est blanche, veste comme pantalon et gilet étant noirs. Je n’accorde pas plus d’attention à l’humain pour en passer à celle qui le semble, humaine.

La vingtenaire brune mesure une quinzaine de centimètres de moins que moi. Sa silhouette est très mince, presque fragile, avec une poitrine et des hanches avantageuses. Lors de mes passages au Velvet Dream, je me suis plus attardée sur elle que sur les autres employés. L’observation m’a appris beaucoup, depuis le manque de confiance en elle tapit au fond de ses grands yeux de biche jusqu’à la recherche d’évitement envers les êtres comme moi. S’il n’est pas rare que les personnes les plus sensibles se sentent un peu écrasées en ma présence, comme si elles se trouvaient face à un zeppelin invisible ou une grosse masse équivalente, il est plus rare qu’elles osent aller au-delà de détourner les yeux et tâchent de m’éviter consciencieusement. Avec Emilia, car c’est le nom de la belle, l’évasion du regard s’est accompagnée d’une évasion physique. Plusieurs mois de passages réguliers n’ont jamais permis à ce qu’elle me serve, que l’on puisse avoir une discussion ou même qu’elle s’approche de moi. Plusieurs mois de passages réguliers m’ont cependant appris nombre de rumeurs sur elle, notamment son rôle d’escorte une fois son horaire terminé, l’aura charismatique qu’elle pouvait avoir lorsqu’elle se donnait ainsi et la qualité incomparable de sa prestation. Plusieurs mois de passages réguliers où un détail n’a jamais changé : son collier, pourtant non-règlementaire dans la tenue sexy du Velvet Dream. Il n’a plus manqué qu’à jouer avec les circonstances pour qu’elle ait l’occasion de l’enlever afin de voir ce qui se produirait ; un démon volontaire a ainsi pu trouver maitresse dans l’art du sexe et j’ai pu avoir ma confirmation quant à la nature soupçonnée d’Emilia. Tout le monde y gagne, même si certains y gagnent plus que d’autres comme toujours.

« Je vous prie de m’excuser pour le subterfuge, commence-je en désignant d’un geste de ma main accoudée le sorcier ayant acheté les services d’escorte d’Emilia. J’appréhendais cependant que jamais nous ne puissions avoir pareille conversation autrement. »

Ma voix est étonnamment suave et cache une forte violence derrière son apparence de douceur, comme un courant de reflux sous des eaux placides. Alors que mon serviteur entreprend d’agir en tant que majordome, je pousse sur ma main et me lève, de biais, devant le tableau urbain nocturne. Ensuite, de l’autre membre, j’invite Emilia à prendre place face à moi. Je ne me rassiérai et ne reprendrai la parole que lorsqu’elle se sera installée, même si je n’attendrais pas qu’elle soit à son aise ; comme elle doit s’en douter, je ne fais pas parti des gens envers qui elle peut tout simplement tourner les talons et espérer que cela soit sans conséquences.

« Nous savons toutes deux ce qu’est l’autre, reprends-je cordialement. Reste deux ignorances réciproques : l’identité et la motivation. »

A nouveau, je me rassois et croise les jambes d’aise, autant que ma robe me le permet. Mes bottes, faites d’un cuir clair comme de la peau tannée, n’ajoutent guère à ma taille mais je n’éprouve pas l’envie d’un face à face inconfortable outre-mesure ; ma présence l’est déjà doublement, par mon aura comme mon savoir.

« Je dois avouer vous avoir soupçonné d’être Loki, lorsque j’ai découvert le pot-aux-roses. Je ne vois guère qui d’autre que lui aurait besoin de cacher sa nature à ses semblables. Toute ouverte que je sois à m’entretenir avec, je pense que vous êtes bien différente. Evidemment, je peux me tromper ; et il doit être l’un des rares être à pouvoir me tromper. Sans doute serais-je fixée lorsque vous essayerez de me mentir. »

Mon sourire se dessine alors que je marque un temps de pause pour observer Emilia. L’un de mes bras s’en retourne au dossier du sofa tandis que l’autre reste sur ma cuisse, main à plat prête à revenir soutenir mon discourt.

« Maintenant que nous sommes ici, je me dis également que c’est peut-être afin d’éviter pareil petit jeu que vous préfériez vous dissimuler. Si tel est le cas, j’irai droit au but : la détresse que je lis en vous ne me parait pas factice ainsi suis-je curieuse de savoir pourquoi. Rares sont les divinités à agir au bas de l’échelle sociale, encore plus rares sont celles à le faire avec l’odeur du désespoir. »

Voilà qui répond à la motivation me concernant, au moins en partie. Qu’importe que l’on soit de panthéons différents, nous restons tous des divinités ; plus que des membres d’une espèce, nous pouvons nous considérer comme les membres d’une classe sociale au-delà des rêves des élites. Posséder la conscience de cela encourage à agir en accord, soit à s’entraider face au reste du monde. D’où que l’on puisse parler des intérêts des divinités en général d’ailleurs. D’où que l’on puisse accepter d’être dans le même camp malgré les coups bas que l’on s’inflige, les trahisons et autres inimités personnelles. Tout le monde y gagne, même si certains y gagnent plus que d’autres comme toujours.

« Sachez que Sébastian se tient à votre disposition afin de limiter votre présent désagrément. N’hésitez pas à lui demander toute boisson ou encas qui pourrait vous faire envie. J’ignore quels peuvent être vos besoins après votre service, même si je les suppose suffisamment secondaire à ce que vous puissiez donner au commun l’expérience sexuelle de sa vie. »

Il faut appeler un chat un chat : quelque soit le tarif monétaire qu’Emilia fasse payer pour son service d’escorte, il est certainement très en deçà de la qualité de sa prestation. Peut-être le fait-elle pour autre chose, il me vient à l’esprit nombre de déesses qui gagneraient à accomplir un acte sexuel avec un humain en guise de sacrifice ; j’en fais partie. Il ne manquait cependant aucune parcelle à l’éclaireur démoniaque que j’ai envoyé à sa rencontre, or le don d’une âme se voit particulièrement chez un être qui est créé à partir d’un tel matériau. Si j’ai donné ma motivation, partiellement, il me reste à découvrir la sienne, entièrement.




Dernière édition par Thomasine T. Océane le Mer 15 Avr - 5:15, édité 1 fois
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Emilia A. MurphyEmilia A. Murphy


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MessageSujet: Re: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptyMar 14 Avr - 23:46

J'avais mieux encadré mes services depuis mes mésaventures avec Éris. Sa manière de me traiter m'avait ramenée à ce que j'essayais d'éviter dans ma nouvelle vie : me retrouver méprisée et sous-estimée. Vénus m'avait pris mon titre, Éris avait salement endommagé ma dignité. Mais je n'allais pas me laisser être définie par ce qu'on me faisait. En cachant mon identité pendant des années, je m'étais bâti une vie certes modeste, mais agréable et gratifiante. Mon intérêt pour l'industrie du sexe remontait à l'Antiquité et je trouvais un charme certain à ce milieu où on me voulait et m'exhibait. Les désespérés avaient le droit à leurs désirs aussi. Si je pouvais leur donner l'impression de ne pas être malheureux, minables et vides pendant quelques heures, je m'appropriais en quelque sorte mes responsabilités d'ancienne déesse de l'amour. Et même s'il m'arrivait d'utiliser ma profession pour m'étourdir ou me faire du mal, je restais celle qui décidait, j'imposais mes conditions.

Ce soir, vêtue d'une robe mi-cuisses vert émeraude à manches longues, mais avec les épaules dégagées et le dos nu, je m'étais préparée à faire tourner les têtes à la soirée où mon client devait m'emmener. Un fin collier ras-du-cou Volcano Designs en argent et émeraudes scintillait au-dessus de mon fin décolleté et j'avais épinglé de minuscules émeraudes à mes oreilles. Mes lèvres étaient rouge foncé, dessinées à la perfection. Je ne me mélangeais pas aux autres dieux et je restais effacée au Velvet Dream, mais je refusais de participer à une soirée sans qu'on remarque mon apparence avantageuse. J'avais enroulé mon collier dissimulateur comme bracelet avec d'autres chaînes brillantes à mon poignet gauche.

