Les Dieux de New York
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Garde alternée[Mars]

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Christian C. ReaverChristian C. Reaver


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MessageSujet: Garde alternée[Mars] Garde alternée[Mars] EmptyMer 12 Fév - 12:23

-Ça va, Cupidon, on a pas besoin de toi, me dit Matt en m'indiquant la porte d'un mouvement de tête.

Je déposai lentement l'assiette que je venais de prendre. Je n'avais pas envie de partir. La soirée avait été horrible. Pas que je ne m'y attendais pas un peu, mais c'était quand même décevant. Peut-être que ma mère avait envie que je reste, non? Qu'est-ce que Matt en savait? Il était télépathe? J'en avais marre de lui et de sa manière de jouer les chiens de garde pour Vénus. Il venait encore de parler à sa place. Elle n'avait jamais eu besoin qu'on la défende ou qu'on la protège, même si elle jouait ce rôle en s'entourant toujours d'amants violents ou fous furieux. Entre un créateur d'armes magiques, un dieu de la guerre, un dieu du chaos et un démon pirate, elle montrait clairement son type d'hommes. Elle ne se contentait pas d'hommes aussi puissants qu'elle par orgueil ou pour être bien vue socialement; elle les voulait dangereux. Les uns après les autres, ils finissaient par lui briser le coeur. Devait-on s'en étonner?

J'eus un regard vers la cuisine. Ma mère avait certainement entendu Matt, et elle n'avait rien ajouté. On me chassait. Super.

-Ok… Je vais partir, alors. Merci pour le souper, ajoutai-je un peu plus fort pour que mes remerciements paraissent clairement adressés à Vénus.

Je ne m'éternisai pas sur place. Les amoureux les moins attendrissants au monde devaient rêver de se retrouver pour se plaindre de Mars, et peut-être de moi. Mais quelle idée que celle d'organiser ce repas sans s'être préparés à ce qu'il se déroule de manière incontrôlable! Je n'avais pas brillé moi-même, mais je n'étais pas celui en charge de l'événement.

Une fois la porte refermée derrière moi, j'ôtai ma cravate et la mis dans ma poche. Raph m'avait dit de lui écrire ou de l'appeler pour lui donner des nouvelles, mais je n'en avais pas envie. J'étais fatigué d'avoir essayé de me montrer à la hauteur parmi des gens qui n'en avaient rien eu à faire. Tout était gâché. Je m'en voulais d'avoir imaginé tirer quelque chose de positif de cette histoire. Elle était ruinée depuis bien avant ma naissance. Aucun de mes parents ne voulait de moi. Vénus me tolérait par principe, Vulcain me traitait avec dédain et Mars, au mieux, se fichait juste de moi. J'aurais dû n'en avoir rien à faire. J'étais un adulte depuis bien trop longtemps pour encore chercher quelque chose de mes parents, mais je sentais un vide. Il me semblait que je n'avais personne.

Mon téléphone vibra. Un message de Raphael. Ok, j'avais Raph. Mais que valaient quelques années sur un fond de siècles? J'avais essayé d'être proche de plusieurs dieux et tous avaient fini par me repousser. Même ma femme s'éloignait de moi. Raphael se montrait loyal et attentif, mais je ne pouvais qu'appréhender une trahison ou un abandon de sa part sur le long terme, surtout maintenant que notre relation s'était compliquée. Je n'allais pas rompre avec Psyché pour lui. Et même sans compter mon épouse, je me voyais mal m'impliquer officiellement auprès d'un homme, surtout un homme mortel. Je n'avais pas envie des commentaires des gens, à commencer par Vénus.

J'envoyai une rapide réponse à Raphael, lui promettant de le rappeler le lendemain, et m'avançai vers ma voiture. En relevant les yeux de mon téléphone, je remarquai Mars. Que faisait-il encore ici? Je ne pouvais pas monter dans ma voiture en faisant semblant de ne pas l'avoir vu et j'étais maintenant trop près pour retourner près de la maison et attendre son départ. J'étais coincé. Je déverrouillai ma voiture à distance, pour que le signal sonore d'avertissement rompe le silence à ma place.

