Les Dieux de New York
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Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ]

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Peach P. SambergPeach P. Samberg


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Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Vide
MessageSujet: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyLun 28 Jan - 14:48

La sonnerie interrompt mon monologue. Pourquoi n'habitons-nous pas une dimension où des domestiques s'occupent de répondre à la porte? Je me dirige vers celle-ci en soupirant, nouant la ceinture de mon peignoir de satin noir à fines broderies florales. Qui vient me déranger chez moi alors que j'étais occupée à me répéter à haute voix les défauts de mon mari pour ventiler après sa dernière trahison? J'avais accepté, en apparences, qu'il me rejette une fois de plus, mais je profitais de son absence pour me défouler. Il ne va pas remarquer quelques verres en moins, et la destruction, même à petite échelle, me soulage toujours. De toute manière, s'il fait un commentaire à ce sujet, je ferai l'innocente, comme toujours, et il me fixera avec un air désolé. Je ne me souviens pas de la dernière fois où il ne m'a pas regardée avec tristesse. Au moins, dernièrement, je me console en me disant que je le fais exprès.

Cupidon était parti prendre un repas avec sa mère, m'avait-il dit. Il n'y a rien de mal à ne pas m'inviter, évidemment. Vénus ne m'aime pas et il ne faut surtout pas déplaire à la grande déesse. Même alors que des siècles se sont écoulés depuis les actes qu'elle me reproche et que j'ai posé ceux-ci alors que je n'étais même pas adulte. Et même si elle a essayé de me tuer pour se venger. Je suis entièrement à blâmer et à punir éternellement dans cette situation, et il est hors de question que Cupidon envisage l'idée saugrenue de me défendre!

J'ai de nombreuses fois voulu m'excuser auprès de Vénus, mais elle n'a affiché que fermeture quand Cupidon a essayé de l'amener à me parler. J'ai fini par abandonner, sous les conseils de mon mari. Il a rebâti un semblant de relation avec elle ces dernières années, mais j'ai perdu l'envie de me faire apprécier de ma belle-mère, surtout après avoir découvert tout ce que son fils trafique dans mon dos. J'espère arriver à sauver ma relation avec mon mari sur le long terme, et forcer la réconciliation avec sa mère risque de mal se terminer et me nuire. C'est pourquoi j'ai joué l'innocente, ce soir, quand il m'a dit qu'il préférait aller seul chez sa mère.

Ce n'est pas la première fois que je ne suis pas Cupidon chez Vénus, mais le repas de ce soir revêt une signification spéciale et je ne supporte pas d'en avoir été écartée. Mon mari m'a confié sa nervosité au sujet de la présence de Mars. Cupidon a utilisé son pouvoir guerrier devant sa mère et voilà qu'elle l'invite en même temps que le dieu de la guerre pour une réunion chez elle. Il s'agit vraisemblablement d'une occasion de révéler ce que tout le monde sait déjà. J'ai ma place à cette table en tant qu'épouse du principal concerné, mais je suis traitée comme une étrangère. Et je ne peux rien y faire. D'ailleurs, Cupidon n'a pas tardé à m'ordonner d'oublier notre conversation, magie à l'appui.

Il m'arrive d'avoir du mal à faire le tri entre ce que je suis censée avoir retenu et ce que Cupidon m'a dit d'oublier, et je doute de ses propres facultés dans ce domaine. Au besoin, je joue la carte de la confusion, une tactique qui fonctionne toujours auprès de mon mari, et il me rappelle ce qui lui plaît que je sache. Son pouvoir n'est pas difficile à contourner. Suis-je la seule à en profiter aussi effrontément? Cupidon est imprudent et, s'il sous-estime d'autres gens comme il le fait avec moi, il risque de s'attirer les abus et le ridicule. Et il le mérite, mais là n'est pas la question. J'ai remarqué avec les années son don pour sortir blanc comme neige de tout problème et je ne m'inquiète pas vraiment pour lui, mais il excelle aussi pour en prendre plein la gueule avant de trouver des solutions. Et une partie de moi espère le voir souffrir. Un peu.

Je me redresse davantage en posant mes yeux sur Proserpine à qui je viens d'ouvrir la porte. La plupart des dieux romains sont mes ennemis, par soutien pour Vénus, par dédain pour mon ancienne condition de mortelle ou même parce que leur rejet de ce que je suis leur garantit en retour l'appui des autres divinités dans le cas où la situation entre la déesse de la beauté et moi se reproduisait à leur désavantage. Enfin, je n'ai pas fait de sondage, mais je m'explique leur comportement en toute méfiance après qu'aucun d'entre eux ne m'a offert d'aide quand je les priais. Proserpine est dans une catégorie à part, vivant à l'écart des autres dieux romains dans son propre royaume. Un royaume qui ne s'est pas écroulé avec les siècles, contrairement à l'Olympe. Cupidon m'a vite prévenue de limiter mes contacts avec elle: elle s'est abandonnée très jeune au dieu des Enfers et, depuis, elle est complètement folle. Il reste son ami en souvenir de leur amitié d'enfance. Il est très attaché à ce qu'ils ont eu.

-Cupidon n'est pas là… Oh, j'imagine qu'en fait, tu es là pour savoir comment le joindre puisqu'il doit avoir fermé son téléphone? Il est chez sa mère.

Je ravale que ce repas semble plus important que le monde extérieur et je réalise que je pourrais la laisser parler plutôt que devancer ses intentions.

-Je peux faire quelque chose pour t'aider?

La reine des Enfers est peut-être la distraction qu'il me faut.


Dernière édition par Peach P. Samberg le Lun 15 Mar - 19:25, édité 1 fois
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Milena P. NerethMilena P. Nereth


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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyDim 7 Avr - 16:16

Internet n'est pas mon domaine de chasse préféré. J'ai tendance à l'éviter mais, depuis que ce fléau existe, j'y retombe toujours dans mes périodes d'ennui, pour me retrouver au milieu de mortels qui, malgré une vie désespérément courte, s'ennuient autant que moi. Et, à chaque fois, je ne manque pas de m'emballer. Je me donne pour mission de sortir ces pauvres petits êtres de leur misérable quotidien avant d'achever leurs souffrances, car je ne vois pas très bien à quoi ce genre d'existence peut bien mener. Vous me direz, la plupart des existences mènent simplement à la mort. Mais certains parcours sont plus fascinants à suivre que d'autres. Chez les humains, comme chez les dieux d'ailleurs, il existe deux types d'individus : ceux qui trouvent chaque jour une nouvelle invention pour vous étonner, même quand cela consiste à enchaîner les problèmes, et ceux qui restent dans la routine, dans le rien absolu. Ils s'en plaignent mais ne font rien pour avancer. C'est une chose qui m'a toujours laissée dans une profonde interrogation. Se lamenter au sujet de quelque chose qui ne vous convient pas devrait, en toute logique, être un premier pas vers la recherche des solutions. Tout le monde l'apprend en cours de mathématiques de nos jours. Une fois le problème identifié, nous pouvons commencer à le résoudre. Je le répète inlassablement à mes patients. Or, les nombreuses âmes errantes d'Internet parviennent à l'exploit mental surprenant de nommer un problème tout en le niant. Il s'agit, à mon sens, de l'un de plus grand mystère de ce monde moderne. Ma pierre angulaire même, dirais-je ! Car même quand vous avez objectivement un avenir meilleur à leur offrir, quand vous leur tendez la main pour mettre fin à toutes leurs lamentations, ils préfèrent rentrer dans leur coquille et retourner à ce rien, dont ils recommenceront à se plaindre.

En général, j'aimais dire que j'avais du temps à perdre, même pour les causes perdues. Néanmoins, quand le temps que j'avais consacré à une personne s'avérait réellement infructueux, je n'envisageais plus exactement les choses de la même manière. Et si j'en croyais mes chances de « conclure » avec Greg, j'avais donné inutilement de ma patience et fausse compréhension sociale pendant trois mois. Trois mois à l'écouter geindre, à le sentir proche de céder, à me dire chaque jour « cette fois, je vais le ferrer » pour devoir reporter au suivant. J'avais fini par lui accorder une importance anormale, par perdre toutes mes certitudes et même avoir l'impression qu'il menait le jeu à ma place tant ses réactions étaient à côté de tout de ce que je pouvais anticiper. Je crains qu'elles dépendaient de sautes d'humeurs sur lesquelles je ne pouvais pas avoir le moindre contrôle. Ses petits problèmes du moment étaient plus importants que l'attention qu'une femme aussi superbe que moi lui accordait, ce qui était gravement insultant. C'était à croire qu'il ne se rendait pas compte de l'exception que j'étais dans sa vie terne. Même une fille passable l'aurait trouvé trop plat pour s'intéresser à lui. Alors qu'est-ce que ce stupide mortel pouvait trouver à me reprocher ? Je continuais à capturer des âmes, je pouvais avoir une dizaine d'hommes prêts à se sacrifier pour moi par semaine, la résistance de ce minable me tourmentait énormément. Elle était là, comme une erreur dans le système, comme une cicatrice cuisante sur mon beau visage, invisible aux autres, mais dégradante à mes propres yeux. Peu m'importait d'être vénéré par 99,9 % d'insectes si 0,01 % d'entre eux me méprisaient alors que je leur avais naïvement accordé ma gentillesse, ma bienveillance, mon énergie. Leur rébellion n'avait aucune raison d'exister. Elle était une anomalie à corriger, ou à effacer. Je m'étais montrée un peu plus agressive avec Greg en perdant patience. Je lui avais posé un ultimatum, en lui faisant croire que je savais très bien où il habitait et n'hésiterais pas à le rencontrer par mes propres moyens. J'étais obligée de feindre la passion amoureuse pour ce minable, quelle humiliation. Très honnêtement, à ce moment de la relation, je n'étais plus très certaine de parvenir encore à le séduire. Je voulais le contourner et sans doute me venger. Quand j'avais constaté qu'il m'avait bloquée, il devint assez clair dans ma tête que cet être devait finir carbonisé, un peu comme mon téléphone qui n'avait pas survécu à ma mauvaise humeur.

Je pouvais retourner aux Enfers pour localiser Greg avec l'aide des parques mais je préférais éviter ce voyage. Pluton risquait de me voir et de me faire sentir d'autant plus ridicule. Il n'aurait pas manqué de me faire observer que je perdais mon temps, ou de me souligner que je manquais franchement de jugement pour m'être acharnée sur ce triste personnage. Il ne comprenait pas tout à fait ma passion pour les humains, qui ne serait d'ailleurs pas si forte s'il avait autre chose à me proposer que rester déprimer aux Enfers. J'essayais de ne pas m'attarder sur les soucis que j'avais avec mon mari. Je gardais un grand sourire dès qu'il en était question. Mais la fin de l'empire romain l'avait laissé profondément déprimé. C'était la raison pour laquelle je préférais souvent fuir l'ambiance morose – même pour le royaume des morts ! – qu'il diffusait autour de lui. Alors j'avais pensé à Cupidon. C'était sur l'un de ses sites que j'avais rencontré le fameux Greg. Il avait très certainement la possibilité de me donner son adresse. Une fois calmée, je m'étais donc habillée comme si j'allais me présenter à un rendez-vous romantique, car je comptais bien me rendre sur le champ chez mon « prétendant ». Je n'allais pas jouer des prédatrices. Je préférai miser sur une robe fleurie blanche et rose avec un collier d'argent. J'avais mis un bandeau dans mes cheveux que je laissais lâches et ondulés. Je devais avoir l'air à la fois innocente et sophistiqué, l'air d'une gentille demoiselle qu'il était cruel d'avoir laissée tomber. Après avoir trouvé avec joie des boucles d'oreille en argent qui allaient avec mon collier et qui avaient la forme de petites fraises dans ma boîte à bijoux, je m'imaginais avec plaisir comment j'allais le laisser se débattre dans des explications embarrassées sans queue ni tête avant de le faire souffrir jusqu'à ce qu'il m'implore. Je ne savais pas encore si je le tuerais sur le coup ou si je lui mènerais la vie dure pour une plus longue durée. S'il n'aimait pas la manière douce, tant pis, je renonçais à la subtilité. On se fait très bien obéir par la peur et la menace.