Mon client était passé me chercher et nous avions pris la route vers le quartier Empire. Il n'arrivait pas à me regarder dans les yeux, ce qui m'indiquait qu'il n'avait pas l'habitude d'avoir recours à ce genre de service. Était-il un universitaire absorbé par ses études mais voulant impressionner sa famille en s'affichant avec une belle femme? Peu d'hommes jeunes m'engageaient pour d'autres raisons. Ils étaient souvent timides, voire tarés, et incapables de parler à une fille pour soutenir son intérêt plus que quelques minutes avant de se ridiculiser ou se dégonfler. Je fis quelques blagues gentilles pour le détendre, en lui caressant le bras quelques fois en riant, puis je pris sa main. Il restait bizarre. Il devait s'inquiéter pour la soirée.

Nous nous arrêtâmes chez lui pour aller chercher un truc oublié. Je me méfiai à demi quand il me demanda de venir avec lui. Cet arrêt combiné à son attitude  me faisaient douter sur ses intentions. Toutefois, il ne me faisait pas peur : à moins d'être un dieu, il n'aurait pas le temps de s'en prendre à moi sans que je le neutralise magiquement. Depuis que j'avais joint le camp de Hel et Loki, je me savais à risque d'être confrontée à des ennemis malgré notre discrétion et je me tenais prête. Mais même Loki ne s'était pas fait tuer par les autres dieux, donc je ne m'inquiétais pas beaucoup quant aux dangers que je courais.

Je ne fus pas surprise en découvrant justement une surprise dans l'appartement où mon client m'avait conduite. Je reconnus une déesse que j'avais vue plusieurs fois au Velvet Dream. Elle m'accueillit de manière presque théâtrale. Nous aurions évidemment pu nous rencontrer autrement, mais il ne servait à rien de le lui souligner. Elle avait payé, non? Elle était la cliente, je ne pouvais pas l'insulter. Avait-elle choisi cette méthode justement par recherche de ce type de jeu? Les femmes qui m'engageaient, très rares, me faisaient souvent découvrir des motivations bien plus originales que les hommes. Plutôt que l'image et le sexe, je travaillais sur leur ennui ou leur solitude. Je vins m'asseoir près d'elle après avoir acquiescé avec un sourire tendre, sans un regard pour celui qui n'était finalement pas mon client.

Elle souligna la nature divine que nous partagions et je doutai. Elle semblait avoir mis en place une stratégie tordue pour forcer Aphrodite, celle qui venait avec le statut et les pages de toutes les couleurs de réputation, à la rencontrer en privé. Pourquoi? Souhaitait-elle que notre entretien reste secret? La plupart des dieux ignoraient mon identité et, parmi ceux qui la connaissaient, peu s'intéressaient vraiment à moi. Elle ne risquait rien à me voir en public, sinon une fuite plus facile de ma part. M'avait-il attirée dans une sorte de piège? Les anciennes divinités – je ne la connaissais pas, mais ce qu'elle dégageait me convainquait qu'elle n'était pas d'une mythologie récente – aimaient jouer avec la vie des autres.

Je souris à sa mention de Loki. L'idée qu'on me prenne pour lui me ravissait et m'amusait. Cette déesse savait-elle que Loki était en vie? Je ne serais pas celle qui le lui apprendrait.

-Beaucoup de dieux peuvent avoir intérêt à se dissimuler, que ce soit pour leurs crimes, passés et futurs, ou pour la simple envie qu'on leur fiche la paix.

J'avais terminé ma phrase avec un sourire moqueur laissant deviner que sa curiosité et son intérêt étaient déplacés. Je ne souhaitais pas me faire une ennemie, mais avoir été trompée puis attirée pour ensuite être questionnée me déplaisait. Et me faire accuser à l'avance de mentir me donnait surtout envie de lui cracher toutes sortes de vérités.

La détresse? L'odeur du désespoir? Mes yeux se plissèrent de méfiance et de colère à la fois. M'avait-elle fait venir exclusivement pour m'insulter? J'inspirai. Me calmai.

-C'est drôlement généreux de votre part de vouloir me traiter comme un petit oiseau blessé.

J'aurais dû me calmer davantage.

-Le bas de l'échelle? Tout le monde n'est pas obsédé par le capitalisme et la politique, Mme… Aurai-je le grand honneur de connaître votre identité ou dois-je me livrer aussi au jeu des petites enquêtes? Je pars tout de même avec quelques tours de retard.

Elle me rappela la présence de l'humain. Qu'est-ce que j'en avais à faire? Il allait me servir, disait-elle, comme si la plupart les hommes ne finissaient pas par le faire devant la promesse floue de m'avoir dans leur lit.

-Je prendrais bien du vin, dis-je plus pour gagner du temps pour m'adapter à la situation que par réelle envie de boire.

La mention de cette boisson me rappela que je n'avais pas fait honneur de ma présence à une fête de Dionysos depuis bien trop longtemps. Si cette déesse m'offrait à boire pour améliorer mon confort, il était possible que ses intentions ne fussent pas aussi agressives qu'elle m'en donnait l'impression.

-La position dans laquelle vous me mettez est étrange. Je ne veux pas vous être hostile, mais je comprends mal ce que vous cherchez.
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MessageSujet: Re: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptyVen 17 Avr - 13:47







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Déesses oubliées


Le choix d’une robe verte est intéressant. Evidemment, l’arrêter à mi-cuisse permet de souligner celles-ci ; dos et épaules suivant cette même logique, ces dernières d’autant plus marquées que les bras au-dessous sont dissimulé. La couleur reste le plus signifiant, à mes yeux. Pour les occidentaux, le vert est une couleur apaisante, rafraîchissante voire tonifiante ; la couleur du monde végétal, avec toutes les qualités associées. Cependant, ils y voient également l’espoir et la chance ainsi que, parfois, leurs complémentaires d’échecs et d’infortune. Il est amusant de savoir l’existence d’une convention la bannissant des théâtres de France sur la légende urbaine que Molière serait mort, sur scène, en portant un vêtement de cette couleur. Cette anecdote n’est intéressante que si l’on considère qu’Emilia joue un rôle, non qu’elle soit sincère dans sa démarche d’escorte. Ce point étant à prouver, c’est surtout la possible signification d’échecs et d’infortunes qui attire mon œil ; entre autres choses.

Un autre point qui attire mon regard est son fameux collier. Je suis aussi surprise que je peux l’être lorsque sa gorge se dévoile parée d’argent et d’émeraudes, complément de la robe entrant en écho avec les boucles d’oreilles. Voilà qui saurait être intéressant si mes soupçons concernant l’artéfact étaient faux. Si je suis pleinement confiante en mes capacités à analyser autrui pour en déduire l’odeur de ses sentiments et rendre crédible une capacité surnaturelle à détecter mon péché, j’admets sans peine pouvoir me tromper dans certaines déductions et analyses. D’autant plus lorsqu’elles impliquent les perceptions d’autrui. Qu’on se rassure, je ne condamnerai pas l’un de mes suivants pour avoir atteint les limites de ses compétences. Au final, cela ne changera rien à ma vie.

Troisième point d’intérêt, le contrepoint colorimétrique aux verts si présents. Il n’y a pas grand-chose à dire des lèvres parées de la couleur la plus fascinante et ambigüe qui soit. Le paradoxe du rouge n’en est guère un présentement.