-Salut.

Je n'avais rien d'intelligent à lui dire, mais mes chances de faire bonne impression étaient déjà mortes, de toute façon.

[color:8d2a=teal-Désolé pour comment tout ça s'est passé. Enfin, c'est pas comme si on m'avait demandé mon avis non plus, dis-je en forçant un petit rire.

Si Mars doutait de mon implication dans l'organisation de la soirée ou de mes intentions, il serait fixé. Vénus avait imposé ses choix à tout le monde. Elle m'avait toujours traité de cette manière. J'avais appris que suivre et obéir me garantissaient les meilleurs résultats et évitaient bien des crises. Les rares fois où je lui avais résisté, elle me l'avait fait payer chèrement et longuement. Elle me laissait d'ailleurs  comprendre sa désapprobation concernant mon mariage avec Psyché quand le sujet s'y prêtait, comme si ça la regardait encore. Je ne disais rien. Je ne disais jamais rien pour la contredire maintenant. Et on se retrouvait encore dans des situations impossibles comme ce soir. Il n'y avait pas de solution.
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MessageSujet: Re: Garde alternée[Mars] Garde alternée[Mars] EmptyJeu 13 Fév - 18:30

Une bouteille, deux bouteilles, trois bouteilles. Il ne restait plus de vin sur la table, je n’avais donc plus aucune raison de rester dans cette affreuse soirée. Partir dès que les choses avaient commencé à mal tourner aurait été un aveu de faiblesse, et je n’étais pas de ceux qui capitulaient, plutôt de ceux qui prenaient un territoire et forçaient les anciens propriétaires à partir. Vénus et Matt étaient assez intelligents pour comprendre le danger. Ils ne pouvaient rien faire tant que je ne me décidais pas à partir de ma propre volonté. Pourquoi ? Parce que je n’étais jamais assez désagréable pour mériter de me faire jeter dehors, d’une part. On ne vire jamais ce brave oncle aviné qui ennuie tout le monde avec l’inconséquence naturelle de l’ivresse. D’autre part, parce que j’avais eu des regards changeants dès qu’ils avaient essayé de me provoquer ou de suggérer l’idée. Des regards qui montraient que j’étais prêt à lancer des hostilités ouvertes si on me refusait d’agir à ma guise, et personne n’avait envie que la soirée dégénère à ce point, surtout l’appartement qui n’aurait pas survécu à la colère d’un dieu de la guerre. Ils étaient pris en otage à leur propre table et j’avais savouré cette petite victoire, c’était tout ce que j’avais, en parlant à tort et à travers, en les forçant à m’écouter, à boire, à rire à mes blagues les plus mauvaises, à faire semblant de s’amuser. Vénus avait très vite compris qu’il était inutile de tourner longtemps autour de la révélation qu’elle souhaitait me faire. Elle m’avait jeté au visage que Cupidon était mon fils, devant cet inconnu qui n’avait rien à faire dans cette histoire, qui n’avait aucune raison de se retrouver à cette réunion dont le but aurait dû être de recoller les morceaux. Sa stupide présence annulait tout. Sa présence m’interdisait d’avoir une réaction délicate, sensible, intelligente, ou que-sais-je-encore. Je ne me souviens même plus exactement de ce que j’ai pu dire. Rien de particulier en réalité. L’information a glissé sur moi comme n’importe quelle information qui arrive à un moment où il n’est pas opportun de réagir. J’ai dû dire quelque chose comme « Fantastique ! Trinquons à nos retrouvailles » et bu d’autant plus vite en lançant n’importe quel autre sujet qui me passait par la tête.