Avec un téléphone détruit, il ne m'était plus possible de contacter Cupidon. Sans trop hésiter, j'avais décidé de venir directement chez lui. Demander de l'aide m'ennuyait un peu, mais je ne voyais pas d'inconvénient à lui rendre service en retour s'il me le demandait. Alors, je pouvais bien faire une exception. Mais, malheureusement, Cupidon était indisponible. Psyché m'ouvrit pour m'apprendre qu'il était chez Vénus. Pour cette fois, je me gardais une critique, même mental. A chacun ses combats inutiles, disons.

– Mon téléphone a fondu, je n'en savais rien, dis-je simplement.

Tant pis, au fond, je pouvais attendre. Greg n'allait pas disparaître. Je pouvais me venger un autre jour. Mais aurais-je la même colère pour agir ? Je risquais de changer d'avis, de l'estimer inutile et de passer à autre chose. Je regrettais souvent ma capacité à prendre du recul dès qu'un événement passait la nuit de sommeil. Souvent, les actes étaient une question de bon timing. On regrettait de ne pas avoir agi ensuite mais une fois le moment passé, il n'était plus possible de revenir en arrière, même pour une vengeance. En tout cas, c'était ce que me disait mon cerveau sans vouloir en démordre. Donc, quand elle se montra prête à m'aider, mon regard un peu dépité s'illumina à nouveau. Et pourquoi pas, après tout ? Cupidon ou une autre, peu m'importait, je voulais juste une adresse et elle avait peut être les compétences pour me la fournir. Je m'étais préparée à avoir quelques questions gênantes de la part de Cupidon. Alors, même si je n'étais pas familière du caractère de Psyché, je pouvais bien aussi affronter ce moment avec elle.

– C'est possible… J'ai besoin de l'adresse d'un de vos clients. Pourras-tu me la fournir. J'ai peut-être mis en danger le secret de notre existence...

J'avais préparé à la hâte un mensonge pour obtenir ce que je voulais plus facilement, et l'air gêné qui allait avec. Je me fichais d'avoir l'air maladroite, surtout devant Cupidon. Au contraire, il serait ravi de pouvoir m'aider en constatant que je n'étais pas aussi parfaite que je le « prétendais ». Pour Psyché, je n'en savais trop rien. Je tentais. Ce serait dans tous les cas toujours plus efficace et moins humiliant que dire que j'avais besoin de l'adresse d'un type qui m'avait bloqué et que j'envisageais de torturer pour calmer ma frustration personnelle.


Dernière édition par Milena P. Nereth le Mar 3 Sep - 4:45, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyMar 28 Mai - 17:21

Plus que de la vie de Cupidon, c'est des autres dieux que je ne supporte pas d'être écartée. Je sens depuis toujours leur snobisme. Les dieux romains font semblant de prendre ma déification par Jupiter au sérieux, mais ils restent à distance et passent presque toujours par mon mari s'ils doivent me contacter. En des siècles parmi eux, je ne me suis fait aucun ami, que ce soit en essayant gentiment de socialiser ou en confrontant ceux qui affichaient plus directement leur mépris. Je suis encore considérée comme une enfant. Même Cupidon, qui m'a de nombreuses fois assommée de longues explications sur les défauts de tous les autres dieux, passait du temps en la compagnie de ses semblables pendant que je devais attendre son retour. Fréquenter les humains m'était interdit. Je n'ai pas reçu d'avertissement officiel, mais mon mari m'a vite fait comprendre que mon immortalité, et même ma survie, dépendaient de mon intégration à la communauté divine. Maintenant que tous les dieux sont forcés de vivre parmi les humains, je ne risque plus rien.

La plupart des dieux grecs m'ignorent avec la même application que mes semblables, par transfert de haine pour leur propre Psyché ou parce qu'eux aussi dédaignent mes origines mortelles. Les divinités des autres mythologies me traitent un peu mieux. Vivre avec les créatures et les humains plutôt que sur l'Olympe me permet aussi des relations moins stressantes. Les mortels ici ne savent habituellement pas qui je suis. Je pars de zéro, ce qui est beaucoup plus élevé qu'avec les dieux.

Je n'ai tout de même pas beaucoup d'amis proches. Il n'y a qu'avec Thot que je me retrouve régulièrement seul à seule. Son détachement et sa vision du monde hors normes me permettent une liberté que je n'ai pas trouvée en compagnie d'autres personnes. Je vois mes autres amis lors de soirées ou dans des lieux publics. Je suis plus à l'aise en petit groupe; il y a toujours quelqu'un pour combler les trous dans les conversations ou pour changer un sujet gênant avant que l'ambiance se gâche. Je préfère ne pas avoir la responsabilité de divertir une autre personne toute seule et de forcer la complicité. Je ne sais jamais si j'en dis trop ou pas assez et, même si je choisis les informations que je révèle, je crains toujours le commentaire qui sera mal interprété. Ces dernières années, j'ai gagné davantage d'expérience en socialisation qu'auprès des dieux romains en plusieurs siècles.

L'ampleur de ma nouvelle liberté me distrait des humeurs de Cupidon. J'ai accepté beaucoup de ses crises au nom de notre mariage et - j'ai commencé dernièrement à le réaliser - par manque d'options. Mon mari m'a recueillie à l'adolescence. Abandonnée par ma famille, sans amis et n'ayant jamais eu d'amant, j'avais profité de son intérêt pour moi pour m'assurer ce que je croyais être un avenir doré. Notre union m'a permis d'obtenir le statut de déesse, mais je n'ai jamais eu les mêmes droits que les autres divinités, ni les mêmes possibilités. New York me sert de tremplin pour explorer la vie en dehors de mon mari et je touche enfin l'autonomie qu'on m'a refusée toute ma vie. Je multiplie donc les projets, les sorties et les rencontres. Je vogue à toute allure d'une obsession à une autre parce que les ralentissements me terrifient: je ne veux pas revenir à l'inertie de ma vie à l'Olympe.

Découvrir que Cupidon me manipule magiquement m'a secouée. Je me suis habituée à vivre notre relation lentement, et je me donne du temps pour trouver comment gérer la situation. Mais la brûlure ne guérit pas. Quand que je sais que mon mari se sert de son pouvoir, quand qu'il me traite de haut et même quand j'échoue à refouler mes pensées à ce sujet, je coule dans la rage et les questionnements. Moins je le vois, mieux je me sens… Et pourtant, dès que j'en ai l'occasion, je lui laisse des chances de me prouver que notre relation peut évoluer positivement. Chaque fois, comme ce soir, il me déçoit et je me laisse submerger par la colère une fois libérée de sa présence.

La visite inattendue de Proserpine, même si elle ne m'est pas destinée, se présente comme une occasion de détourner mon esprit de la plus récente insulte de Cupidon.

-Oh, dommage pour ton téléphone. J'ai tendance à casser les miens aussi, dis-je avec un rire que je veux léger.

Je reste silencieuse quelques secondes après la révélation de Proserpine et je lui fais signe d'entrer. Qu'a-t-elle pu faire de si grave? Beaucoup de mortels connaissent notre existence et certains nous menacent, mais ils ne disposent pas de moyens de convaincre la population. Enfin, sauf ce regroupement de pirates informatiques éliminé par le gouvernement Wilde. Je suis au courant de cette affaire de la même manière que je sais que Héra n'a pas couché avec le soi-disant frère de son mari: les gens ne savent pas bien garder les secrets.

-Tu veux quelque chose à boire?

Je laisse Proserpine au salon, devant mon ordinateur, que j'ai déposé sur la table basse et ouvert. Je profite de son lent démarrage pour aller chercher à boire. De toute manière, je ne suis pas vraiment pressée d'aider les dieux à se sentir plus en sécurité. À la cuisine, je remarque des morceaux de vitre au sol et me souviens que j'étais en train de casser des verres à l'arrivée de mon invitée. Je n'ai pas le temps de les jeter, tant pis. Je reviens au salon, m'installe dans le sofa face à Proserpine avec mon ordinateur. J'entre le mot de passe et je lance le programme de l'agence.

-Ça va lui prendre un moment. Qu'est-ce qui s'est passé?
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Milena P. NerethMilena P. Nereth


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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyMar 3 Sep - 5:48

Elle profite de mes problèmes de téléphone pour instaurer un début de complicité entre nous. Il n'y a jamais de mal à admettre ses faiblesses, à se montrer maladroit, les gens aiment se savoir en position de supériorité. Ils vous font croire que ce n'est rien en prétendant qu'ils ne valent pas mieux que vous, en riant, mais il n'en est rien. En réalité, ils sont soulagés de vous trouver ridicule, de penser qu'ils pourront avoir l'ascendant et le contrôle sur vous. Je sais comment les choses fonctionnent, j'ai passé des millénaires à l'étudier, à l'appliquer, souvent dans l'espoir d'être détrompée. Mais, je vais vous dire un secret. Depuis la nuit des temps, depuis que la pensée structurée existe, rien n'a changée. Comme n'importe quelle science ancienne, elle s'est figée. Je souris donc à Psyché d'un air vaguement embarrassé. J'ignore si elle sera prête à m'aider. Elle n'est pas une déesse officielle après tout, elle n'aura peut-être pas la même sensibilité aux arguments que j'avais prévu de présenter à Cupidon. Je n'avais pas de problème à paraître un peu idiote face à lui. Mais parviendrais-je à mes fins avec elle ? Je connaissais Psyché de ce qu'on avait pu m'en dire. De ce que Cupidon avait pu m'en dire. Il y avait trop longtemps que je m'étais détournée des affaires de la plupart des dieux romains et que je n'avais pas une foi immense dans les avis de Christian Reaver. Son épouse était donc une donnée quasi inconnue, qui laissait s'ouvrir une importante marge d'erreur. Il serait stupide d'envenimer la situation, de risquer ma réputation divine pour une petite affaire que seule moi connaissait actuellement. Comme elle me proposa quelque chose à boire en me laissant rentrer, je songeai que ça ne pouvait pas faire de mal à mes réflexions confuses du moment.

– Volontiers, tout ce que tu voudras tant que c'est alcoolisé.

Psyché me propose de m'installer dans son salon. Elle me prouve sa bonne volonté en allumant son ordinateur avant d'aller me servir à boire. Le lancement du processeur est étonnement long. Je les aurais pensé mieux équipés que cela, mais je me garde la réflexion à son retour. Ce n'est pas le moment d'avoir l'air désagréable. Il n'y a rien de pire qu'un invité qui se permet de tout critiquer à peine les deux pieds passés dans l'entrée. Je remercie mon hôte pour le verre avec un sourire que je sais figé, mais qui, sans calcul, convient très bien à l'expression naturelle de la gêne entre deux inconnues qui ne s'attendaient pas à devoir passer un moment plutôt intime ensemble. Et, vient la question épineuse, tandis que la maudite machine peine à se lancer et à offrir une coupure nette à la discussion. Je réfléchis rapidement à la meilleure manière de présenter les choses. Puisque je sais peu de choses la concernant, je ne lui présenterais certainement pas une situation qui pourrait faire peser tous les torts sur moi. Je passe une main dans mes cheveux, lève les yeux au ciel, soupire avec une pointe d'agacement avant de prendre une gorgée de ma boisson.