Viennent ensuite les choses pour lesquelles elle ne s’est préparée, introduites par la surprise et le doute. Les sentiments étant compréhensibles et partagés, je poursuis sans m’en encombrer. Qu’importent les questions, je n’en pose pas vraiment. Il y en a dans mon esprit, évidemment, surtout lorsque la mention de Loki la fait sourire. Plus que l’amusement causé par mes soupçons, c’est le sourire lui-même qui est signifiant. Certains auraient été insultés, d’autres agacés, d’autres encore indifférents. Ce sourire, cependant, ne me semble pas négatif, pas méprisant. Il me semble vrai. Un indice sur sa véritable identité ? Loki, quelqu’un avec de la considération pour lui ou tout du moins quelqu’un qui ne le répugne pas.

J’écoute sa réponse avec intérêt, le même que je voue à sa personne, et mes paupières marquent mon intelligence de leur plissement. Beaucoup de dieux peuvent avoir intérêt à se dissimuler, sans doute cela dépend-t-il de ce que l’on entend par dissimuler. Suis-je dissimulée à être le démon d’une autre mythologie que la mienne ? Je considère néanmoins les raisons qui viennent à l’esprit, et à la bouche, de mon invité : "les crimes, passés et futurs, ou la simple envie qu’on leur fiche la paix". L’emphase sur la seconde partie de la phrase étaye un avis. Le sourire moqueur qui la conclu également.

Je lui rends ce sourire, quoi qu’il soit plus emprunt de connivence chez moi. Je suis pleinement consciente de me faufiler dans des endroits où je n’ai pas été invitée. C’est l’un des avantages des serpents, si la tête passe le reste passera aussi. Ou, de façon toute aussi imagée, je suis une fouille-merde et j’aime ça. De savoir jusqu’où je peux l’être déplait suffisamment à Emilia pour qu’elle le manifeste des mots en plus de l’avoir fait du visage.

Elle tâche de garder le contrôle, cependant. Colérique ?

L’évocation ironique de ma générosité transforme mon rictus en amusement, un amusement bref puisque la considération d’une divinité comme un "petit oiseau blessé" me fait pencher la tête sur le côté. C’est agressif, indiscutablement, mais je ne me formalise pas des signes défensifs de mon invitée. Surtout qu’elle le fait, elle.

« Le bas de l'échelle? Tout le monde n'est pas obsédé par le capitalisme et la politique, Mme… »

C’est définitif, j’aime sa voix. Féminine, romantique, séductrice… j’y ressens beaucoup de choses, qu’importe que le ton n’y soit pas vraiment. C’est cependant un ressenti bien plus subjectif que mes analyses habituelles. Bien moins fiable.

Doit-elle se livrer elle aussi au petit jeu des enquêtes ? Non, plus exactement, "au jeu des petites enquêtes". Elle ne l’apprécie pas. Elle ne l’apprécie pas et je ne pense pas que ce soit une question de tours de retard. J’ai déjà anticipé cette possibilité, sans quoi ne serait allé "droit au but" précédemment. Je concède évidemment que mon "droit au but" soit sinueux. L’évocation de l’humain, dans ce cadre, prend allure de détour également ; une diversion, un apaisement, une politesse qui ne m’étouffait pas jusque-là. Emilia saura faire bon usage de ce temps, j’en suis certaine. Pour ma part, je sais faire bon usage de son geste.

La position dans laquelle je mets Emilia est étrange, j’en conviens. Elle ne veut pas m’être hostile malgré cela, j’en conviens également. Elle ne comprend pas ce que je cherche, c’est un inconvénient. Ma curiosité est pourtant déjà énoncée et elle est réellement le motif premier de mon petit jeu, même s’il est vrai qu’elle ne soit pas sans arrières pensées ; futures.

« Si le jeu vous déplais, je vous l’épargnerai. Mon plus ancien nom est Nammu, cependant vous me connaissez peut-être comme Tiamat ou Léviathan. »

J’observe avec une attention particulière ses réactions à chacun de mes noms. Ils sont les témoins de générations de divinité, Nammu ayant été employé du début du IVe à la fin du IIIe millénaire avant l’ère chrétienne. Avec la montée en puissance de Babylone au IIe millénaire, Tiamat a été popularisé même si c’est l’Enuma Elish de la fin du millénaire qui l’inscrit sur le marbre comme nom et non titre. Liviyatan peuvent être associés au Ier millénaire avant, devenant peu à peu en le Léviathan au premier millénaire après JC puis simplement en Léviathan au second millénaire. Quant au IIIe…

« Si vous souhaitez une appellation plus "actuelle", Thomasine me convient. Quand à vous, cela sera Emilia je suppose… »

Puis-je faire confiance à un nom qu’elle me donnerait d’elle-même ? Je suis le Grand Menteur et, en tant que tel, seuls des êtres d’une nature aussi trompeuse que la mienne peuvent prétendre pouvoir me mentir ; Loki en est un bel exemple, même si je suis certaine que Satan s’est déjà essayé au jeu, ne serait-ce que pour essayer. Reste à voir si Emilia en fera de même, et ce que je serais capable de voir. Pour l’heure, aucun de ses propos ne prêtent au mensonge et je ne saurais oublier que les meilleurs menteurs "disent toujours la vérité", ou tout du moins sont capables d’user de la vérité de la même manière que des mensonges.

« Je comprends que le capitalisme et la politique puissent désintéresser. A dire vrai, le premier m’inspire du sarcasme. La seconde est plutôt une question d’amusement : le pouvoir politique est concédé par les autres. C’est une erreur que de le croire supérieur à ceux de la nature, dont nous autre bénéficions déjà. Même au sein de la civilisation humaine, il n’est que le jouet d’autres puissances, économiques notamment. »

Cette dernière phrase a une grande amertume, considérant que l’Etat est aujourd’hui soumis aux acteurs de l’Argent, mais Emilia n’est pas impliquée ni même forcément intéressée par cette guerre. C’est une question d’administration et de civilisation humaine, un enjeu des plus étrangers à quelqu’un animé par "la simple envie qu’on lui fiche la paix" ; quand bien même cela peu impliquer des crimes, indiscutablement.

« Plutôt que d’énoncer des évidences, j’en reviendrais à ma motivation. Curiosité, quant à ce que j’ai observé de vous, et confiance, dans le fait qu’une rencontre serait intéressante. Evidemment, il y a des arrières pensées… cependant, difficile de les formuler tant que j’ignore les crimes que vous avez pu et pourrez commettre. Moins que des jugements, il est question de possibles. »

Chose expliquant que les crimes soient une possibilité bien plus attrayante que la simple envie qu’on lui fiche la paix. Considérant que je suis antagoniste au second point quoi qu’il advienne, j’apprécie le premier. Une appréciation que je manifeste, même si elle est en partie due à mon petit jeu.

Alors que mon contracté s’en revient avec un vin dont la qualité doit être digne des démoniaques résidents habituels de cet appartement, je me contente de maintenir ma position d’aise en épiant du regard. Quelqu’aient été les vérités concernant sa parure et sa capacité à dissimuler sa qualité, Emilia n’a pas renié cette dernière ainsi puis-je poursuivre à mon aise malgré ma légère marge d’erreur.




Dernière édition par Thomasine T. Océane le Mar 29 Sep - 4:19, édité 2 fois (Raison : retirer les références aux autres mythologies)
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Emilia A. MurphyEmilia A. Murphy


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MessageSujet: Re: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptyLun 27 Juil - 22:20

J'aurais pu me mêler davantage aux autres dieux, et je ne savais pas si j'en avais envie ou non sur le long terme. Il me semblait que ma vie parmi les humains ressemblait à celle que j'avais menée sur l'Olympe : jeux de pouvoir, rôles sociaux, mensonges et jugements. Les dieux ressemblaient aux humains et, même en me sachant supérieure aux mortels, je ne pouvais ignorer notre proximité.

J'avais choisi de me livrer au jeu de la prostituée : je m'inclinais officiellement devant ma cliente, je la laissais mener la partie. Mais cette entente restait illusoire. Que la déesse se soit payé le rôle de domination ne me pliait en rien à sa volonté, mais je voulais en donner l'impression. Elle ne nous avait pas mises dans cette situation pour rien. Elle souhaitait se donner dès le départ une position en hauteur. J'avais l'habitude de ce comportement chez les hommes, mais aussi chez les divinités.