Est-ce que je m’y attendais ? Pas vraiment, mais je l’avais deviné assez vite en entrant pour que ça ne soit plus une surprise. Qu’est-ce que j’en pensais ? Je ne voulais pas y penser ou, plutôt, j’y avais assez pensé à la naissance de cet enfant. Mais c’était déjà trop tard. Ça ne changeait rien puisque Vénus avait préféré maintenir son mariage contre tout bon sens. Pourquoi maintenant ? Parce qu’elle avait enfin quitté Vulcain et réalisait avec un immense retard comment son attitude avait blessé les trois personnes qui avaient le plus compté dans son jeune âge ? Si ses mauvais choix la poursuivaient des millénaires après, c’était, d’une part, bien fait pour elle, ça ne me concernait pas. J’étais serein quant aux miens. Je n’avais pas besoin d’être éclaboussé par sa bêtise. J’ai même, au contraire, un talent sûr pour éviter de me retrouver dans ce genre de problèmes. Ce n’était pas seulement l’esprit de vengeance qui m’avait poussé à être le plus désagréable à ce repas, mais un instinct de survie sociale très simple : Ne. Me. Mêlez. Plus. Jamais. A. Vos. Conneries. J’étais parti avec l’intention de trouver n’importe quelle soirée plus agréable où continuer à boire et ne plus y penser, mais je ne savais pas vraiment où aller ou, plus justement, j’ai marché un peu trop vite avant de me rendre compte que je n’allais pas du tout dans la direction souhaitée. Et, en revenant sur mes pas, Cupidon, ou Christian, arrivait droit devant moi. Il me salua, ce qui me laissa assez perplexe. Ce gosse avait décidément de graves problèmes de communication sociale, nous venions de passer plusieurs heures ensemble. J’eus envie de lui demander comment il allait depuis tout ce temps, mais il se lança dans ce qui essayait visiblement d’être un début de prise de contact. Je pouffe de rire et lui lance d’un air surpris :

– Mais qu’est-ce que tu racontes ? C’était une très belle soirée, qui manquait un peu de vin cependant, sans quoi je ne me serais pas trouvé dans l’obligation de vous fausser compagnie si tôt ! – J’éclate de rire, comme s’il s’agissait d’une réelle bonne blague avant de reprendre en gardant un grand sourire : – Tu veux prendre un dernier verre, ou un premier verre entre père et fils, après tout ?

Je crois que Cupidon a suffisamment payé les erreurs de sa mère. Il est socialement perdu, preuve qu’il y a eu un sacré problème dans son éducation, une méfiance sociale, donc, un manque affectif quelque part. C’est la peur du rejet des autres qui rend maladroit. De mon côté, mon intérêt est mince, mais Vénus m’a fichu la probable responsabilité de son échec dans les pattes. Cupidon a quitté cette soirée tout comme moi, je ne peux pas le laisser rentrer seul chez lui avec cette mine triste et l’impression d’avoir permis à sa mère de détruire toutes ses attentes.


Dernière édition par Lance M. Larian le Ven 8 Mai - 16:44, édité 1 fois
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Christian C. ReaverChristian C. Reaver


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MessageSujet: Re: Garde alternée[Mars] Garde alternée[Mars] EmptyMer 15 Avr - 22:55

Comme d'habitude, Vénus n'avait pensé qu'à elle. Je ne m'en étonnais plus, même si j'avais souvent à en subir les conséquences. Elle avait tenu à nous réunir à la même table, à nous forcer à feindre l'harmonie comme une vraie famille – les vraies familles feignent toujours l'harmonie – et à recevoir ses aveux dans un contexte où elle régnait. Chez elle, avec son démon de compagnie, en train de manger sa nourriture… Un piège déguisé en invitation. Elle s'était monté un piédestal sécuritaire, prête à être admirée sans recevoir de coups. Même si j'avais voulu me révolter, qu'aurais-je pu le faire sans lui donner l'occasion de me blâmer aveuglément? Avec ma mère, il n'y avait jamais moyen d'avoir raison, elle trouvait toujours comment me faire taire ou me faire regretter d'avoir exprimé mon avis. Elle décidait de ce qui était discuté ou non, de ce qui était important et de ce qui était acceptable. J'étais arrivé au fil des derniers mois à danser sur le maigre jeu qu'elle m'offrait, mais je n'en retirais qu'une mince satisfaction, après beaucoup d'efforts.