– Il se passe que nous aurions sans doutes quelques points à revoir aux Enfers, notamment pour ce qui est des intrusions non-annoncée dans la vie privée. J'ai laissé un passage vers les limbes dans mon appartement afin qu'il soit possible de me trouver en cas d'urgence. Et… Disons qu'un humain qui me voyait à la caméra a vu surgir quelque chose qui ne devrait pas être permis de voir et qui l'a sans doute très perturbé. Je ne pense pas qu'un enregistrement existe, mais il serait plus prudent de le vérifier. Je n'ai pas eu le temps d'obtenir son adresse, et je ne veux pas de problèmes, ni vous en causer. Je promets de tout régler rapidement.

Je me mordille légèrement l'intérieur de la lèvre inférieure en tournant mon verre dans mes mains nerveusement. Le jeu d'acteur n'a jamais été mon fort, mais je sais utiliser les situations à mon avantage en adaptant mon discours. Je ressens de la colère, de la frustration, de la crainte, de l'embarras. Tout est authentique, à part les explications. C'est donc réel. Et je serais à l'aise avec n'importe quelle explication qui sera en accord avec ce qui anime mon corps. J'espère que Psyché saisira l'urgence du problème et ne cherchera pas à travailler la question plus loin. Elle doit bien savoir, comme moi, que les dieux ne sont pas d'une grande tolérance, et qu'un incident qui a pu arriver par leur site les rendrait tout autant coupable que moi à leurs yeux, notamment parce que la faute serait trop belle pour tous les autres rivaux de notre panthéon.
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Peach P. SambergPeach P. Samberg


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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyMar 1 Oct - 18:47

Mon existence en tant que déesse est un affront au statut de divinité. J'aurais pu le comprendre sans qu'on me le rappelle constamment par des petites piques, des attaques directes et le rejet. Il est quand même ironique qu'après avoir insulté Vénus en lui volant ses fidèles en étant mortelle, j'aie intégré le panthéon romain et récolté mes propres fidèles. Je n'avais pas eu beaucoup d'efforts à faire: ma réputation de naïve, jolie et pure jeune fille m'attirait la sympathie des humains. Je m'en sers encore aujourd'hui sous mon identité de Peach Reaver. Je laisse les gens croire que mon mari gère l'entreprise plus sévèrement que moi et que je ne veux que le bien de tous. Cupidon ne me pose pas vraiment de limites: il est trop occupé à voleter d'un employé à un autre pour quêter de l'attention pour remarquer mes stratégies. J'ai essayé d'aborder le sujet quelques fois avec lui, mais il se ferme toujours quand je veux m'exprimer sur un sujet qui ne le met pas en valeur.

Je conclus souvent des contrats en faisant croire à nos nouveaux associés que j'ai fait de gros efforts pour leur obtenir des avantages et que j'aurais voulu faire plus. Ils sont mignons: ils me croient! Comme si j'en avais quelque chose à faire des gains d'inconnus. C'est fou ce qu'un beau sourire et une robe pastel peuvent avoir comme effet sur les hommes. Avec les femmes, j'essaie d'imposer une sorte de complicité, mais je me perds plus facilement dans ce qui est attendu de moi. En moyenne, je me rattrape avec humour ou en feignant la naïveté. Plus que l'argent, c'est la suite de réussites de mon entreprise qui me motive. Après des siècles à m'ennuyer parmi les dieux et au-dessus de fidèles niais, je profite de ma liberté et des portes que je peux ouvrir.

Cupidon m'a tout dit sur Proserpine. Enfin… il m'en a parlé tellement souvent que j'espère qu'il n'a rien oublié. Son intérêt à peine caché pour elle n'a jamais arrêté de me blesser, et je ne sais toujours pas s'il l'a fait exprès toutes les fois où il a souligné nos différences ou s'il est juste subjugué par elle. Il la décrit comme insondable et bizarre, mais son affection pour elle ne meurt pas avec les siècles. Contrairement à celle qu'il a eue pour moi.

J'ai menti à propos de la durée de mise en marche du programme de l'agence parce que je veux laisser à Proserpine le temps de m'expliquer la situation. Elle est venue pour une solution et je n'ai pas envie de la lui offrir gratuitement. Vu la soi-disant urgence de la situation, elle risque de partir avec l'information sans me donner de détails.

-Oh, oui, c'est très gênant, dis-je en soupirant.

Est-il possible de faire tenir un royaume aussi imposant aux Enfers en manquant à ce point de vision? Un seul humain qui vu un truc surnaturel n'a rien de menaçant. Et même si un enregistrement existe, avec toutes les possibilités technologiques modernes, il est possible de créer des vidéos avec des effets spéciaux impressionnants. Les humains fabriquaient des images et des vidéos sur la magie avant l'arrivée des dieux, ils ne vont pas arrêter maintenant, et ça n'inquiète et n'intéresse qu'une poignée de gens. Ce n'est pas un vrai danger.

Je prends les informations de l'humain et les entre dans l'ordinateur pour accéder à son dossier en gardant une expression neutre.

Proserpine me ment probablement. Et j'ai envie de découvrir ce qu'elle me cache. Son explication fait du sens à première vue, mais manque de cohérence quand on se penche sur son statut de déesse infernale. Elle devrait avoir le recul nécessaire pour juger cette situation insignifiante. D'un autre côté, beaucoup de divinités manquent cruellement de discernement dès qu'ils rencontrent une difficulté imprévue. Si Proserpine est seulement à moitié aussi folle que Cupidon me l'a décrite, cette situation peut la faire paniquer. Elle craint peut-être aussi d'être mal vue par les autres dieux en ayant commis une erreur.

-J'ai envoyé les informations sur mon téléphone. Comme l'erreur provient de mon entreprise, c'est aussi ma responsabilité.

Si Proserpine s'en fait réellement au sujet de son erreur, elle appréciera un peu de soutien et un partage des responsabilités. Je n'ai rien à perdre à l'aider, de toute manière. Ma réputation est déjà au plus bas parmi les dieux, et prendre le blâme pour une erreur de ce genre ne ferait que contribuer à mon image de belle écervelée.

-Finis ton verre, je vais m'habiller, dis-je avec un sourire gentil.

Je ferme l'ordinateur et je la laisse pour aller m'habiller. J'enfile rapidement un t-shirt moulant bleu à rayures horizontales ton sur ton et une jupe midi noire avec un petit corsage à la taille.

-J'ai appelé un taxi en m'habillant.
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Milena P. NerethMilena P. Nereth


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Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Vide
MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyLun 14 Oct - 17:46

Psyché ne semble pas exactement décidée à me donner l'information que je lui réclame. Si elle commence tout d'abord par lancer une recherche sur son ordinateur, elle déclare avoir tout mis sur son téléphone car l'affaire relève aussi de sa responsabilité. Que s'imagine donc cette petite idiote ? Je suis trop consternée pour avoir autre chose qu'un regard neutre, mais une forte contrariété s'élève en moi. Lui aurais-je bien malencontreusement donné l'impression qu'elle pouvait se donner de l'importance en se mêlant de mon histoire ? L'idée de me savoir à sa merci la faisait-elle jubiler intérieurement ? C'était ennuyeux. Mais elle s'ennuyait certainement et, mon malheur semblait une occasion pour elle de faire un tour en ville. Une autre possibilité était qu'elle refusait de me voir partir si vite avant de me faire entrer. Si elle manquait d'animation sociale pour sa soirée, je représentais une distraction désespérée. Dans tous les cas, il allait être compliquée de la faire renoncer à son projet. J'essayai quand même un timide :

– Tu sais, nous n'aurons pas besoin d'être deux, ce sera rapide et peu intéressant…

Mais elle rabattit l'écran de son ordinateur et disparut dans sa chambre pour s'apprêter. J'étais mal. J'avalai mon verre d'un coup et m'en servis un deuxième. Sans m'aider à réfléchir, l'alcool allait certainement m'aider à considérer la situation avec moins de gravité et, donc, d'improviser plus naturellement. Après tout, je ne pouvais pas revenir sur ce qui avait été dit. Je ne pouvais pas non plus l'arrêter en lui avouant la vérité, ce serait tomber plus en avant dans le ridicule que j'avais tout fait pour éviter. Une chose était certaine dans mon esprit : elle ne saurait rien de mes véritables motivations. Le reste suivrait. Le reste suivait toujours quand j'étais résolue à dissimuler quelque chose qui risquait de nuire à mon image.
Quand je la vis aussi bien habillée que moi, un sourire s'étala sur mes lèvres. Oui, elle voulait s'amuser ou elle ne voulait pas dénoter avec ma tenue.

– Je crains que ton client ait quelques difficultés à croire à une visite procédurière… Tu bois avec moi ?

Je me lève en emportant la bouteille et en la lui tendant. J'ignore les opinions et les limites morales de Psyché. Dois-je l'avertir que l'humain chez lequel nous nous rendons risque de ne pas survivre à la rencontre ? Je n'ose encore rien dire. Tant que je le tue, ça me va. Elle pourrait avoir des objections et chercher à m'en dissuader. Mais, si elle ne s'y attend pas, elle n'aura pas le temps de m'empêcher d'agir et de le carboniser sur place, surtout si l'alcool diminue sa réactivité.

*

Pendant le trajet, je lui parle sur un ton léger de l'humain chez lequel nous allons, en me moquant allègrement de lui, de sa personnalité vide, de sa petite vie minable, en lui faisant part cependant de mon incompréhension à l'égard de ces humains qui gâchent leur courte existence en se rêvant quelqu'un d'autre derrière un ordinateur. Je dis ce qui me passe par la tête. J'occupe l'espace. Le taxi-man essaye de s'impliquer dans la discussion de deux jeunes femmes un peu délurées. Je lui laisse la possibilité de participer parfois, pour nous dire combien il trouve aussi tous ces hommes décevants et nous faire certainement comprendre qu'il vaut mieux. Je donne l'impression d'être tout à fait insouciante et à l'aise et, je le suis, en partie. J'ai déjà réfléchi à ce que j'allais faire sur place.

*

Je laisse mon numéro à notre conducteur (une âme volontaire est toujours bienvenue) et je jette la bouteille vide dans la première poubelle qui passe. Nous montons jusqu'à l'appartement de Greg. Je demande à Psyché de me laisser parler d'abord, puisqu'il me connaît en l'avertissant que nous serons sans doute rapidement fixées à sa réaction. « S'il est terrifié, il se trahira de lui-même. »
Il ouvre et, effectivement, le malaise passe sur son visage. Il a même un mouvement de recul. J'y étais préparée, mais ça reste vexant. Je lui fait pourtant un grand sourire.

– Bonsoir, Greg, tu me reconnais ?
– Qu'est-ce que tu fais là ? Comment tu…
– J'ai perdu contact avec toi après… Un très regrettable incident… Tu m'as eu l'air comme apeuré…
– Non je… Je ne vois pas de quoi tu veux parler… Il n'y a aucun problème… Vraiment.

Même si sa réaction lâche de déni m'arrangeait bien et était prévisible, elle m'agace profondément. Est-il possible d'être aussi misérable ? Je ne cesserais de me le demander à chaque individu dans son genre que je rencontre, et pourtant, cette engeance est très représentée dans l'espèce humaine. Un peu trop même. Je feins d'ignorer son malaise. Puisqu'il nie, prenons le au mot ! Laissons le s'enfoncer dans ses mensonges. Je reprends mon air le plus jovial pour m'exclamer :

– Oh, donc tu es content de me voir ? – J'avance chez lui en le forçant à s'écarter. – Je voulais justement te présenter à une amie à moi, elle s'appelle Peach, c'est la directrice du site sur lequel nous nous sommes rencontrés. Incroyable n'est-ce pas ? Elle connaît tous tes petits secrets. – Là, mon regard devient plus sournois. – Que pourrais-tu nous apprendre sur Greg, Peach ? Je crois qu'il ne nous croit pas…

Après tout, la présence de Peach peut me permettre de me lancer dans une torture un peu plus élaborée que celle prévue. Il serait dommage de s'en priver. Si elle veut participer, j'ai un rôle pour elle. Je suis sûre qu'un individu si piteux que Greg doit avoir de sacrées casseroles derrière lui, des choses qu'il n'aimerait pas savoir exposées, surtout par deux femmes, dont une qui l'a séduit et devant laquelle il a fui. Je fais le tour de son petit appartement. Ce n'est pas le grand luxe, c'est assez impersonnel, aussi triste que l'individu qui l'habite. Sans me gêner, je commence à ouvrir le frigo, je trouve des bières et en prends trois.