Sa manière de rapidement en venir aux insultes sur un ton mielleux avait achevé de me convaincre que la déesse avait décidé de me prendre de haut. J'étais partagée entre la colère et la peur. Elle savait que j'étais une déesse et avait conclu que j'étais puissante, mais elle me provoquait. Elle se considérait donc comme encore plus dangereuse. Peut-être s'amusait-elle à me tester comme un chat jouait avec sa proie avant de la tuer. Je ne doutais pas de mes dons magiques, même sans titre officiel, mais je ne me faisais pas croire qu'on ne pouvait pas me dépasser. Certains dieux n'avaient ni passé par la brèche ni de lien avec les Enfers, ce qui leur conférait une magie unique dont les détails menaçaient de réserver des surprises à leurs ennemis. Avais-je une ennemie puissante sans le savoir?

J'aurais voulu agir avec réserve, mais mon instinct me poussait à répondre avec l'attitude fière d'une déesse romaine. Se montrer plus grand que nature laissait de toute manière voir une confiance en ses capacités, ce qui sous-entendait une force à ne pas négliger. Enfin, certains humains abusaient de cette attitude pour se valoriser, mais les dieux ne pouvaient pas se la permettre sans une grande puissance pour la soutenir. De plus, montrer qu'elle ne m'impressionnait pas risquait de la faire douter de ses plans pour me nuire, si tel était le but de cette rencontre.

La déesse réagit positivement à ma remarque à moitié à la blague sur sa curiosité déplacée. Son attitude diminue un peu ma méfiance. Elle se présenta enfin : Tiamat et Léviathan. Deux nom que je connaissais déjà pour avoir lu à leur sujet par intérêt pour les différentes mythologies que je pourrais rencontrer. Je n'avais pas fait le rapprochement entre cette déesse ancestrale et la créature infernale, mais puisque des divinités, surtout anciennes et au culte disparu, avaient réussi à survivre en se liant aux Enfers, je n'étais pas étonnée de cette découverte. Je me trouvais donc en présence d'une déesse pleinement consciente de l'importance de l'adaptation. Cette conclusion en amenait une autre : elle ne risquait pas de me comparer à Vénus, mais plutôt de comprendre comment ma situation concernant mon titre nécessitait une solution plus compliquée que le combat ou l'entêtement.

-Thomasine sera plus simple, alors.

Je réfléchis quelques secondes avant d'en dire plus. Elle attendait ici une révélation de ma part, mais je ne lui avais rien promis. Elle était celle qui m'avait fait venir sans politesse ni intentions honnêtes. Soit elle savait qui j'étais et souhaitait me tester, soit elle n'avait découvert que mes origines divines sans précision.

-Donc vous m'avez fait venir en pensant que je suis Loki. Quelque chose vous fait douter maintenant?

Je ne lui offrais aucune réponse, mais avec gentillesse. Elle m'avoua m'avoir attirée ici par curiosité.

-Je n'en suis pas à ma première curieuse, et dissimuler mon identité – j'y reviens plus sérieusement – me permet justement de filtrer les gens qui ne veulent que jeter un œil de près aux grandes personnalités des mythologies connues.

Un petit indice de plus pour la faire travailler, mais un qui ne voulait rien dire.

-Toute curiosité a une motivation, surtout chez les dieux. Vous me parlez de crimes, mais je n'en cache que peu, sinon peut-être la chute de notre ancienne mairesse, mais n'était-elle pas méritée?

Je guettais ses réactions. Héra n'avait que peu d'alliés aux Enfers et Tiamat m'avait accueillie en sous-entendant un intérêt positif envers Loki. Elle doutait de sa mort, comme beaucoup de gens. Maintenant qu'il avait tissé un important réseau d'alliances, sa présence était plus difficile à cacher. Mais peu de gens le voyaient, encore moins savaient sous quelle identité il vivait. J'avais participé directement à retirer le pouvoir du camp ennemi sans même adresser la parole à Loki. Hel m'avait aussi assuré que mon implication restait anonyme sauf pour elle, son père et quelques alliés de confiance. Officiellement, Loki n'existait pas, mais des dizaines de dieux et encore plus de mortels le soutenaient ou dépendaient de lui. Il y avait de quoi éveiller l'intérêt d'une déesse curieuse.

Je fis tourner le vin dans ma coupe avant d'en prendre une petite gorgée. Le jeu de pouvoir m'apparaissait transformé, et j'appréciais me retrouver dans le rôle de celle qui décidait.

-Mes mystères vous intéressent, vous n'êtes pas la première, dis-je en exagérant grossièrement l'attention qu'on me portait dans ce monde. Votre réputation est bien sûr impressionnante, ce qui vous fait sortir du lot. Vous semblez aimer les petits jeux. J'en suis aussi friande. Je crois avoir envie de me révéler à vous, mais pas gratuitement. Je vous échange mes secrets contre vos secrets. Qu'en dites-vous?

Je levai doucement ma coupe pour l'inviter à se lancer en révélations.


Dernière édition par Emilia A. Murphy le Jeu 5 Nov - 16:33, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptyMar 29 Sep - 5:39







tiamat17.jpg

Déesses oubliées


La colère supposée précédemment transparait un peu à mesure que mes paroles s’écoulent. Cependant, elle se mélange avec une autre expression, plus complexe encore. Remontée et rapprochement des sourcils, éloignement entre eux et la paupière supérieure, étirement externe des lèvres, légère implication de la mâchoire… je sens la peur. Je m’en étonne. S’il est courant que l’on craigne le dragon et le chaos, ils ne sont énoncés que plus tard. Ainsi, la peur temporisant la colère amène bien plus d’interrogations ; que l’on synthétisera en "pourquoi ?"

Je n’en aurai probablement jamais le cœur net, sachant qu’Emilia se détend légèrement par la suite. La peur ne revient pas face à ce que je suis. L’étonnement n’apparait pas plus. Ce genre de rencontre a ainsi été anticipé, peut-être une explication quant à la peur précédente : de tous les scénarii nés dans l’esprit de l’autre déesse, nombre doivent prêter à la crainte. Est-ce vexant de savoir que certains prêtent plus à craindre que moi ? Du tout, c’est plutôt amusant. Je suis curieuse de les connaitre à présent. Sans compter que la peur ne me servirait guère, présentement ; difficile pour moi de chercher à être rassurante sans déclencher la méfiance, du fait des raisons que l’on me donnera.

"Thomasine sera plus simple, alors", voilà le genre de déclaration qui me satisfait ; bien qu’il y ait très peu de déclarations qui ne me satisfassent pas lorsqu’il s’agit de me nommer. Même "l’autre connasse" me convient, après tout. Sans que cela soit hors sujet avec la situation actuelle, cette dernière m’intéresse cependant plus que mes nombreux surnoms.

Le silence, pendant plusieurs secondes. L’attention, durant chacune. Le suspens ? D’une certaine manière.

La chute.

« Donc vous m'avez fait venir en pensant que je suis Loki. Quelque chose vous fait douter maintenant ? »

Voilà qui change une nouvelle fois mon sourire, mélangeant façade de ma réflexion et amusement à celle-ci. Emilia me fait douter. Emilia me fait douter de mon doute. J’ai énoncé un soupçon pour voir sa réaction et le confronter, désormais c’est elle qui en use pour me confondre. J’aime.

« Vous. »

Impossible pour moi de fournir plus honnête, et plus concise, réponse. Emilia me fait douter. Emilia me fait douter de mon doute. C’est une plaisante gymnastique mentale. Bien plus complexe que la compréhension des raisons qu’énonce l’autre déesse. Filtrer les gens qui connaissent son identité, cela nécessite-t-il réellement de dissimuler la nature de celle-ci ? Cette question ayant autant de bonne réponse que de personne à qui on la posera, je l’évacue pour me concentrer sur le reste des paroles et la partie qui me décrit potentiellement. "Filtrer les gens qui ne veulent que jeter un œil de près aux grandes personnalités des mythologies connues" ; voilà qui me désigne et la désigne elle aussi. Emilia s’estime donc importante, comme toute divinité, et parle d’une mythologie connue. Connue des hommes, donc, et non pas oubliée. En retirant à cela les divinités que je connais déjà, cela ne laisse qu’une multitude de divinité possible.