Tout allait mal, avec tout le monde. Psyché, Raph, Proserpine,Vénus et maintenant Mars. Je n'avais le contrôle sur rien. Je ne savais pas comment réparer les choses. Je n'étais même pas certain d'avoir envie de le faire. J'avais ma part de torts auprès de chacun, mais je n'avais pas l'impression qu'ils avaient envie de prendre conscience des leurs. À ramer seul, on tourne en rond. Je ne pouvais pas forcer Psyché à redevenir gentille, Raph à accepter une place moins gênante, Proserpine à arrêter de jouer avec mes sentiments, Vénus à me traiter avec respect et Mars à adopter une attitude claire par rapport à notre lien. En fait, toutes mes relations étaient compliquées et floues. Je ne comprenais ni les attentes ni les buts de chacune des personnes proches de moi. Ce repas n'avait rien amélioré, ni avec Vénus ni avec Mars. Les réactions de mon père ne m'avaient pas indiqué s'il préférait tenter une sorte de rapprochement ou si rester un étranger lui convenait. J'étais perdu.

À mes commentaires sur la soirée, Mars me répliqua un truc léger. Il ne me servait à rien d'insister. À l'annonce de Vénus, il avait adopté une attitude similaire. Agissait-il avec détachement par instinct de protection ou se fichait-il à ce point de ce qu'on lui avait révélé? Dans tous les cas, il n'avait pas envie de parler de ce repas. Tant mieux. Je n'avais rien à ajouter sur le sujet; je lui avais déjà fait comprendre ma désapprobation des méthodes de ma mère.

Je me forçai à rire à sa mention du manque de vin.

-Ouais c'est aussi pourquoi je pars.

Son invitation était-elle par simple politesse? Allais-je me ridiculiser si j'acceptais ou le vexer si je refusais? Je n'avais plus grand-chose à perdre.

-Ce serait cool de prendre un verre.

Je me retins de terminer par ''en se passant des commentaires de Matt'' parce que même si j'avais senti une certaine électricité entre Mars et lui à table, je n'étais pas certain de son avis sur lui. Peut-être le trouvait-il cool ou intéressant malgré leurs différends.

***

Un bar, c'était franchement plus relaxant que le chantier de guerre de Vénus. J'avais laissé Mars décider d'un endroit cool où aller boire, trop fatigué par le repas de révélations pour faire un choix. Il m'avait fallu attendre ma deuxième bière pour devenir un peu plus bavard et moins m'encombrer de retenue et de politesse.

-Le chiffre d'affaires de l'agence ne fait que monter, malgré les petites applis de rencontres qui surgissent continuellement. Les gens nous aiment!

Mon entreprise restait un sujet neutre. Je ne savais pas trop de quoi parler. Nous n'avions que notre panthéon en commun, et je ne savais plus qui étaient ses alliés et qui lui nuisait. Je ne cherchais surtout pas à créer de dispute. Je ne ressortirais peut-être pas de cette aventure avec un ami proche, mais si je pouvais au moins compter mon père comme un contact positif, ce serait une victoire. Et ça changerait de Vulcain à qui je ne parlais plus depuis des années. À qui je ne parlerais probablement plus, peu importe la suite des événements. Nous ne nous étions jamais bien entendus, et dans une mesure bien différente de mes conflits avec Vénus. Vulcain ne comprenait rien. Il semblait le faire exprès d'être blessant, me jugeait sur tout et m'offrait de l'aide mais toujours en me prenant de haut. Son rejet par les autres dieux ne venait pas de nulle part; il était insupportable.