– Tu nous offriras bien à boire j'espère ? – Je donne une bouteille à Psyché et une autre à Greg. – Tiens, je pense que tu en auras besoin.

Je m'installe jambe croisée sur le canapé, et attend que Psyché nous fasse un récapitulatif de ses recherches. Et si elle me demande pourquoi cette réaction, je dirais que rien ne m'agace plus qu'un humain qui pense s'en tirer par un mensonge évident.


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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyJeu 14 Nov - 20:20

Ma garde-robe est variée, mais je n'ai aucune pièce de Venus Industries. Cupidon m'a offert quelques morceaux. Ceux que je n'ai pas jetés sans les porter, je les ai "accidentellement" brisés sous ses yeux, chaque fois avant même de sortir de notre appartement. Qu'il me laisse en dehors de ses tentatives de charmer Vénus. Elle me hait, je ne l'aime pas… Une robe griffée ne changera pas notre relation, ou plutôt, ne la changera pas à mon avantage. Elle peut bien booster son ego sans ma participation. Elle s'en est toujours si bien sortie dans ce domaine! Je n'ai rien contre Vulcain en particulier, donc ça ne me gêne pas de porter ses bijoux. Je n'aime pas les autres dieux de ma mythologie, mais si je m'empêchais de vivre pour chaque dinivité qui m'est insupportable… Vénus est un cas spécial. Vulcain aussi, mais à l'inverse. Cupidon n'a pas une belle relation avec lui, Vénus non plus… Chaque fois que je me pavane publiquement avec une création Volcano Designs, je leur fais à tous les deux un petit affront. Cupidon n'a pas osé m'en faire la remarque directement et j'ai fait semblant de ne pas capter ses sous-entendus. Il ne fera rien de plus; il passerait pour malintentionné. Ce serait dommage pour son image de soi.

L'état de ma relation avec mon mari me désole. J'ose croire que la passion reviendra entre nous une fois que Cupidon aura exploré ce qu'il a besoin de vivre ici. Son désintéressement me rend triste, mais c'est plutôt l'amour que l'amoureux qui me manque. J'ai mis du temps à le réaliser. J'ai d'abord pensé que la nouveauté et la liberté me grisaient et faisaient paraître le temps exclusivement auprès de mon mari plus terne. Mais quand je repense à ma vie d'avant, rien ne me rend nostalgique sinon les quelques temps de passion que nous avons connus. Notre relation a tourné autour de l'amour, de l'amour seulement, et non de projets ou d'aventures ou même de discussions stimulantes. Il suffit que l'amour revienne, non? Je comprends Cupidon d'être perdu dans ce monde à la magie différente, comme je l'ai longtemps été en rejoignant l'Olympe. Il m'a souvent rappelé qu'il m'avait permis de m'intégrer à un monde qui n'était pas le mien; je dois lui laisser le temps de faire de même aujourd'hui. Je me le répète quand j'ai du mal à supporter son comportement.

J'ai choisi un ensemble assez chic pour rejoindre le niveau de Proserpine. Elle est magnifique dans sa robe fleurie. J'aime l'ironie de son look innocent pour une déesse infernale. Elle m'invite à boire avec elle. Je souris. Son attitude prouve que le problème d'enregistrement vidéo ne l'inquiète pas vraiment. Je prends la bouteille.

-Il croira bien ce qu'il veut. On entrera chez lui quand même.

*

Le trajet en taxi me permet de découvrir une cruauté délicieuse chez Proserpine. Bon, la cruauté n'est pas rare chez les divinités maléfiques, je sais. Mais il y a une différence entre apprécier un meurtre sanglant classique et lapider toute l'existence d'une personne esseulée. C'est ce que nos clients sont pour la plupart: des désespérés dont personne ne veut. Le chauffeur de taxi est amusant à nous draguer maladroitement. Je l'encourage en laissant ma main traîner sur le dossier de son siège, effleurant de temps en temps son épaule en riant. Proserpine lui laisse son numéro. Je lui fais un signe de cœur avec mes mains quand il s'éloigne avec son taxi.

Greg est terrorisé par Proserpine. Depuis que je suis une déesse de l'âââââme, personne ne me craint plus jamais. On m'admire, c'est déjà ça. Je suis Proserpine dans l'appartement en gardant l'œil ouvert pour des pièges. S'il a vraiment vu un indice de magie, il s'est peut-être préparé à des représailles d'êtres magiques. Je verrouille la porte derrière moi.

Je prends la bière qu'apporte Proserpine. Je marche lentement dans le salon.

-Merci pour la bière, Greg.

Je fais tomber une grande lampe antique par exprès.

-Zut, je suis si maladroite… Tu peux comprendre ça, Greg. Ce doit être par maladresse que tu arrives si souvent sur des sites pornographiques de dessins de Disney!

En minuscules caractères dans le contrat d'utilisation que personne ne lit, il est écrit de manière détournée et confuse que l'agence a accès à tout ce que vous faites dans l'appli… et à tout votre téléphone quand l'appli est ouverte. Nos bases de données enregistrent les recherches, les messages, les photos (mêmes celles effacées), le temps d'utilisation des applis, la localisation, etc. Plusieurs algoritmes trient et réunissent les informations par listes. Plus que nos annonceurs et nos clients, ce sont les compagnies qui veulent ces informations qui nous enrichissent. Cupidon n'y porte pas beaucoup attention parce que ça l'ennuie, ce qui me laisse le plein contrôle de cette partie de l'entreprise.

Avant de partir, j'ai envoyé dans mon téléphone en même temps que l'adresse la liste "Sexe lol" de Greg ainsi que quelques autres. C'est la première que j'ai consultée, parce qu'elle ne sert pas à vendre, mais bien à me moquer des clients. Il faut bien se divertir! Elle répertorie les sites bizarres, les pratiques ridicules, etc.

Greg est livide. Je continue à parler en avançant vers sa chambre. Je m'arrête avant d'y entrer.

-Enfin, on est entre amis ici. On peut tout se dire, n'est-ce pas? Ça ne me gêne pas de me vêtir en Cendrillon pour te faire plaisir, dis-je sur un ton trop volontairement séducteur pour que ça semble naturel. Milena pourrait être Blanche-Neige… mais c'est pas ça qui te branche, hein?

J'entre dans sa chambre. Avec ce que j'ai trouvé en regardant rapidement dans le taxi, je suis certaine que Greg a de belles surprises pour nous dans son placard. Je ne vois d'abord rien de plus que des vestons défraîchis et des chemises à motifs démodés. Je repère une boîte parfaitement ordinaire collée dans un coin sous une pile de vieux magazines et je souris. J'apporte la boîte au salon sans l'ouvrir et je la dépose devant Greg.

-Tu vas défiler pour nous dans tes jolis déguisements?
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyMer 8 Jan - 17:50

Je suis très vite convaincue que Psyché ne m’a pas suivie pour m’espionner. Elle tire bien une certaine excitation de cette escapade et j’ignore si son comportement est inspiré par mimétisme, parce que mon attitude l’y autorise, ou si elle y est habituée. Là est tout le problème de mener la danse en choisissant de ne pas s’inquiéter de ce que fera l’autre. Qui peut dire, alors, ce qu’aurait fait l’autre sans vous ? Dans le taxi, je la constate très tactile, quand je me contente de faire l’idiote. Elle connaît le pouvoir des gestes implicites dans l’esprit des gens et n’hésite pas à en abuser. Quand nous entrons dans l’appartement de Greg, elle confirme ce choix tactique en renversant volontairement une lampe. Elle veut marquer le caractère dérangeant et intrusif de notre arrivée. Elle prend possession des lieux. Je suis plus intéressée qu’amusée. Dans la mesure où j’ignore l’intérêt affectif associé à un objet, je préfère éviter de le briser. J’ai de la colère, mais ma colère a une raison précise. La lampe a beau n’être qu’un bout de faïence, je m’en serais voulue d’en faire un dommage collatéral. Certaines croyances asiatiques supposent une âme à tout ce qui existe et c’est peut-être juste. Chaque chose à sa place, sa raison d’être, dans une maison. Détruire, c’est mettre fin à un lien, toujours, avec une personne, un souvenir passé, une époque, quelque chose. En acceptant de me suivre, Psyché est persuadée que nous allons nous amuser cruellement au dépends d’un humain condamné pour avoir été le témoin de ma propre négligence. Elle n’a rien à cibler. Donc, elle le fait au hasard, et c’est cette facilité à le faire qui est intéressante, car très inattendue.

Les premières révélations au sujet de Greg sont aussi inattendues. Psyché a eu le temps de récolter quelques informations sur son client, et ses passions que l’on pourrait dire, originales. Je l’observe avec pitié en prenant une gorgée d’alcool. J’aime avoir une confirmation de mes soupçons. Pourquoi un homme normalement constitué me rejetterait-il ? Quand on obtient rien d’une personne, c’est qu’elle est hors d’usage. Identifier la panne ne signifie pas toujours réparer, surtout quand il s’agit d’êtres humains. On ne peut pas les démonter et reconstruire en quelques heures. Il est impossible de retirer définitivement ce qui a été mal organisé dans leur tête à un moment donné. C’est la raison pour laquelle je n’avais pas d’autre projet que tuer Greg. Il me semble bien que toute discussion sera vaine, j’ai déjà trop essayer de discuter avec des causes perdues et illogiques. Je comprends ce qu’implique un intérêt soutenu pour du contenu sexuel autour de l’univers de Disney. Et, si ça ne suffisait pas, tout autour de nous le fait comprendre. L’impossibilité à Greg de devenir quelqu’un d’intéressant, d’atteindre, sans doute, les attentes de sa famille, l’ont repoussé vers une enfance sécurisante, dans un état de gestation permanent où il n’y a rien à attendre. Cette âme est faible, elle est déjà en stase en attendant la mort, et il serait inutile de la garder en vie, surtout quand cette existence m’insulte. Quelqu’un qui n’attend rien de la vie ne devrait pas créer des attentes chez les autres. Je ne vois qu’un esprit à l’agonie, qui s’est condamné par manque de capacités – je n’oserais dire de courage, le courage est possible pour celui qui se sait capable – qui s’est condamné, disais-je, à vivre dans un monde qui n’existait pas avant de disparaître, car rien ne le retiendra dans l’autre monde si tout est déjà si abstrait dans sa vie présente.

Ai-je toujours de la colère ? Je l’ignore. Je le regarde, et je voudrais le voir mort, comme un ordinateur usagé qui traîne dans un coin et agace ma vue. Je continue de boire en laissant Peach s’amuser. Je souris quand elle suggère de me déguiser en Blanche-Neige, mais ce serait effectivement inutile. Nous ne sommes pas des créatures de dessin-animé, nous n’avons pas la séduction d’êtres qui n’existent pas et qui s’adaptent aux caprices de notre imagination.

– Nous sommes bien trop vilaines pour lui, Peach. De vilaines femmes pleines de vices, et si affreusement indociles. – Pendant que Psyché se dirige dans la chambre avec une idée en tête, je m’assois près du jeune homme, et lui dit d’une voix doucereuse : – Je sais que je ne devrais pas perdre mon temps à te l’expliquer, Greg, mais sais-tu que tes princesses existent ? Tes princesses sont comme toi, sans doute même plus tristes que toi. Elles attendent un homme qui a les qualités d’un séducteur et le cœur innocent, une combinaison impossible, je suis navrée de te le dire, un fantasme dont tu es terriblement éloigné.