Toute curiosité a une motivation et, une fois encore, Emilia joue de la mienne pour faire de moi un ouroboros : je me mors la queue. Ce qui me convient parfaitement, comme précédemment. Quand aux crimes qu’elle n’énonçait pas, en voilà un dévoilé : la chute de notre ancienne mairesse. Comme s’il s’agissait d’un crime !

« L’assassinat politique n’a jamais été puni par aucune loi et n’empêche pas la résurrection dans le même domaine. »

Je constate un fait plus que je n’énonce une opinion, tout en taisant que les régimes simili-démocratiques se prêtent mieux à ce petit jeu que les autres. Cela étant, la position d’Emilia sur l’échiquier est donc effectivement plus proche de celle de Loki que de ceux qui ont réussi à récupérer son héritage ; en l’assassinant d’une manière bien moins politique, sous réserve qu’il ne l’ait pas fait tout seul. Loki lui-même ? Une alliée ? Voilà qui devrait limiter les suspects. Voilà qui offre des pistes intéressantes. Cependant, je suis ici pour Emilia et non sont éventuel réseau.

La posture victorieux et satisfaite d’Emilia me redonne le sourire. Je me doute ne pas être la première, ni la dernière, à m’intéresser à elle. Je me doute sortir du lot par mes seuls crimes. Quand aux petits jeux, je ne suis plus seule à m’y amuser ; et l’aveu de ma partenaire me laisse comprendre la position dont elle a besoin pour s’en satisfaire.

« Je crois avoir envie de me révéler à vous, mais pas gratuitement. Je vous échange mes secrets contre vos secrets. Qu'en dites-vous ? »

Elle lève sa coupe.

Je lève ma coupe.

Je lui demanderai bien de répondre à ma présentation par la sienne mais cela impliquerait menacer sa posture dominante. Ainsi vais-je entrer dans les détails en prenant la parole tel qu’elle m’invite à le faire.

« J’ai déjà énoncé mon identité et vous l’avez fait de votre position politique, ainsi suppose-je qu’il me faut révéler le second point pour obtenir le premier. »

D’un regard, je considère mon reflet dans la boisson sanglante. D’un autre, j’en reviens à Emilia.

« « Savoir qui trône à la mairie m’indiffère : c’est un pouvoir éphémère. Il a été voulu comme tel. Pourquoi réinstaurer une "démocratie" si ce n’est pour encourager les hommes et les dieux à jouer avec ? »

On pourra me répondre que les humains ne se seraient pas satisfaits d’un gouvernement dictatorial. Quand ledit gouvernement a-t-il eu besoin de la satisfaction de ses concitoyens ? Les élections régulières créent beaucoup de changements gouvernementaux, donc d’instabilité politique, ce qui empêche une réelle progression sur le long terme.

« Les institutions sont plus intéressantes. Les projets sont plus intéressants. Je tâche de reconnaitre à chacun, Loki comme Héra ou même le familier qu’elle a laissé après votre "crime", des réussites et des échecs. Voyez ma neutralité comme celle de la Suisse : je suis prête à aider tout le monde, tant que j’y ai un intérêt. »

Ce qui s’applique également pour Emilia. Peut-être me trouvera-t-elle, par cet aveu franc, peu fiable. Comme si la condition de démon n’y suffisait pas. Je suppose néanmoins que mon interlocutrice veut plus que cela, sa position le demande. Que puis-je bien fournir pour en obtenir plus qu’une identité ?

« Je ne suis pas seule. Quoi qu’on dise de l’Enfer abrahamique et de ses "propriétaires", nous sommes plutôt bien organisés. Evidemment, beaucoup d’entre nous préfèrent profiter des nécessités du reste du monde pour faire leur beurre. Cependant, plusieurs sont à New York City. »

De ma main libre, je désigne l’appartement autour de nous. Je me doute que les présentations du réseau ne sont pas ce qui intéresse une divinité que veut qu’on lui foute la paix. Néanmoins l’énoncé de mon environnement divin et surhumain appelle une réponse.

C’est à mon tour de faire silence, me laissant mener par Emilia tout en évaluant son degré de fair-play dans le jeu qu’elle met en place.

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MessageSujet: Re: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptyJeu 5 Nov - 17:56

J'avais mené Héra à la fin de son règne officiel sur la ville, mais je ne la considérais pas comme mon ennemie. Elle ne représentait plus grand-chose pour moi, sinon un danger potentiel à garder à l'oeil. Presque personne ne connaissait mon implication dans sa récente chute, et elle l'ignorait donc probablement elle-même, surtout considérant la maigre quantité d'alliés qui s'accrochaient encore à elle. De toute manière, il était facile de vite me classer comme pion de Loki, voire même d'Éris, deux rôles qui me plaçaient comme cible secondaire seulement, dans le cas où elle aurait envie de se venger. Héra n'était pas assez folle pour éliminer une autre divinité puissante par colère, et je n'avais rien d'autre que ma vie à perdre. Ni statut social, ni titre divin, ni relation particulière, ni carrière glorieuse. Je ne me sentais pas en danger.

Mon alliance avec Loki et Hel reposait sur la promesse implicite que j'avais tout à gagner et rien à perdre. Je n'avais pas de but précis, je ne rêvais que d'une vie pleine, stimulante. Me lier aux dieux qui tiraient les ficelles de toutes les sphères de la ville me garantissait davantage de possibilités que me disputer pour trôner sur le sommet le plus visible.

Si Tiamat s'intéressait à moi, elle cachait probablement des projets. La puissance attirait la puissance. Je n'appartenais pas entièrement à Loki et je pouvais forger d'autres relations, tant qu'elles n'étaient pas directement contre lui ou les siens. Aussi, si la déesse infernale m'ouvrait des portes intéressantes, je risquais des les franchir.

-Vous.

Je ne lui offris pour toute réaction qu'un sourire figé. J'étais perplexe et un peu ennuyée. Ce n'était pas une réponse. Si elle s'obstinait à me parler en mystères, je ferais de même, et nous repartirions chacune plutôt déçue.

-L’assassinat politique n’a jamais été puni par aucune loi et n’empêche pas la résurrection dans le même domaine.

Encore une réponse évasive. La déesse semblait vouloir éviter de se prononcer. Pour ou contre Héra? Pour ou contre nuire aux autres dieux? Pour ou contre les divinités des grands panthéons? Pour ou contre la course à la mairie? On ne formait pas d'alliances sur des suppositions et des questionnements. Je déduisis alors que son but ce soir n'était probablement pas aussi précis que je l'avais d'abord imaginé. Elle avait parlé de curiosité, et celle-ci devait s'étendre sans précision, peut-être dans le but de bien cerner mes capacités et limites. Ou alors simplement pour en absorber le plus possible sans envie de faire le tri.

-De toute manière, les dieux sont en position pour manipuler les lois, au besoin, dis-je dans une tentative d'imiter son style de répliques aux orientations floues.