-D'ailleurs, parlant de popularité, ton parti semble avoir beaucoup de succès. C'est super!
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MessageSujet: Re: Garde alternée[Mars] Garde alternée[Mars] EmptyDim 10 Mai - 16:39

On m’avait souvent reproché de forcer le positif dans les pires des situations, de trouver à rire alors que tout allait mal et que rien ne semblait récupérable mais je n’étais pas de nature défaitiste. Quoi de plus normal, pour une dieu de la guerre, après tout ? Sous mes airs insouciants, j’aimais contrôler. Si je décidais par exemple qu’une soirée devait bien se terminer, il ne m’était pas possible de renoncer à cette idée, même quand on m’aurait accusé d’être le principal acteur du fiasco. Et alors ? Les choses allaient et venaient. Dans une heure, tout le monde serait déjà passé à autre chose, donc à quoi bon attendre de digérer un échec, de le mesurer, pour repartir vers de nouvelles aventures ? Tant qu’on ne s’interrompait pas, l’échec n’existait pas, c’était pourtant simple ! Maintenant que je me trouvais devant Cupidon, l’aider à réussir sa fin de soirée relevait presque du devoir. Lui aussi avait compris qu’il n’y avait rien à attendre en restant avec Vénus. Est-ce que je tenais à le connaître davantage ? Pas réellement. J’essayais de ne pas vivre avec les regrets de ce qui n’avait pu se faire en général. J’avais eu d’autres fils, je les avais éduqués sans l’ombre d’une compagne pour m’imposer sa vision des choses. J’avais déjà éprouvé la fierté d’être père et la certitude d’avoir donné à mes enfants une belle vie, même si certains avaient trouvé la mort assez prématurément, mais sans jamais renier mes principes ou leur honneur. Cupidon n’était pas le fruit de mon éducation et je ne croyais pas que les gènes suffisaient à faire d’un enfant le vôtre, sinon, je n’aurais pas accordé autant d’importance à l’éducation de mes fils. Dire qu’un guerrier ou un roi que vous aviez formé partageait aussi votre sang était, bien sûr, une satisfaction immensément plus grande. Des millénaires plus tard, Cupidon pouvait être n’importe quel autre inconnu. Il fallait qu’il accorde de l’importance au fait que je sois son père pour que chercher à le connaître ait un sens. Mais c’était le cas. S’il voulait me connaître, je ne voyais pas d’inconvénient à lui montrer de l’intérêt en retour.

– Je crois me souvenir d’un bar pas trop loin dans le quartier, mais j’ai oublié l’adresse. Tu peux chercher pour moi ?

Si Cupidon voulait bien me laisser décider de l’endroit, je lui serais gré de me guider car je n’avais pas à ce point les idées en place pour le faire. Je me savais bien trop capable de partir dans un sens opposé et d’atterrir par lassitude dans un troquet minable où il n’aurait pas été convenable d’inviter qui que ce soit. Or, j’avais l’idée d’un genre de pub irlandais plutôt fréquentable en tête.

***

Je l’avais bien constaté en repas, Cupidon n’était pas le partenaire le plus divertissant pour un tête à tête. C’était comme si on ne l’avait jamais vraiment laissé s’exprimer. Il ne répondait jamais plus de ce qu’on lui demandait, et n’avait pas l’air de vouloir saisir l’occasion de questions complètement banales, comme son genre de boisson préféré, pour parler de tout et n’importe quoi. J’avais même fini par m’intéresser à la rediffusion du match de rugby sur le grand écran au fond du bar, tout en continuant à parler de tout ce qui me passait par la tête en attendant qu’il daigne réagir à quelque chose. Comme rien de ce qui ne me semblait amusant n’arrivait à le stimuler, je finis par rendre les armes et lui demander comment se passait son intégration professionnelle dans le monde moderne. Un peu plus motivé par sa seconde bière, il se lança dans un développement que je feignis d’écouter, même si j’en décrochais souvent involontairement, qu’il acheva par une exclamation étrange sur le fait que les gens aimaient son entreprise. Je ne voyais pas vraiment ce que ça avait à faire là-dedans, même si je savais que de nombreux chefs d’entreprises essayaient de se convaincre d’être indispensables et aimés alors qu’il n’y avait pas plus remplaçable par d’autres que la plupart des services qu’ils proposaient.

– Ils aiment surtout venir sur une application où ils ont la garantie de trouver du monde. Mais je suppose que c’est une bonne chose pour eux d’avoir réussi à centraliser au mieux ton activité.