Je lève les yeux vers Psyché qui revient, une boîte dans les mains, un air triomphal sur le visage. Greg pâlit. Elle l’ouvre et nous dévoile une collection d’accessoires étranges. Je n’ai jamais compris ces manies humaines, que je pose sur la tristesse de leur condition, une tentative désespérée de chercher de l’excitation dans une vie insatisfaisante. Trop d’humains ne font rien d’autre qu’attendre leur mort en occupant l’espace n’importe comment, c’est désolant. Les « déguisements » ne semblent pas particulièrement destinés au jeune homme. Il y a un peu de tout, de la combinaison fétichiste à la petite tenue de princesse. Je crois qu’il achète de manière compulsive tout ce qui l’excite avec l’idée vague ou l’espoir d’en faire peut-être quelque chose un jour.

– Je crois que nous serions même nombreux à vouloir en profiter. Il serait bien dommage de ne pas pouvoir exhiber une telle collection, je suis certaine que c’est ton intention la plus profonde, en faire profiter au moins une personne. Qui sait ? Tu feras peut-être des envieux. – Je prends le téléphone entre les mains de Psyché et commence à prendre des photos de nos trouvailles. Puis, je demande à Greg de me donner son téléphone et de le débloquer. Il refuse, bien sûr. Je ricane. – Tu te crois en position de refuser ? Il me semblait que tu avais compris que tu n’avais aucune chance de nous résister. – Je continue de faire croire que Greg est parfaitement conscient de notre nature divine. Il le devient cependant, car mes yeux deviennent incandescents et ma joue gauche se craquelle comme une roche en fusion. Il est horrifié. Tout tremble en lui. J’approche mes lèvres envahies par le souffre de son visage. – Ta peau se consumera avant que je puisse t’embrasser. Tu le sens n’est-ce pas ? Débloque-moi ce téléphone.

Il s’exécute enfin et je me connecte à ses réseaux sociaux pour commencer à partager les photos en demandant à ses abonnés de voter pour leur tenue préférée et de rester bien attentifs pour profiter d’un shotting érotique exclusif. Greg n’est pas une personne très populaire. Ses posts sont peu nombreux, peu appréciées, et il n’a presque pas de photos de lui sur Internet. Je sais que l’impact sera limité mais je sais aussi que la mort de quelqu’un a tendance à susciter une série d’hommages accommodants. Il n’est pas question de lui permettre de briller davantage à l’heure de son enterrement. J’ai prévu de changer ses photos de profil, d’imprimer une dernière image dans les esprits qui devrait laisser tout le monde mal à l’aise lorsqu’on l’évoquera, qui fera comprendre que sa mort a été causée par des pratiques douteuses, et qu’elle est sans doute méritée. Je n’avais pas prévu d’aller aussi loin. Mais l’occasion est là, alors je ne m’en priverai pas.

– Je doute que tes contacts seront très réactifs à ce post. Le dernier n’a eu qu’un like… d’une personne qui ne figure même plus dans tes amis. Alors je vais laisser à mon amie le soin de choisir ta tenue. [/color][/color]
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptySam 8 Fév - 20:09

Briser des objets me détend. Je ne suis habituellement pas violente devant les gens, mais les scènes comme ce soir quand je cassais de la vaisselle toute seule ne sont pas si rares. Enfin, je ne crise pas régulièrement, mais toutes mes crises ou presque incluent ce type de débordements. Ai-je un problème d'agressivité? Je ne blesse personne. Je ne crie pas lors des disputes avec Cupidon, et je ne laisse jamais la conversation aller vers une dispute avec les autres. Parfois je casse subtilement un crayon sous mon bureau quand un truc me fait chier au travail. Et je garde le sourire. Je suis habituée à contrôler mon image. Je le faisais petite, j'ai continué au château de Cupidon et j'ai dû compter sur ce talent pour éviter de me faire exiler de l'Olympe. Répondre aux attentes des gens me permet d'avancer ou, au minimum, de ne pas reculer ou tomber. De toute manière, j'aime ce rôle que j'ai ficelé avec les années. Je devance mes propres réactions, je sais quoi dire avant d'avoir analysé entièrement ce que je pense.

J'ai suivi Proserpine avec bonne humeur. Je manque toujours de distractions. Je me permets de petits débordements contrôlés, comme la lampe cassée et mon attitude intimidante envers notre victime, parce que je me sais en présence d'une déesse particulière. Elle a quitté l'Olympe pour épouser un dirigeant des Enfers. Impossible qu'elle perçoive et définisse normalement les limites morales et sociales. Cupidon la dit folle, mais il est ennuyant à mourir. Je n'ai pas confiance en son jugement. Pour lui, tout le monde est bizarre. Il trouve toujours quelque chose de profond à reprocher aux gens. Plus jeune, je devais me reposer sur lui et je n'avais pas l'occasion de le remettre en question directement, mais les années et, surtout, la liberté que je peux maintenant m'autoriser m'ont permis de considérer ses avis plutôt comme un divertissement que comme une source d'informations.

Je n'ai pas pu me pencher longuement sur le dossier de Greg. L'algorithme ne fournit qu'une liste de sites et de mentions originales; il faut lire et cliquer, et tirer ses propres conclusions. Mon temps étant limité, je m'attendais à scroller rapidement à la recherche de bizarreries sortant du lot. Mais son intérêt soutenu a fait bondir certains sites en tête de liste et m'a simplifié la tâche. Des images pornos de Disney, ce n'est pas difficile à analyser. Les gens s'excitent vraiment sur toutes sortes de trucs. Un de nos employés regarde quotidiennement des photos de jumelles. Je n'ai pas encore décidé de ce que je vais faire de cette information. Rien de beau, très certainement.

Je sors cérémonieusement les costumes de la boîte. Mon air enjoué collé au visage, j'entortille doucement une mèche de cheveu autour de mon doigt en suivant la conversation. Je laisse Proserpine mener la danse. Je ne l'ai pas suivie pour lui prendre le contrôle de la situation. Je veux observer ses réactions. Elle prend en photo les déguisements et les publie sur les réseaux sociaux. C'est gratuit et cruel. Ça ne me choque pas, mais ça m'intrigue. Nous sommes arrivées avec une attitude menaçante, mais il n'est plus question de remettre un mortel à sa place en le terrorisant. Ça n'a probablement jamais été le but de cette visite. Le petit numéro d'effets spéciaux de Proserpine ne me fait pas douter. Sa magie ne lui sert pas à effrayer Greg pour le soumettre, c'est un instrument vers une brutale humiliation personnelle.

Proserpine me laisse le choix du costume. C'est aussi une porte de sortie. Je pourrais la confronter sur les véritables raisons de notre déplacement en essayant de la coincer dans ce qui est semble être une situation personnelle plutôt que magique. Je sais humilier les gens en ayant l'air de ne pas le faire exprès. Mais je m'amuse trop. Et j'apprécie que Proserpine me laisse la voir sous cet angle. Elle aurait pu emmener Greg avec elle aux Enfers et rapidement mettre fin à mon implication, puis l'humilier, mais elle me laisse profiter du spectacle. Et y participer. Je n'ai pas envie de la décevoir.

-Ah mais c'est très difficile de choisir parmi ce matériel de si bon goût! J'avoue avoir un faible pour les flocons adhésifs pour mamelons. Fan de La reine des neiges?

Je choisis plutôt un ensemble composé d'un string-tutu blanc avec queue en pompon et petite montre de poche accrochée à taille, d'un soutien-gorge en simili-cuir blanc et d'un bandeau avec des oreilles de lapin bien touffues.

-À défaut de baiser comme un lapin, mon cher Greg!

Je repère sur la table un collier noir en cuir et le lui tends.

-Faut quand même que tu sois un peu vilain aussi.
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Milena P. NerethMilena P. Nereth


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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyJeu 5 Mar - 16:55

Alors que Psyché choisit la tenue, je commence à remettre mon attitude en question. Cette mesquinerie ne me ressemble pas et je sais que je ne pourrais pas la tenir sur la durée. Ma colère aura le temps de retomber. Je finirai par me demander quel est le sens de tout cela, quelle satisfaction tirer de tout cela, et préférer me montrer finalement indulgente. Mais, je me suis laissée entraîner et dépasser par mon propre mensonge. Je n’ai pas le choix. Je ne peux pas montrer de la faiblesse, en me laissant attendrir par le désespoir de cette petite chose fragile qu’est Greg, cette chose que je voudrais simplement détruire pour ne plus y penser et passer à autre chose. En laissant la main à ma partenaire, je me laisse aussi le temps de prendre du recul sur la scène. Ce n’était pas le but à l’origine, je voulais seulement lui permettre de participer, tout en observant sa réaction pour m’assurer que je ne partais pas trop loin dans une image inappropriée qu’elle aurait pu désapprouver. Elle continue de donner le ton, et cela avec un certain enthousiasme. Cependant, je ne sais pas si j’arriverais à en rire. Agir et regarder sont deux choses différentes.

Je garde le sourire pourtant, un sourire placide, sans doute détaché, un sourire plaqué sur mes lèvres par obligation, dans un espace temps où je ne suis plus vraiment. La tenue de Greg est humiliante, parfaite pour le plan que j’ai lancé dans un élan d’inspiration qui m’a fait devenir « une autre ». Je termine ma bière, j’en ouvre une autre. Je ne dois plus réfléchir. Je dois aller au bout de ce que j’ai engagé. Greg s’habille avec des gestes tremblants. C’est à moi de le prendre en photo, à moi de lui demander de prendre la pause, de s’humilier une dernière fois avant de le tuer. Je cadre sans conviction. J’aimerais le tuer tout de suite. Ce que je fais me semble vain, gratuit, cruel. Je crois que je n’y arriverai pas, mais je ne laisse rien paraître de mes doutes. Je continue de sourire et je tends l’appareil photo à Psyché.

– Je n’ai encore jamais réussi à me faire à cette technologie. Tu t’en sortiras certainement mieux que moi. Je vais poser avec Greg, ça le rassurera.

Je m’approche vers Greg en brûlant mon décolleté d’un bout du doigt pour rendre ma poitrine plus apparente, et je sers son visage contre ma gorge en lui demandant d’être un bien gentil garçon. Je ne m’inquiète pas que l’on voie mon visage, je sais que Psyché aura le bon sens de ne pas poster sans mon accord et, si elle le faisait tout de même, d’éviter de m’afficher. Ça ne serait pertinent pour personne. Je force donc notre malheureuse victime à sourire à l’objectif en le menaçant dans le coin de l’oreille de le tuer s’il ne coopère pas et en faisant monter la température de mon corps à la moindre résistance, pour bien lui montrer que je ne plaisante pas. Évidemment, ça ne m’empêche pas de lui briser la nuque à la fin d’une série de cliché car cette comédie commence vraiment à m’ennuyer. Je me redresse en laissant le corps s’effondrer par terre et je reviens vers Psyché comme si rien ne s’était passé.

– Alors, je peux voir les résultats ? Laquelle te semble la meilleure ?

Je fais défiler les clichés en reprenant à boire et en recadrant tranquillement les photos pour couper mon visage.

– Bon, je n’ai pas envie de choisir, je vais toutes les mettre !

J’hésite un instant sur celle prise au moment où j’exerçais une pression mortelle sur sa nuque. Je pense à l’incertitude et à la perplexité des gens qui verront ça au milieu du reste, et je trouve l’idée amusante. Allez, ajoutée aussi ! Je me redresse vivement en jetant le téléphone au fond du canapé.

– Allez, assez perdu de temps dans cet appartement déprimant ! Il est temps de filer, tu ne crois pas ?