Je souris à sa déduction qu'énoncer ses positions politiques lui offrira l'information qui l'intéresse le plus. Ce serait un jeu bien court et surtout payant pour elle. Je pris une gorgée pendant qu'elle commençait à m'expliquer que la politique du monde mortel l'ennuyait sur beaucoup de points. Elle était honnête sur ses motivations égoïstes, une attitude qui me plaisait. Je l'avais adoptée avec Hel, il y avait quelques années, lui disant que même sans apprécier Héra, je me fichais un peu de sa réussite ou son échec, tant que mon confort ne s'en retrouvait pas diminué. Elle m'avait convaincue d'agir en m'intéressant à des projets, justement, comme ce que Tiamat sous-entendait rechercher. Allais-je décrocher à Loki une alliée puissante? Je n'y comptais pas. Je ne travaillais pas directement pour lui mais, surtout, je n'avais pas envie de me mêler de ses affaires. Il était bien capable de choisir lui-même de qui se rapprocher. Sans proposition précise à faire à Tiamat, j'avais un certain intérêt pour sa manière de fonctionner qui ouvrait la possibilité de se lier sans se promettre fidélité. Je ne croyais pas à la confiance éternelle, je préférais donc quand tout le monde était d'accord que c'était chacun pour soi.

-Les têtes tombent vite à la mairie, en effet. Il faut savoir projeter prudemment ce qui nous permettra d'éviter de couler. Même pour ceux qui se débrouillent bien dans l'eau, dis-je avec un sourire.

J'espérais que l'approuver et faire une allusion humoristique à sa nature marine lui feraient plaisir. Je préfère toujours qu'on m'apprécie plutôt qu'on ne m'aime pas. Du temps de la gloire de mon panthéon, entre mes multiples amants et les femmes que j'aidais, je pouvais fermer les yeux sur ceux qui me dédaignaient. Aujourd'hui, avec trop de dieux en même temps, aucune spécialité et des pouvoirs qui ne me permettaient pas vraiment de briller, j'avais plus souvent recours à la psychologie.

Elle me parla de l'organisation des Enfers, dont je ne connaissais que peu. J'aimais lire et m'informer, mais les démons n'avaient pas l'habitude de consigner par tomes numérotés les détails sur leur royaume. Je ne savais que des bases, soutirées par des sourires à Satan quand il venait voir Atara au Velvet Dream, et ce que des amants démons m'avaient raconté.

-Merci pour votre honnêteté, dis-je sans préciser lesquelles de ses paroles m'avaient réellement intéressée. Je ne suis non plus soumise à aucun camp précis, bien que je me refuse à être ennemie de Loki et de ses proches. Indépendante, mais pas traîtresse.

Tiamat avait déjà déduit que je n'étais pas Loki, donc nul besoin de continuer à jouer sur ce terrain. Je tenais toutefois à lui faire savoir que je ne nuirais pas à ceux qui m'avaient aidée.

-Je ne crains pas de servir les projets des autres s'ils me promettent en retour l'avancement ou l'amusement.

Je ne lui offrais toujours pas mon identité, parce qu'il était hors de question que je me risque à perdre si vite son attention, qui risquait de se transformer en analyse de ma personne filtrée par des préjugés. Comme je lui avais mentionné mes positions concernant des alliances, je me permis une nouvelle question, en avançant ma coupe vide pour être resservie :

-Que cherchez-vous d'une divinité dont vous ne connaissez pas l'identité? Je comprends la curiosité, et l'imprudence venant d'une personne qui n'a que peu de gens à craindre, mais qu'avez-vous à offrir pour quelqu'un qui justement se tient à l'écart?
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MessageSujet: Re: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptyDim 15 Nov - 7:46







tiamat17.jpg

Déesses oubliées


Mes paroles créent l’insatisfaction. Cela n’est pas l’effet voulu mais guère étonnant ; à regarder plus profondément dans l’océan, on n’y voit toujours moins. Cela pourrait devenir gênant, néanmoins. Dieux merci, ou déesse dans ce cas, celle qui me fait face répond avec une tournure de phrase à l’égale des mieux. Tournure qui me semble, du fait, limpide. Reste à savoir si elle n’est pas un avertissement.

La suite s’améliore, mes suppositions laissant à Emilia la mainmise sur notre petit jeu. Va-t-elle l’utiliser pour serpenter à mon instar ? Le temps me le dira. Pour l’heure, je parle. A l’insatisfaction précédente succède un intérêt plus appréciable, et apprécié. Tout aussi apprécié que sa réponse : plus que la confirmation quant à l’instabilité du pouvoir, l’ajout sur la prudence et les métaphores aqueuses me ravissent. Même moi dois-je me montrer prudente ? Considérant le nombre de divinités à m’avoir défaite pour le sport au cours des derniers millénaires, ce n’est pas déraisonnable. Reste à savoir si je le suis. Dans tous les cas, je souris d’autant plus au sourire d’Emilia.

« Merci pour votre honnêteté. Je ne suis non plus soumise à aucun camp précis, bien que je me refuse à être ennemie de Loki et de ses proches. Indépendante, mais pas traîtresse. »

Je lève un sourcil à la conclusion, la précision m’étant toute aussi savoureuse que le reste de la déclaration. Evidemment, la confirmation d’une acceptation à "servir les projets des autres s’ils promettent en retour l’avancement ou l’amusement" est ce qui m’intéresse le plus… cependant qui pourrait cracher sur une divinité faisant montre de loyauté ? Une bonne partie des panthéons, qui n’y croient plus. Pour ma part, je m’avance légèrement et appose mes coudes à mes cuisses. Pourquoi ai-je l’impression de voir de l’appréhension une fois de plus, au point qu’elle nécessite un geste pour s’en détourner ? Evidemment, il est du devoir de mon obligé de répondre à la demande et je ne lui accorde pas un regard lorsqu’il revient servir.

Que cherche-je auprès d’une divinité dont je ne connais pas l’identité ?
Qu’ai-je à offrir à quelqu’un qui justement se tient à l’écart ?
Au moins ai-je la réponse quant à ma capacité à me projeter prudemment pour éviter de couler.

« Qu’ai-je à offrir que vous ne puissiez vous procurer par vous-même, ajoute-je avec connivence. Le pouvoir. Ni politique, ni économique, ni social. L’ancienne forme du pouvoir, du temps où les panthéons signifiaient quelque chose. »

Le pouvoir, brut, cosmique, coule dans les veines de chaque divinité. Le plus ancien panthéon encore en mémoire aujourd’hui tient le sien de mon sang et c’est une chose que je suis plus que disposée à partager. La question étant : qu’est-ce qu’Emilia pourra bien faire de ce que je lui donnerai. Ce qu’elle voudra, je ne suis pas regardante. Enfin, tant que j’ai ma part.

« Vous n’avez besoin de moi pour vous amuser, j’en suis certaine, poursuis-je en me réinstallant contre le dossier. Quoi que je puisse apporter une dimension "fouille-merde", si cela vous intéresse. »

Une pause, le temps de la fixer bien dans les yeux.

« Vous n’avez besoin de moi pour avancer, vous avez prouvé votre intelligence. Evidemment, mon appui pourrait être utile si l’envie vous prenait de vous investir dans les Enfers. C’est un gros "si". »

Une nouvelle pause, le temps de baisser mes yeux vers le liquide sanguin et de contempler toute sa symbolique.

« En revanche, vous pourriez avoir besoin de moi pour accroitre vos pouvoirs, qu’ils soient destinés à assurer votre avancement ou votre amusement. »

D’avoir parlé de l’avancement avant de l’amusement, je déduis que le premier a prévalence sur le second. Peut-être que se tenir à l’écart n’est pas qu’une volonté, peut-être est-ce aussi une nécessité. Peut-être est-il difficile pour Emilia de nager dans le grand bain, quoi qu’elle y ait déjà mis les pieds pour en chasser quelqu’un. Prudence ?

Est-ce également une question de prudence que de conserver le secret de son identité si longtemps ? N’en serait-ce pas que de ne pas la croire sur parole, lorsqu’elle finira par m’en donner une. Confiante que je suis de pouvoir lire le mensonge, je ne m’inquiète pas trop pour la seconde partie. Quant à la première, le fair-play me semble déséquilibré. L’appréhension me tracasse cependant, tant je peine à trouver mon explication précédente – les scénarii faits dans l’esprit d’Emilia quant à une telle rencontre – satisfaisante face à cette nouvelle "montée" d’émotion.