Pour autant, je n’avais pas grand-chose à en dire. C’était bien qu’il fasse son business et tant mieux s’il en était satisfait. Je ne voyais pas l’intérêt de m’étendre sur un phénomène déprimant de ce monde moderne mais priver les gens de quelque chose qu’ils utilisaient par besoin serait stupide. Il fallait d’abord pouvoir détruire ce besoin dans leurs vies. Et, puisque l’on parlait de mon parti, c’était justement un programme long terme, un monde qui donnerait à tous ceux qui le méritaient une meilleure chance d’exister. Alors oui, c’était « super » que les gens soient sensibles à ce discours, cela prouvait à quel point ils en avaient besoin, mais ça ne me disait pas ce qu’en pensait Cupidon, lui.

– Oui, les gens ont besoin de se sentir aimés, comme tu l’as bien remarqué avec ton application de rencontres. Tes clients ne sont sans doute pas éloignés de mes électeurs, peut-être même que la majorité en fait partie. Ils veulent du changement, leur vie actuelle est une déception. Et s’il y a assez de personnes déçues, alors le changement devient possible. D’ailleurs, qu’est-ce que tu trouves « super » dans le succès de mon parti ?

Car oui, c’était bien beau d’affirmer des choses, mais parler pour rien, ça l’était beaucoup moins. Je ne doutais pas le prendre de court en lui demandant d’exprimer un avis, surtout s’il n’en avait absolument rien à fiche de ce qu’essayait de faire mon parti, mais si ses félicitations pouvaient tout aussi bien aller à mes ennemis, elles n’avaient aucune valeur. Nous ne pourrions pas espérer donner le moindre sens à ce rapprochement si nous ne partagions aucune idée commune.
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MessageSujet: Re: Garde alternée[Mars] Garde alternée[Mars] EmptyVen 23 Oct - 20:05

Je ne savais pas exactement ce qui m'avait le plus déplu de cette soirée. L'attitude de ma mère ne m'avait pas surpris. Vénus agissait toujours comme si le monde tournait autour d'elle. Les gens la laissaient généralement faire, par peur, paresse ou aveuglement. Je ne la confrontais plus par désir de conserver le peu de paix qu'il subsistait entre nous. Et parce que je ne savais plus me mettre en colère contre elle. Encore ce soir, j'avais évité de la vexer, ravalant des répliques et multipliant les gentillesses malgré l'angoisse qui m'empêchait de bien réfléchir. Je lui avais trouvé des excuses parce que c'était plus simple qu'être en colère. Forcer l'empathie me venait toujours facilement dès qu'elle m'ouvrait la porte.

Mars s'était montré désagréable, mais pas particulièrement agressif envers moi. Je l'avais suivi dans certaines blagues par souci qu'il ne devienne pas l'ennemi à table, mais il n'était certainement pas dupe. Mon malaise criant m'avait enlevé toute réelle crédibilité. J'aurais probablement dû refuser cette invitation dès que j'avais compris les plans de Vénus et la laisser annoncer toute seule la nouvelle à Mars, puis voir s'il souhaitait me connaître personnellement ou non. J'aurais dû être prudent, mais je m'étais précipité vers le danger. J'étais venu à ce souper en sachant que je me jetais dans le feu. Je ne pouvais pas m'étonner des brûlures.

Aller au bar avec Mars après tout ce cirque me stressait, mais je n'avais pas pu refuser l'invitation. Sans les humeurs de Vénus à devancer, je pourrais essayer de faire meilleure impression. L'absence de Matt Fowl ne promettait aussi que du positif. Il avait gardé tout au long du repas une attitude froide mais amusée plutôt déplacée qui ne me manquerait pas. Tout comme l'entièreté de sa personne. Le nouveau copain de ma mère – ils étaient ensemble depuis quelques années, mais ça me paraissait encore nouveau tellement leur union était invraisemblable – me mettait continuellement mal à l'aise, par ses répliques autant que par ses silences. Rien de ce que je disais ne semblait lui plaire et, pire, ma mère lui démontrait une confiance aveugle.

-Ouais notre appli est très populaire.