Dernière édition par Milena P. Nereth le Sam 18 Avr - 17:25, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyVen 27 Mar - 22:58

Le craquement de la nuque me redescend vivement sur terre. Ce n'est pas la mort en elle-même qui me choque. Après des siècles à vivre parmi les dieux, j'ai été témoin d'exécutions de toutes les couleurs. Les mortels qui dépassent les bornes se font tuer, c'est la règle. Et les limites sont floues, et variables. Un dieu change d'idées et de préférences et vous voilà condamné pour une offense qui hier encore ne dérangeait personne. J'ai été vénérée par les humains pour ma beauté, et leur adoration a suffi à me faire détester et pourchasser par Vénus, puis rejeter par tous les dieux sauf Cupidon. Mais Hercule, dont l'existence même était une insulte à Junon, s'est vu offrir le pardon et l'apothéose. Il n'y a aucune justice avec les dieux. Que des caprices, de l'opportunisme et des excuses. Les mortels sont des instruments et des jouets. Le pouvoir qu'ils pensent détenir s'effondre dès qu'un dieu pose les yeux sur eux. Des siècles et plusieurs mythologies plus tard, il existe encore des Greg pour l'oublier.

La brèche a permis l'arrivée de beaucoup de dieux, mais d'autres étaient déjà là. Les humains n'ont aucune excuse pour leur ignorance. Ils s'efforcent à se convaincre que les légendes ne sont toutes que des histoires, par peur ou par stratégie de protection. Si tu ne crois pas qu'un dieu existe, tes actions ne seront jamais contre lui. C'est une triste illusion qui ne mène à rien, mais j'ai vécu parmi les humains et je comprends le besoin de s'aveugler pour se croire à l'abri. Un piège confortable ressemble à un refuge.

Je tends mollement le téléphone à Proserpine. Je suis fatiguée. Pourquoi publier les photos? Je ne dis rien pour l'en empêcher. Je n'ai pas l'impression d'avoir le droit d'imposer mon avis. Je ne sais même plus si j'ai un avis. Le corps de Greg est lourd, vide. Il ne fait plus de sens. Je ne comprends plus pourquoi forcer l'humiliation m'a tant amusée. J'ai l'habitude de piquer un peu, à la blague. Mes employés en rient! Mais je ne me montre jamais si cruelle. Aujourd'hui, je n'ai pas su m'arrêter, mais ce n'est pas le problème. Je ne comprends pas comment l'escalade de la situation a pu se dérouler si bien, mais avec une chute si déprimante.

Je me fiche un peu de Greg, quand même. Proserpine l'aurait humilié et tué sans moi, et il ne valait pas d'être sauvé. C'est autre chose qui me dérange. Ma participation au plan de Proserpine, selon ses règles. J'ai eu l'impression de l'observer et la tester, mais qu'ai-je tiré d'elle en réalité? En comparaison, je lui ai montré que ma réputation de déesse pure et gentille est construite sur du vent et je lui ai confirmé qu'on ne me dit pas naïve et manipulable pour rien. Beau travail.

Est-ce que je la laisse me contrôler depuis le début? Toute la situation me semble floue maintenant. Après Cupidon, est-ce que je vais me retrouver à m'incliner devant chaque dieu qui me donne un peu d'attention? Je déteste la confusion. Je leur en veux à tous les deux.

-Oh oui, partons, dis-je avec un sourire las.

Je décrispe ma main de sur ma jupe. Je suis Proserpine dehors. Je m'amusais, je ne m'amuse plus. Je ne veux pas rentrer chez moi et attendre Cupidon toute seule. Ni l'accueillir et qu'il me raconte ce repas où je n'ai pas été invitée.

-Cupidon va me questionner sur notre soirée, en découvrant que j'étais avec toi.

Triste confidence sur comment mon mari se fiche de ce que je fais, mais pas de ce que Proserpine fait. Vu l'attention qu'il lui donne, elle doit déjà savoir qu'il la vénère. Et lui, connaît-il déjà le genre d'humiliation qu'elle orchestre? A-t-il déjà participé à l'une d'elles? Cupidon est capable de suivre n'importe quel esprit fort dans n'importe quoi. Je l'ai vu se laisser entraîner par tellement de gens. Peut-être Proserpine était-elle venue le voir ce soir en sachant qu'il ne lui refuserait rien.  Il n'y a que moi qu'il n'écoute jamais, mais c'est surtout une règle de conduite qu'il suit sans réfléchir. J'ai tort par défaut.

-Enfin, il ne te trouvera probablement pas plus folle que ce qu'il pense déjà, mais il risque d'être sensible au combo humiliation-meurtre, tu le connais.

J'ai parlé calmement, en gardant le sourire.
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Milena P. NerethMilena P. Nereth


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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptySam 18 Avr - 18:20

La mort de Greg jette un sacré froid. L’attitude de Psyché se métamorphose. C’est comme si, soudain, elle réalisait que notre petit jeu n’avait rien d’innocent, comme si elle atterrissait dans une nouvelle dimension et ne savait plus très bien comment réagir maintenant que je ne la guidais plus. Je suis gênée. Il est bien possible qu’elle ne soit pas cruelle par nature et qu’elle ait simplement voulu me suivre dans ma folie. J’avais bien vu qu’elle était prête à aller de plus en plus loin dans l’humiliation tant que je lui faisais sentir que c’était amusant, tant que je l’empêchais de réfléchir à ce que nous faisions. On m’a parfois reproché d’être manipulatrice, et je ne comprends jamais comment ce genre de chose peut arriver. Je ne crois pas forcer les gens à me suivre. Est-ce ma faute si certains pensent que c’est une bonne idée ? Je ne suis pas censée savoir ce qui est bon pour les uns et les autres. Je suis claire avec mes actions, ça ne devrait pas être mon problème si d’autres personnes estiment qu’il peut être amusant de m’imiter. J’aimerais penser ainsi. Je m’y efforce sans conviction. Mais je sens surtout que Psyché est perdue, et je m’en veux d’avoir sans le vouloir appuyé sur une faiblesse pour la mener là où je le souhaitais, simplement parce que j’ai refusé dès le départ de lui dire la vérité sur la raison de ma présence ici. Et je ne le dirai pas. Malgré l’ambiance de mort qui envahit la pièce, je vais au bout de ma démarche. Je suis la logique que je me suis imposée, même si le scénario ne me plaît plus, quelque chose dans mon esprit borné me pousse à terminer ce que j’ai commencé. Je ne me sens l’esprit en paix qu’une fois les photographies postées et le téléphone jeté dans le fauteuil. Maintenant, cette affaire est bouclée, il est temps de s’en aller.

Je descends l’escalier d’un pas léger. Peut-être par provocation, je continue de feindre l’assurance. Mais je n’ai pas la moindre idée de la manière dont je devrais m’adresser à Psyché. Même si j’ai étudié la psychologie, je ne pense pas devoir me mêler de ses problèmes et je ne le ferai pas si elle ne me demande pas directement de l’aide. Même si j’ai dû faire quelques détours, j’ai obtenu ce que je voulais ce soir, et je me fiche absolument de la manière dont Psyché pourrait me percevoir dans la mesure où j’ai pu garder secret ce que je n’avais surtout pas envie de lui révéler et où le seul témoin est mort. Mort. C’est une fantastique nouvelle. Sur le trottoir, la déesse me fait remarquer que Cupidon risque de l’interroger sur sa soirée. Et alors ? Je lui réponds avec indifférence :

– Dis-lui que tu m’as rendu un service.

Je ne vois pas pourquoi elle devrait lui mentionner cette histoire. Après, si l’événement lui pèse et qu’elle a besoin d’en parler, qu’elle fasse ce qui lui plaît. Si Cupidon pouvait enfin arrêter de m’idéaliser, je m’en porterai certainement mieux aussi. Je reprends la marche à la recherche d’un taxi mais je m’arrête net quand j’entends Psyché dire qu’il ne me trouvera probablement « plus folle que ce qu’il pense déjà ». Et je me retourne en haussant les sourcils d’un air vaguement surpris. Mais je ne sais pas si je suis tellement étonnée. Il m’en a toujours voulu de lui avoir préféré Pluton et d’avoir préféré couper tout lien avec lui.

– Folle ? Cupidon t’a dit que j’étais folle, vraiment ? Mais quelle personne qui n’avance pas dans son sens est-elle saine d’esprit à ses yeux ?

En revoyant Cupidon l’an passé, j’avais pu faire une analyse plus fine de son caractère, et constater avec lassitude qu’il n’avait pas changé, que les gens ne changeaient décidément pas, surtout lorsqu’ils avaient la puissance des dieux. Cupidon ressemblaient à un nombre important de mes victimes. Il était prisonnier de son égo, il ne voyait que ce qui l’intéressait et cherchait sans cesse à tordre la réalité. Quand il n’obtenait pas ce qu’il voulait, il recréait une autre réalité, ou cherchait, en tout cas, à la créer pour les autres. J’imaginais bien qu’après notre discussion où j’avais refusé de compatir à ses problèmes de famille, il ait décidé que j’étais « folle ». Après tout, je ne lui avais rien caché de mes activités pour capturer des âmes et de ma manière de me distraire dans cette nouvelle vie en jouant les psychiatres, en m’amusant du malheur des autres.

– Honnêtement, Psyché, dis-lui ce que tu veux. Je suis une déesse infernale, préserver le secret de notre existence est une chose, mais je ne dois rien, et depuis longtemps, à la bande du Panthéon. Je n’étais pas venue avec l’intention de me mêler de vos histoires, alors…

Je m’interromps. Peut-être que je ne devrais pas être aussi désinvolte. Beaucoup de choses ne vont pas. Pourquoi Psyché insiste-t-elle là-dessus ? Pourquoi semble-t-elle croire que ce genre de déclarations, voire de menaces, pourraient m’inquiéter ? Qui suis-je sans le savoir au milieu de leur relation ? Cette personne dont Cupidon se moque sans cesse pour dissimuler de manière grossière l’intérêt qu’il me porte ? J’ai constaté qu’il ne l’aimait plus quand je l’ai revu. J’avais déjà décidé que ce n’était pas mon problème à ce moment. Mais, aujourd’hui, Psyché m’a suivi en cherchant à fuir son foyer et à s’amuser avec moi, et, maintenant, elle essaye de sonder mon opinion à propos de son mari. Quelque chose ne va pas, et même si je n’ai pas envie de me mêler des histoires des autres, je crois que je peux considérer qu’elle me demande des réponses. Je crois aussi que je n’ai vraiment aucune raison de protéger Cupidon, pas s’il m’utilise pour mentir à son épouse.

– En fait non, je crois que je devrais me mêler de vos histoires. Tu me suis dans un bar ?

C’est à mon tour de lui rendre son sourire. J’allonge le pas pour rejoindre le premier bar que j’aperçois. Greg est complètement oublié. Nous allons devoir parler de problèmes qui auraient certainement dû être abordés depuis très longtemps, si j’avais voulu me mêler des histoires de Cupidon avant. J’ai eu tort en essayant de l’utiliser ce soir pour résoudre mes problèmes, maintenant, je ne peux plus reculer. Je passe la porte d’un bar latino, pas vraiment l’ambiance la plus adaptée à une discussion riche en révélation, mais au moins, ça feindra la bonne humeur.


Dernière édition par Milena P. Nereth le Ven 15 Mai - 15:42, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyDim 19 Avr - 14:35

Jusqu'à récemment, j'avais toujours été fidèle à Cupidon. Pas juste d'un point de vue intime; je faisais de mon mieux pour préserver son image et son moral. Mais la découverte de comment il utilisait sa magie pour me garder aveuglément obéissante a anéanti mon envie de faire des efforts et des compromis. Je ne veux pas mettre fin à notre couple. Je trouve toutes sortes d'excuses, je les jongle selon les journées et les circonstances. Elles me semblent toutes justes, toutes vraies. Est-ce que j'aime encore Cupidon? Je le déteste, j'en suis certaine, mais je ne sais pas si je ne l'aime plus. J'ai passé des siècles à devoir faire tourner ma vie autour de lui. M'arrêter maintenant signifie aussi remettre en question toute cette existence à ses côtés, et tout ce qu'elle dit sur moi.