« A défaut de votre nom, puis-je savoir pourquoi vous vous tenez à l’écart ? N’hésitez pas à me répondre par le "non/nom". »

Je suis volontairement ambigüe sur la nature du "non" ou du "nom" mais ma véritable ambiguïté en vient à cette possibilité de ne rien me dire. Le fair-play n’est guère présent mais ce qui m’inquiète est justement cette inquiétude qu’éprouve régulièrement Emilia. J’ai répondu à sa question cependant j’anticipe qu’elle ne soit pas prête à répondre à la mienne. Je l’accepterai car, même si elle n’aime être traitée "comme un petit oiseau blessé", je n’ai pas l’intention de l’effrayer davantage ; qu’importe sa blessure.

« Quant à savoir ce que je cherche auprès d’une divinité dont je ne connais pas l’identité, souris-je, prête à faire la conversation seule si elle ne veut répondre. L’identité, évidemment. La curiosité de ce que nous pourrions accomplir, aussi. Une simple rencontre, enfin. Une tentative d’amusement et d’avancement, en somme. »

Je conclus par un sourire, d’ores et déjà satisfaite quant à l’amusement ; même si je suis pour le continuer.

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MessageSujet: Re: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptyMer 24 Mar - 14:59

J’avais passé mes premières années ici à éviter de me mélanger aux plus puissants, dieux ou mortels. Par crainte? Par gêne? Plutôt par conclusion que je n’en tirerais que de la douleur. La gloire coûtait souvent bien plus que ce qu’elle rapportait. La solitude et l’ennui m’avaient donné envie de chercher plus que la vie tranquille que je m’étais construite parmi les gens en marge de la société, sans la quitter entièrement. On pouvait être deux choses. Une serveuse anonyme qui aimait jardiner pouvait aussi faire tomber des gouvernements dans ses temps libres.

-Qu’ai-je à offrir que vous ne puissiez vous procurer par vous-même? Le pouvoir. Ni politique, ni économique, ni social. L’ancienne forme du pouvoir, du temps où les panthéons signifiaient quelque chose.

J’écoutai avec de grands yeux, comme je le faisais pour les hommes d’affaires qui m’expliquaient leur entreprise comme à une enfant à éduquer. J’avais un peu plus d’intérêt pour ce que la déesse me racontait que pour les discussions avec mes clients, mais je ne recherchais aucunement la puissance. C’était trop dangereux. Et fatigant. Le pouvoir exigeait une dévotion que je ne me voyais pas tenir. Les paroles de Tiamat me ramenaient des siècles en arrière, à quand je devais me faire aimer des mortels, en quantité, et rester bien à ma place. Aujourd’hui, je ne faisais pas de vagues, et je ne nécessitais pas une grande liberté d’action, mais j’aimais savoir que rien ne me retenait. Loki ne me poursuivrait pas si j’arrêtais de répondre; je perdrais simplement le soutien qu’il m’offrait.

-Vous n’avez besoin de moi pour vous amuser, j’en suis certaine. Quoi que je puisse apporter une dimension "fouille-merde", si cela vous intéresse.

-C’est en effet un angle passionnant,
dis-je avec un petit rire.

Dans le doute, je me laissais toujours aller à charmer. Offrir l’attitude recherchée. Les gens espéraient en moyenne être approuvés, mais d’une manière laissant planer le doute. Ils vous avaient convaincus; vous n’auriez pas eu leurs idées tout seul.

-Vous n’avez besoin de moi pour avancer, vous avez prouvé votre intelligence. Evidemment, mon appui pourrait être utile si l’envie vous prenait de vous investir dans les Enfers. C’est un gros "si".

Je me redressai légèrement dans ma chaise, pour montrer le sérieux que j’accordais à cette offre.

-Je n’ai pas pour l’instant de projet d’investissement, mais je n’ai jamais visité les Enfers. Est-ce joli?

Battant des cils, j’ouvrais avec ma question volontairement naïve la possibilité pour Tiamat de me parler seulement de ce qui comptait pour elle aux Enfers. Leur grandeur, leur dangerosité, une section en particulier… Je savais le niveau de danger potentiel pour une divinité non infernale aux Enfers, mais je restais convaincu que personne ne souhaitait vraiment m’éliminer, donc une visite pour les voir moi-même me charmait étrangement.

-En revanche, vous pourriez avoir besoin de moi pour accroitre vos pouvoirs, qu’ils soient destinés à assurer votre avancement ou votre amusement.

-De grands pouvoirs assurent surtout beaucoup de mauvaise attention.

Je souris, bien sûr.

-A défaut de votre nom, puis-je savoir pourquoi vous vous tenez à l’écart ? N’hésitez pas à me répondre par le "non/nom".

Je prends une gorgée de vin, moins pour me donner du temps que pour jouer les mystérieuses.

-Je me suis lassée des jeux des dieux. Enfin, j’y ai participé récemment concernant Héra, mais je rendais surtout service.

Le regard dans le vague quelques secondes, je pense à Éris et sa haine pour sa mère.

-J’ai obtenu une source certaine de soutien, si j’en ai un jour besoin, mais j’aidais avant tout un ami. Je mène une existence simple, par choix, et c’est plus facile de le faire quand le panthéon grec me laisse tranquille.

Je lui souris avec complicité. Allait-elle apprécier mon indice?

-Quant à savoir ce que je cherche auprès d’une divinité dont je ne connais pas l’identité. L’identité, évidemment. La curiosité de ce que nous pourrions accomplir, aussi. Une simple rencontre, enfin. Une tentative d’amusement et d’avancement, en somme.

Elle tournait en rond. Était-ce sa manière de faire la conversation ou essayait-elle de me piéger?

-J’ose espérer que je vous amuse un minimum, à défaut de vous promettre l’avancement. Mais je vois mal ce qu’une déesse de votre statut peut encore attendre comme avancement ou nouveauté. N’avez-vous pas déjà tout eu?
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MessageSujet: Re: Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] Déesses oubliées [Emilia A. Murphy] EmptySam 3 Avr - 15:32







tiamat17.jpg

Déesses oubliées

L’intérêt d’Emilia augmente à présent, à la mesure de mes dires. Elle en vient même à répondre avec amusement, face à ma manière de le faire ; m’amuser, non répondre. Nous avons donc en commun cette attraction à nous mêler de ce qui ne nous regarde pas et à remuer ce que nous ne devrions toucher. Intéressant. Guère surprenant considérant son implication avec Loki mais intéressant tout de même. Les points communs facilitent le rapprochement.

Les Enfers sont cependant ce qui fait le plus mouche. La réaction est marquée et assumée. La réponse orale est toute aussi vire-voletante que la précédente, néanmoins. Je ne saurais critiquer une telle attitude puisqu’elle m’amuse autant qu’elle amuse celle qui en fait preuve ; cela fait parti du jeu et nous jouons toutes deux. Je ne saurais pas non plus me détourner des deux indices que sa déclaration m’offre : l’absence de projet d’investissement comme celle d’apparition aux Enfers, chose déclenchant un intérêt maquillé de naïveté. Des pistes à suivre.

Mon amusement s’approche du rire à la réplique suivante : "de grands pouvoirs assurent surtout beaucoup de mauvaise attention". Effectivement. Il me serait impossible d’ajouter quoi que ce soit à cela considérant mes mésaventures familiales puis… professionnelles ? Au bout d’un moment, être une proie devient plus qu’un sport. Cela étant, j’aurai dû me faire payer pour cela, si tant est que la réintégration à d’autres panthéons ne compte pas ainsi. Aparté mis à part, Emilia s’est "lassée des jeux des dieux". Elle se corrige et se défend, sa récente participation étant un service et non un retour. Un service qui fait se perdre son regard, signe que j’interprète comme de la tristesse. Au moins ses motivations sont-elles claires : les affects, non plus la stimulation intellectuelle ou la fuite de l’ennui.