Avec tout le budget en pub et en collaborations avec d'autres compagnies, il fallait bien qu'on y gagne une certaine visibilité.

Mars souligna le besoin de gens de se sentir aimés et fit référence à mon appli. L'amour, c'était bien mignon, mais les gens utilisaient surtout les applis de rencontre pour baiser. Enfin, nous évitions d'en faire le thème de nos pubs.

Je ne croyais pas vraiment à son idéalisme sur les gens malheureux, mais c'était de belles paroles pour un dirigeant. La plupart des gens ne veulent pas de changement, à moins d'y être forcés. J'en étais un exemple vivant depuis la brèche. Je pouvais le cacher, mais pas m'aveugler. Je détestais Psyché, mais je ne savais pas me passer d'elle. Exactement comme beaucoup de mes clients mariés qui utilisaient l'appli pour oublier auprès d'une autre l'épouse de laquelle ils n'arrivaient pas à se séparer. C'était la même chose pour les autres aspects de leur mode de vie, de la carrière au cercle social. Se battre pour une amélioration garantie, c'était déjà difficile. Les gens étaient donc presque impossibles à faire bouger pour des changements incertains. Je ne pouvais pas répondre à Mars que je pensais les gens beaucoup plus mous que dans ses rêves pour l'avenir, pas si je voulais lui démontrer mon soutien.

Je ne pensais à rien de précis quand j'avais souligné avec enthousiasme le succès de son parti. C'était juste pour faire la conversation, mais j'avais visiblement soulevé son intérêt parce qu'il me parlait de ses espoirs pour le peuple de New York de manière inspirée, et qu'il s'attendait à ce que je développe en quoi je soutenais son parti. Quelques semaines plus tôt, j'aurais probablement eu plus de mal à trouver quoi répondre, mais je m'étais informé sur tout ce qui concernait Mars depuis que Vénus m'avait invité à ce souper où il serait présent. Je connaissais donc les valeurs et les projets de son parti, ainsi que ceux de ses adversaires.

-Depuis les catastrophes qui ont changé le monde, les gens ont besoin d'un nouvel espoir. Reconstruire a permis de retrouver un équilibre, mais ce n'est pas suffisant. Laufey a relevé la ville, mais sans vraiment lui redonner vie. Et les gouvernements des dernières années…

J'eus un petit sourire un peu moqueur.

-J'hésite entre dire qu'ils se sont couchés sur les bases bancales de la société d'avant ou qu'ils ont simplement vu petit. Donc oui, je trouve ton parti et son succès très intéressants. New York a besoin de changement, et si le changement est un retour à des valeurs essentielles qui ont été laissées de côté, ce sera encore plus naturel pour le peuple d'y adhérer.
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MessageSujet: Re: Garde alternée[Mars] Garde alternée[Mars] EmptyLun 1 Fév - 16:56


Cupidon ne réagit pas avec enthousiasme à mon discours électoral et, pour cette fois, sa neutralité n’est ni une bonne chose, ni une mauvaise chose. Il y a ce que l’on peut dire aux gens dont on connaît encore mal l’opinion, et ce que l’on pense vraiment, les discours acceptables, et les méthodes, souvent moins acceptables, qui les rendent réalistes. Je ne peux pas dire précisément ce qu’il pense à ce stade. Il ne me donne rien, et je suis encore trop vague. Après tout, tout le monde pourrait souhaiter aux gens de se sentir aimés, d’avoir une place, un but et un soutien de sa société. La véritable question réside dans le « comment l’appliquer concrètement ». J’ai un début de réponse très simple. Pour l’appliquer, il ne faut pas les laisser s’imaginer qu’ils savent ce qui est bon pour eux. D’une part, ce n’est pas vrai. D’autre part, c’est les laisser se faire manipuler par toutes les entreprises qui cherchent à leur vendre n’importe quoi, et je ne veux pas d’un troupeau individualiste tout en marchant dans le même sens, qui achète compulsivement pour essayer de justifier son existence. Je veux détruire ce vaste carnage civilisationnel, et j’ai des solutions, qui ne plairont pas à tout le monde, mais qui seront adaptées à ceux qui méritent de rester dans mon monde. Est-ce que je peux le dire à mon fils ? Non, pas pour le moment, en tout cas. Dans l’ensemble, la première étape est de faire approuver un programme. Ensuite, la logique de ce que sa réalisation implique s’imposera. Faire les choses dans le désordre n’amènerait qu’une résistance inutile de la part de trop de personnes.