J'ai sauté sur l'occasion de nuire à Cupidon. En fait, j'ai créé cette occasion. Est-ce malhonnête de ma part? Cupidon le premier a participé à me faire mauvaise réputation, mais je me serais crue capable de plus de finesse que lui. Remettre coup pour coup, c'était une tactique de perdant. C'était prouver la blessure, c'était se montrer faible. Au moins, mon attitude désinvolte laissait croire que soit je ne percevais pas ma révélation comme grave, soit je me fichais du mal que je pouvais faire. Idiote ou insensible, c'était dans les deux cas plus facile à assumer que lâche.

Heureusement, Proserpine profite de ma manière tordue de lui faire payer mon malaise pour se moquer de Cupidon. Je souris. Je suis contente d'éviter le conflit que j'ai essayé de provoquer. J'étais prête à m'engager dans une petite dispute distrayante, à lui apprendre que mon mari, en dehors de ses fantasmes sur elle, la juge toujours de très haut. Je n'ai pas l'habitude de ce type de bassesses. Est-ce seulement par manque d'occasions? Depuis mon arrivée à New York, je découvre un monde qui m'a toujours été interdit, mais aussi une personne que je ne pouvais pas être avant. Sortir de prison, c'est aussi risquer de ne pas savoir s'adapter à une société qui fonctionnait très bien en notre absence. Les limites sont beaucoup plus loin et vagues que quand j'étais convaincue que les dieux allaient me tuer si je ne me tenais pas tranquille. Et dans l'aveuglement, je préfère exagérer un peu en les repoussant que les sentir se refermer encore sur moi.

-Pour la folie comme pour le reste, faut pas attendre une grande complexité dans ses jugements…

Je laisse transparaître l'ennui que Cupidon a fait grandir en moi d'année en année. Des siècles de floraison! J'ai appris avec le temps à contourner ses avis sans nuance, à fuir les discussions dont la seule conclusion est toujours de lui donner raison mais avec des synonymes. Notre relation est devenue une suite d'excuses pour mettre fin à des moments passés avec lui. Je ne veux pas en parler, ni à Proserpine, ni à mes amies humaines, ni à Cupidon qui ne va encore rien comprendre. Mais pour une fois, j'ai envie de le sous-entendre.

-De nos histoires? dis-je avec un demi-sourire en appuyant bien sur ''nos''.Je n'ai jamais fait partie du panthéon romain.

J'ai le droit de le dire désormais. Même quand on me rejetait, si j'avais osé prononcer ces paroles, il aurait fallu que je m'inquiète des réactions des plus puissants. ''Nous avons inclus cette humaine et elle nous remercie en nous dédaignant?'' J'ai réussi à protéger mon statut de déesse tout ce temps, et il est bien à l'abri maintenant.

Proserpine reparle de ''nos histoires'' et j'ai cette fois bien l'impression qu'il n'est plus du tout question de panthéon, mais plutôt de Cupidon et moi. Si je la suis, je lui donne encore le pouvoir sur la situation, mais je ne peux pas non plus simplement mettre fin à la discussion sans savoir ce qu'elle peut me révéler. Je ne me fais pas d'illusions: si Cupidon lui trouve des défauts colorés alors qu'il fait une obsession sur elle depuis leur adolescence, il lui a probablement parlé en mal de moi. Va-t-elle vraiment m'apprendre quelque chose d'intéressant? Confirmer ce que mon mari dit de moi risque de me blesser, mais découvrir ses manipulations magiques m'a fait plus avancer que pleurer, et je ne crains pas un choc de plus pour me pousser à bouger.

-Rien de mieux que sortir après un meurtre, bien entendu, dis-je avec bonne humeur.

Greg est redevenu un peu flou. Il n'est pas le premier cadavre à aller rouler loin dans ma conscience. Justifier, ensevelir de déni, rendre insignifiant ou risible… J'ai l'habitude de gérer ma culpabilité instinctivement.

Proserpine m'emmène dans un bar latino. Est-ce que l'ambiance joviale fait partie de son plan? Veut-elle me détendre ou plutôt signifier qu'elle se moque de moi? Elle n'a aucune raison de m'accorder de l'importance, tout comme à ma relation avec Cupidon.

-Pourquoi as-tu décidé de te mêler de ''nos histoires''?
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyVen 15 Mai - 17:15

Je ne sais pas si j’attendais une opinion particulière de la part de Psyché au sujet de Cupidon. En fait, j’avais cessé de m’inquiéter de ses problèmes de couple au moment où il avait quitté la porte de mon appartement il y a deux ans de ça. Les gens passent leur temps à s’acharner dans des couples mal assortis, et il n’y avait souvent rien à faire pour les séparer, même quand tout leur permettait de savoir qu’ils n’étaient pas heureux. Ils ne voulaient pas perdre la face, pas être seuls, avaient investi « trop de temps » pour arrêter, comme si quelque chose qui ne connaissait aucune évolution intéressante méritait d’être préservé parce qu’il était « ancien ». On ne demandait pas aux gens de tuer leur partenaire, comme on ne demandait à personne de détruire Versailles, juste de comprendre qu’il n’était plus utile de vivre à l’intérieur de leur couple, comme à l’intérieur du château d’un roi déchu, même si les souvenirs associés à cette époque étaient beaux. Non, j’avais frappé chez Cupidon dans un but purement utilitaire, j’avais laissé Psyché me suivre avec en tête la seule préoccupation de préserver mes petits secrets. Je n’avais pas vraiment compris ce que Cupidon venait faire dans cette histoire.

Mais puisque Psyché insistait et se montrait plutôt enthousiaste de pouvoir dire du mal de lui, je comprenais que je devais faire l’effort de prendre un nouveau rôle, maintenant que j’avais entraîné Psyché dans mon scénario et obtenu ce que j’étais venue chercher, ou la vie que j’étais venue prendre. Mais elle se méprend quand je lui déclare que je n’ai jamais eu l’intention de me mêler à ses histoires, contrairement à l’impression que je semble avoir pu donner. Elle pense que je m’exprime au sujet des dieux. Elle me corrige une première fois sur le fait qu’elle n’a que faire du panthéon, puis semble comprendre où je veux en venir quand j’insiste une seconde fois. Elle accepte mon invitation en plaisantant au sujet du meurtre, signe que cette histoire la travaille toujours, qu’elle sent un décalage avec ce que nous venons de faire et ma proposition, malgré son envie d’ironiser. L’ironie sert toujours à exprimer un malaise, ou à exprimer quelque chose qui devrait être traiter, et qui ne l’est pas. Ça ne le sera pas. Les humains meurent, c’est même la raison pour laquelle on les désigne sur un plan égal avec le terme « mortels ». La mort est un élément qui les caractérise, qui les distingue. Ils sont humains parce qu’ils meurent. Alors que ce soit pas ma main, jeune ou vieux, ça n’a aucune importance, cela reste dans l’ordre naturel des choses.

Nous entrons dans un bar chargé de lampions orangés. Je me dirige d’abord vers le bar pour demander deux mojito au serveur avec le sourire enthousiaste de deux jeunes femmes qui s’apprêtent à commettre des folies de leur nuit loin de leurs compagnons. Nous prenons place sur une petite table ronde isolée et Psyché lance les hostilités en me demandant pourquoi j’ai décidé de me mêler de ses affaires de couple. Je lui dis sans détour en croisant une jambe sur l’autre et en posant mes avant-bras sur la table :

– Parce que tu m’en parles, et si tu le fais, je suppose que ça a de l’importance.

Intérieurement, je deviens nerveuse. L’avantage du métier de psychiatre est que les gens viennent vous parler de leurs problèmes. Ils amènent le sujet, ils attendent les questions. Quand les gens me pointent un problème avec évidence mais sans vouloir montrer leur intention d’en parler, j’ai quelques difficultés à la patience et la subtilité. J’aimerais leur dire que j’ai compris, qu’ils peuvent tout me dire, mais cette réaction passe souvent mal, les gens vont penser que je les prends de haut, alors que je ne comprends simplement pas pourquoi ils s’embêtent autant et que j’aimerais juste avoir des pistes pour les aider dans la mesure de mes possibilités, pas spécialement pour me donner une image bienveillante qui me valoriserait, mais par empathie réelle et bien être personnel : sentir un malaise me perturbe infiniment et si je sens qu’on attend quelque chose de moi, j’ai besoin de savoir quoi, de pouvoir le traiter tout de suite, plutôt qu’on me laisse avec cette pression indéfinie sur les épaules, qui suinte à chaque parole. Mais je ne sais pas comment m’y prendre et je sais que je ne peux pas exprimer ce qui me pose problème. Alors, je me concentre pour trouver les mots, pour recomposer simplement la situation que le sais et maîtrise :

– Je n’avais pas eu de nouvelles de Christian – Je prends nos noms humains afin de ne pas avoir l’air trop étrange pour des oreilles indiscrètes – avant de le retrouver dans cette époque. Dans mes souvenirs, il filait le parfait amour avec toi, sa personnalité même en avait été transformée. Quand je l’ai revu il y a deux ans, si je ne me perds pas dans mes souvenirs, il était plus distant à ton sujet, comme s’il avait des choses à cacher, et je constate que tu ne sembles pas non plus porter en haute estime sa personnalité.
Je marque une pause. Quelque chose ne va pas en particulier ce soir. Pourquoi Cupidon n’est pas là ? Pourquoi la raison de son absence me déçoit infiniment ? Pourquoi perturbe-t-elle aussi particulièrement Psyché ? Ah, oui, bien sûr.
– Il essaye de se rapprocher de sa mère, qui l’a rejeté précisément à cause de votre union. Je pourrais en déduire que cette histoire est terminée, mais elle ne l’est pas vraiment. J’en déduis par contre, qu’il est encore plus imbécile que je le pensais.
Quels que soient les sentiments de Psyché, elle ne peut ignorer l’insulte qu’il lui fait en cherchant de nouveau l’approbation de sa mère. Elle ne peut ignorer ce que cela signifie après tous ces siècles sans avoir cherché à revoir Vénus. Et si elle n’avait pas voulu mettre des mots, il est temps de le faire. Cependant, je ne sais pas à quel point le coup pourrait être dur. Je ne sais pas où ils en sont. Et j’essaye d’atténuer l’effet potentiel en feignant de dire « peut-être » n’importe quoi par méconnaissance, de reprendre une place plus humble :
– En réalité, je ne comprends pas grand-chose, je crois juste que je ne devrais pas ignorer tous les signes qui me montrent que ça ne va pas, parce que si je peux aider, je suis prête à le faire pour une complice de mauvais coups.

Je lui tourne un sourire plus malicieux, comme pour lui signifier ou lui confirmer, allez savoir, que nous partageons un lien spécial qui me donne envie de rester avec elle désormais. J’essaye surtout de convenir à ce qu’elle pourrait attendre de moi, à celle qu’elle pourrait aimer me voir devenir en m’ayant suivi dans mes folies. J’essaye d’être une amie, parce qu’elle m’a aidée, et qu’aucune aide n’est réellement considérée comme gratuite, même chez les plus modestes.
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyJeu 22 Oct - 15:34

J'aurais pu me rebeller, j'imagine. Les dieux m'auraient-ils vraiment tuée à la moindre désobéissance? J'en doute sérieusement depuis plusieurs années, même si j'en étais convaincue quand mon mari me le répétait. Le passage par la brèche m'a permis un regard nouveau sur mes semblables. Cupidon m'avait laissé croire que je restais en danger même une fois devenue déesse, qu'il me fallait m'incliner ou être persécutée. Les dieux se maltraitent entre eux. Les exemples de châtiments sévères ne manquent pas, même chez les dieux plus puissants. Après avoir toute ma jeune vie refusé de me soumettre, je m'y suis résolue pour échapper à la fureur de Vénus et à la haine de ses alliés. Me cacher derrière Cupidon m'a permis de devenir une déesse et de survivre. Puis plus rien.