« J’ai obtenu une source certaine de soutien, si j’en ai un jour besoin, mais j’aidais avant tout un ami. Je mène une existence simple, par choix, et c’est plus facile de le faire quand le panthéon grec me laisse tranquille. »

Elle me sourit et j’en fais de même avec connivence, ayant compris sa réponse détournée et l’appréciant tout autant que lorsqu’il s’agit d’en faire moi-même. Grecque donc, ou ennemie de ceux-ci ; ce qui laisse, majoritairement, les égyptiens dont les conquêtes macédoniennes ont vu le panthéon et les noms usurpés par ceux des grecs. Je ne pense pas qu’il y ait de rancune du côté grec, envers les égyptiens, puisqu’ils étaient usurpateurs. J’aurai également pu soupçonner les romains, usurpateurs des grecs entre autres, mais il me semble que les deux panthéons trouvent plutôt des points d’entente et qu’aucune divinité grecque ne cherche particulièrement à se venger de sa contrepartie romaine. Cela étant, je ne peux pas totalement éliminer cette possibilité. Grecque ou romaine, donc.

Dans les deux cas, Emilia "ose espérer qu’elle m’amuse un minimum" ; je laisse paraitre plus que ledit minimum en le soulignant d’un petit rire. Effectivement, elle ne me promet pas l’avancement et concentre l’amusement à nouveau avec cette mise en évidence. La suite fait faner mon expression.

« Mais je vois mal ce qu’une déesse de votre statut peut encore attendre comme avancement ou nouveauté. N’avez-vous pas déjà tout eu ? »

Je la fixe dans les yeux. J’inspire et cligne des paupières. Mes épaules suivent le mouvement inverse de ces dernières. Elle a fait mouche, avec une belle précision, et reste à savoir si je mordrais à l’hameçon.

J’ai tout eu, j’ai tout perdu.

Emilia touche à la transformation de Tiamat en Léviathan. Vaincue par le dieu majeur, décapitée et enchainée. Déchue. Démonisée.

Les lèvres sourient. Les yeux non.

« Je suis le démon de l’Envie. Qu’importe ce que j’ai eu. Qu’importe ce que j’ai. Je pourrais toujours envier. »

Je suis l’un des quatre princes infernaux mais suis soumise à un sous-prince et j’envie cette primauté seigneuriale obtenue par le biais de l’Ordre de la Mouche, dont je ne suis que chevalier. Je suis le Gouverneur des Contrées Maritimes des Enfers, lesquelles correspondent à l’océan souterrain que j’ai fait naitre de mes larmes à l’aube des temps et que mes autres enfants ont assassiné malgré mon amour pour lui comme pour eux, mais j’envie le second de mes enfants dont les Contrées Orientales sont le fief et dont le titre au sein de l’Ordre de la Mouche surclasse le mien. Je suis Grand Amiral des Enfers là où lui est Général en Chef des Armées Infernales. J’ai longtemps été la Grande Déesse avant que sa femme, et petite fille, ne reprenne se rôle et n’aille jusqu’à lui voler son temple là où les miens étaient oubliés. Je pourrais continuer ainsi jusqu’à ce que le chagrin se mue en colère ou la colère en chagrin, jusqu’à ce que l’amertume cède place à l’amusement, jusqu’à ce que l’intellect rappelle au cœur combien tout cela est absurde. Jusqu’à ce que les courants de l’océan déclenchent une tempête ou qu’ils se retirent en prévision d’un raz-de-marée. Cependant, qu’importe l’agitation des fonds marins, la surface reste calme. Immense. Indifférente.

« Vous, par exemple. Je peux envier votre charme. Votre mystère. Votre réussite, si tant est qu’elle le soit, à trouver une vie simple. A vous maintenir relativement éloignée de vos semblables et à avoir des relations, disons-le, moins tumultueuses. Plus… sincères ? Je ne pense pas que j’y parviendrais. »

Ce n’est pas réellement un aveu, plutôt un énoncé. Je suis certaine qu’à côtoyer Emilia, je trouverais d’autres choses à envier. Tout comme je pourrais cultiver l’Envie. Ce qui me ramène aux Enfers.

« Les Enfers n’aident pas. Cela étant, on peut les considérer comme jolis, oui. Il y en a pour tous les goûts : brulants, glacés, brumeux, humides. Je suis même certaine qu’on pourrait y trouver des bouts de paradis. Pour ma partie, il ne faut pas avoir le mal de mer. Ou répugner se baigner dans les âmes. C’est grand, c’est frais… c’est… c’est un lieu né de l’amour mais qui l’a perdu avec le temps. C’est calme également. Reposant. »

Ennuyant, au bout d’un moment. J’y ai passé suffisamment de temps avant la Brèche pour m’épargner d’y rester plus que les deux ou trois jours obligatoires par cycle lunaire. Cependant, c’est un lieu qui m’est cher pour le souvenir comme l’existence, non-pas un paradis sous terre mais un morceau de cœur. L’amour d’une femme, l’amour d’une mère, l’amour d’une grand-mère. L’amertume du temps.

« Après, si vous cherchez le divertissement, Pandæmonium est faite pour vous. Volcanique, antique, charnelle, dorée… les tableaux ne peuvent vraiment rendre son charme et le tourisme y est, disons, particulier. Les gens qui s’y rendent en reviennent rarement s’ils n’ont pas des amis ou un travail là-bas. Hell Incorporated a vraiment fait un excellent travail dans la politique de la ville, si vous savez apprécier l’aspect damnation éternelle et "à défaut de plantes vertes, mettez des âmes rouges". Si vous considérez que ceux qui punissent les méchants sont des gentils, je vous invite vraiment à y faire un tour pour voir à quoi la gentillesse ressemble. »

Je conclus par un clin d’œil qui n’aurait pas dépareillé sur la publicité pour Hell Incorporated. Cependant, il faut avouer que Pandæmonium est un haut lieu du cynisme au sens antique, rejetant toutes les conventions de politesse, de décence et de bonnes manières.

« Lorsque l’on a la puissance ou les contacts pour y prospérer, c’est réellement une place de liberté ; une liberté ne s’arrêtant pas là où commence celle des autres. Lorsque l’on n’a ni l’un ni l’autre, il vaut mieux l’éviter. Je pourrais vous faire visiter, si d’aventure l’envie vous prend d’y tenter une aventure, justement. »

Si je n’ai pas l’intention de passer plus de temps aux Enfers que le nécessaire, cela ne signifie pas que je ne sais m’y amuser ; surtout quand j’y amène des invités, consentants ou non.

« Après, la politique est aussi fracturée là-bas qu’ici. Chaque panthéon a son territoire, avec ses propres divisions. Contrairement aux dimensions plus célestes, les Enfers ont bien supporté la Brèche. »

Je ne dis pas que quelques-uns n’ont pas perdu des terres mais leurs gardiens n’ont qu’à éviter de se concentrer sur ce monde-ci, quoi qu’il soit effectivement plus vivant. Pour ma part, je n’ai pas vocation à régner dans le royaume souterrain. C’était une tâche qu’Absu, puis Enki, ont assumé. J’étais invitée d’honneur, reine-mère des lieux, plus que vraie dirigeante. D’où le titre de gouverneur. Les choses ont changé avec leurs disparitions. Mon amour. Mon fils préféré. Dans la division des royaumes célestes, terrestres et infernaux, c’est toujours le troisième qui finit baisé. Amusant de savoir que les dirigeants infernaux de l’ancien panthéon babylonien sont ceux à qui appartenaient le ciel et la terre, non l’enfer. Amusant, comme le reste.

« Trève de speech publicitaire. Cela vous intéressera de savoir que, à ma connaissance, la partie romaine des enfers prospère là où la grecque a perdu de sa superbe, pour être polie. »

Le dernier mot est un peu ironique considérant la grossièreté du test. La réaction d’Emilia devrait me permettre de confirmer ou d’infirmer l’implication des romains et des grecs dans sa propre nature. J’ai livré beaucoup d’informations et espère continuer d’en récolter quelques-unes.

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Déesses oubliées [Emilia A. Murphy]

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