La réponse de Cupidon ressemble à une sorte de récitation. Ce n’est pas encore son opinion propre. Il me montre simplement quelques connaissances de l’Histoire politique récente. Laufey, Hera, Caerwyn, … nous sommes nombreux à vouloir créer quelque chose de neuf sur la nouvelle ère qui semble s’ouvrir, avec un succès très relatif. Cupidon poursuit son analyse, qui n’est pas fausse, mais qui n’est encore une fois pas un avis. Il se pose en observateur, mon parti est « intéressant » à suivre, parce que le peuple pourrait potentiellement y adhérer mais rien de plus. Il n’est évidemment pas impossible qu’il n’ait pas la moindre idée réelle du monde dans lequel il voudrait vivre, c’est le cas de beaucoup de personnes. La plupart des gens sont des opportunistes qui guettent le camp le plus avantageux à soutenir, même s’ils le font souvent inconsciemment. J’appuie ma tête sur ma main d’un air pensif un court instant.

– Je crois, en effet, que notre collègue grecque n’était qu’une sorte de gestionnaire. – Je suis bien désolé pour Héra mais il faut dire ce qui est, sa volonté de ne surtout froisser personne et de permettre à tout le monde de vivre en paix n’était pas, à proprement parler, un projet, sauf si on parle de sa carrière. Il ne s’agissait que de reconstruire la société d’avant, de réaffirmer ses dérives. – Et pour Caerwyn, je ne sais pas trop…

Je me renverse dans ma chaise en croisant mes bras.

– Il a su se faire apprécier des gens et n’a pourtant pas l’intention de se représenter. J’ai beaucoup de mal à croire qu’il n’ait pas quelque chose derrière la tête et quelque chose qui ne sera probablement pas dans notre intérêt si on en croit sa discrétion sur ses intentions comme ses origines. Comme on dit, il est trop parfait.

Mes lèvres s’étirent légèrement. Malgré tous mes opposants actuels, je continue de considérer Caerwyn comme un problème plus sérieux. Je ne peux pas en parler ouvertement ici, mais de plus en plus d’éléments laissent à penser qu’il favoriserait les créatures magiques, cela dans un but encore incertain. Ce n’est peut-être pas une menace pour nous, mais sa volonté de se dissimuler même aux dieux laisse penser le contraire. Je veux bien le croire quand il affirme ne pas avoir accepté le pouvoir par ambition, et ça ne fait que le rendre plus suspect.
Mes coudes reviennent sur la table.

– Donc, si je comprends bien, tu apprécies de pouvoir observer la nouvelle page de l’Histoire moderne que je suis sur le point d’écrire. Savoir juger avec recul et neutralité n’est pas forcément un défaut, mais je dirais que c’est une sorte de qualité à laquelle je ne crois pas complètement. Je ne sais pas ce que sont des « valeurs essentielles » pour toi par exemple, beaucoup de gens pourraient approuver cette expression en y mettant des sens très variés. Tiens, quelles seraient tes valeurs essentielles ? Attention, je ne te demande pas d’estimer ce qui devrait l’être pour la plupart des gens, j’aimerais vraiment savoir ce que tu en penses toi.

Après une parenthèse plutôt sérieuse, je retrouve mon regard taquin, et je retrouve ma bière aussi. Je donne encore une chance à mon fils m’en dire un peu plus sur lui en le mettant dans une situation où il ne pourra plus parler de manière détournée et, même s’il parvient me donner les valeurs essentielles que je pourrais attendre, nous avancerons toujours. Plus il parlera, mieux je pourrai le forcer à se révéler, ou admettre qu’il n’y a réellement rien à en tirer.
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Garde alternée[Mars]

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