Je me demande parfois si j'ai vraiment existé, ces derniers siècles. Enfin, oui, j'étais là. Je parlais, je feignais de rire, je suivais Cupidon et lui proposais des projets. Mais je ne garde aucun souvenir marquant, comme si j'avais été absente de ma propre vie. J'ai laissé quelque chose s'endormir en moi quand j'ai compris que tout contrôle sur mon existence m'échappait. Ce n'est pas la force de me rebeller qui me manquait, mais plutôt la motivation pour le faire. Je ne percevais pas d'issue. Entre l'abandon de tous mes proches, la haine injuste de presque tous les dieux romains et l'amour très conditionnel de mon nouveau mari, je ne voyais pas quoi espérer. J'ai donc gagné du temps, encore et encore, en essayant d'améliorer peu à peu ma vie. Je buvais aussi beaucoup, probablement trop, mais personne ne me le reprochait pour deux raisons : tous les dieux buvaient pas mal et personne ne me parlait, de toute manière.

Je me suis vite entourée de gens après mon passage par la brèche. Les dieux romains ont arrêté de me faire peur depuis qu'ils ne sont plus les seuls à décider. Je les évite par dédain, tout comme les dieux grecs qui leur ressemblent trop. J'ai pourtant sauté sur l'occasion de me mêler des affaires de Proserpine. Avant de faire partie d'un panthéon, elle règne sur les Enfers. Son statut et son royaume éveillent ma curiosité. Je suis informée sur ceux-ci, tout comme sur son mari, et aussi sur les parties des Enfers qui ne lui appartiennent pas. Tout ce temps à m'ennuyer sur l'Olympe m'a permis d'accumuler des informations sur la magie, sur le monde, sur les autres dieux et sur les humains. Je cherchais en vain le détail qui m'ouvrirait de nouvelles portes.

Proserpine retourne ma question contre moi. Apparemment, je lui ai laissé comprendre que je voulais parler de mon couple avec elle. Je vois mal en quoi j'ai pu donner cette impression, mais notre discussion avant d'arriver au bar est un peu floue dans ma mémoire. Je choisis de ne pas répondre. Lui casser son délire d'être ma confidente ne me fera rien gagner.

Je l'écoute me parler de ses observations sur les sentiments de mon mari envers moi. A-t-elle la même lucidité en ce qui concerne son faible pour elle? Je ne réponds rien à ses remarques sur l'estime que j'ai pour Cupidon et je bois en gardant un air neutre. J'attends de voir où elle veut en venir avant de m'exprimer. Quand elle mentionne l'histoire avec Vénus, je la corrige cependant :

-Il n'a jamais arrêté de vouloir l'approbation et l'affection de sa mère, dis-je sur un ton fatigué. Il lui a tenu tête cinq minutes, le temps de m'épouser, puis il s'est… doucement affaissé, je dirais. Il y a des siècles qu'il réfléchit à toutes ses actions pour essayer de bien paraître à ses yeux. Il essaie de le cacher, mais tu connais sa subtilité.

Je n'ai pas défendu Cupidon quand elle l'a traité d'imbécile. J'en remets sur son manque de subtilité. Je ne tiens pas à médire sur mon mari avec une presque étrangère, mais je ne fais plus l'effort de mentir pour le faire bien paraître.

Après son analyse du comportement de Cupidon, Proserpine dit être incertaine de comprendre la situation. Je note silencieusement sa prudence. Elle ouvre une voie pour se rétracter, mais je ne compte pas l'y pousser.  Je ne tiens pas à essayer de lui faire voir mon mari positivement. Je l'ai si souvent excusé par nécessité, mais je ne vois pas l'utilité de le faire bien paraître aux yeux d'une amie qui l'a connu avant moi. Enfin, il l'a considère comme son amie, mais elle n'agit pas comme telle ce soir, à dire du mal de lui avec son épouse. Elle semble plutôt se mettre dans le rôle de mon alliée, contre lui.  Je lui retourne son sourire.

-Je ne refuse jamais d'aide, et c'est gentil de m'en offrir.

Je doute de la pureté de ses intentions, mais je préfère avoir l'air convaincue de sa bonté, à la fois pour la mettre en confiance et pour la forcer à garder un rôle d'amie. Si elle cherche à me nuire, elle devra le faire en paraissant innocente, et ce sera beaucoup plus facile de devancer ses attaques. Je décide de lui donner un peu de ce qu'elle essaie de me faire cracher, en observant bien ses réactions.

-Christian est en effet plus distant depuis quelques années. Mais peut-être n'est-ce qu'une petite parenthèse sur des siècles de mariage.

Durant ma jeunesse, j'ai lutté contre mes sœurs, contre mon père et contre les dieux pour survivre. Je ne me suis soumise que par certitude de n'avoir aucun autre choix. Est-ce que je reste avec Cupidon pour des raisons similaires? Je ne me vois pas avec une autre personne, mais je ne me suis jamais laissé le choix. Mon mari s'est imposé comme figure d'équilibre dans ma vie. Me concentrer sur Cupidon et oublier le reste, je m'y étais résolue pour ne pas couler. Et pourtant, depuis que la brèche m'a permis de m'éloigner de lui je respire et j'avance. En fait, j'organise l'essentiel de ma vie toute seule, en contournant sa présence.
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyMar 17 Nov - 17:09

Je me suis permise d’être assez brutale dans mes propos car le terrain ne me semblait pas particulièrement risqué. Je ne pensais pas mettre Psyché au bord des larmes. J’étais moins certaine, en revanche, de ne pas provoquer sa colère. Beaucoup de gens sont prêts à dire du mal d’une personne à la seule condition qu’on leur donne tort, pour ensuite se rétracter et, si vous êtes le premier à médire, il ne leur reste plus que la possibilité de scandaliser pour prendre le beau rôle. Je l’ai vu chez de nombreux hommes et femmes. C’est un cercle vicieux dans lequel on peut dire du mal de leur partenaire mais sans jamais pouvoir tirer une conclusion négative, quelque chose qui n’a aucun sens mais que les gens adorent faire : ils identifient le problème mais ne veulent pas le résoudre, juste l’évoquer pour essayer ensuite de se convaincre qu’il n’est pas si important. Heureusement, Psyché n’a pas une réaction pénible d’esprit indécis. Elle est attentive, et certainement observatrice. Elle ne dément pas mon discours, elle y ajoute même des précisions. Cupidon serait resté obsédé tous ces siècles par l’idée de reconquérir l’estime de sa mère. Je ne peux retenir un soupir navré entre deux gorgées. Un sortilège d’amour puissant n’était donc même pas suffisant pour chasser cette idée fixe. Les liens familiaux ne voulaient rien dire et l’hérédité du tempérament semble une simple fable qui se répète depuis le début du langage humain. Enfants et parents sont des individus avec des vies, des expériences et des buts différents. Il n’y a pas plus de raison réelles de s’entendre avec eux qu’avec son voisin de palier, au-delà de l’intérêt de garder des alliés forts sur lesquels toujours compter, quand ce genre d’accord est possible et n’implique pas trop de sacrifice à son être profond. Mais Cupidon a toujours refusé cette réalité. On ne pourra jamais forcer quelqu’un à vous aimer ou à vous estimer. Je réponds à Psyché sur le ton de la conversation :

– Il a essayé de me le cacher aussi quand je l’ai revu, mais j’ai décidé de le forcer à aborder le problème de front, ce qui l’a fait partir assez rapidement. Je n’avais donc pas eu d’intérêt à le revoir avant l’affaire de ce soir.

Quand vous évoquez un problème avec une personne et qu’elle refuse d’y trouver de solution, l’intérêt de la revoir est très bas puisque le problème sera toujours là. La relation ne peut donc pas évoluer, il s’agira toujours d’être confronté aux mêmes problèmes, et les problèmes existent pour être résolus. Je ne peux pas fréquenter trop longtemps une personne qui aime se les traîner comme des boulets. Comme je le disais précédemment, c’est une chose pénible pour moi, de manière tout à fait égoïste. Il est amusant cependant que Psyché me parle du manque de subtilité de Cupidon car je ne la trouve pas nécessairement subtile non plus, dans un autre genre. Même si elle pense pouvoir cacher ce qui lui pose problème, certains agissements ne mentent pas lorsqu’on connaît plus en détail la situation. Je ne pense pas qu’elle attende réellement mon aide, ce n’était pas le but de sa sortie avec moi, juste qu’elle est intriguée par ce que je lui propose. Elle ne se jette d’ailleurs pas dans mon invitation à interroger le comportement inhabituel de Christian. Je ne sais pas exactement si c’est volontaire de sa part, afin d’avoir plus de précisions sur ma pensée, ou si c’est une chose dont elle aimerait rester convaincue. A ce stade de la discussion, j’ai été assez prudente pour me rétracter et lui dire qu’elle a sans doute raison, mais ça ne mènerait à rien. Que sait-elle au sujet de l’enchantement qui s’est retourné contre lui ? Sans doute qu’elle n’a pas connaissance de l’exacte vérité, sinon je ne pense pas qu’elle aurait une réaction aussi tranquille. Tant pis si elle n’est pas prête à l’entendre et que je passe pour une affabulatrice, je n’ai pas besoin d’une nouvelle amie, je n’ai pas besoin non plus de l’estime de Cupidon, il a été tenu trop longtemps hors de ma vie de toute façon.

– Je ne saurais dire… J’ai revu Christian une fois après son « incident », il était différent de celui que j’avais connu. Je ne dis pas qu’il n’éprouvait pas de sentiments avant, car je n’en sais rien, mais je suis sûre que sa manière de les exprimer n’était pas dans son caractère. Il m’a semblé quand je l’ai revu ici, qu’il n’était plus sous l’effet de son envoûtement mais qu’il se donnait de la peine pour le cacher. Si tu as remarqué des changements qui sont intervenus précisément depuis la brèche, la piste n’est pas impossible non plus.

Parler de Cupidon n’est pas ma passion, mais il y aurait cependant beaucoup de choses à dire sur les attitudes qui ne lui seront jamais naturelles. Il a toujours été et sera toujours trop lâche pour s’opposer ouvertement à sa mère comme il l’a fait pour épouser Psyché, pour assumer, même, un choix réprouvé par tout le groupe des dieux, auprès desquels il voulait tant briller. Je ne le pense pas non plus capable d’une réelle stabilité dans sa satisfaction. Passent quelques années de bonheur aveugle, mais plusieurs siècles sans jamais critiquer Psyché, surtout alors qu’il n’a jamais renoncé à l’idée de retrouver l’approbation de certains dieux, me semble compliqué. Ce ne seront peut-être que des impressions sans fondement assez solide pour la plupart des gens, mais je suis assez sûre de ce que j’avance, je craindrais trop de passer pour une imbécile jalouse pour m’exprimer à la hâte sur ce sujet, même si je prends cependant le risque de ne pas être crue. Je n’ai pas de preuves éclatantes et je sais que Cupidon niera très certainement en usant de tous les arguments fallacieux dont il est capable, mais je n’aime pas les mensonges en général, alors, je préfère les signaler, à Psyché de choisir qui elle veut croire, j’aurai au moins la conscience tranquille en ce qui me concerne.


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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyMar 24 Nov - 16:31

Je suis bien entourée, mais j'ai peu d'amis proches. Je ne sais pas comment bâtir ce genre de liens, et j'ai très peu essayé. J'ai des gens avec qui sortir et rire, d'autres avec qui discuter de sujets intéressants et encore d'autres sur qui compter pour avancer. Tous sont remplaçables, même si je ne joue pas à les renouveler. Ceux qui partent me déçoivent vaguement, mais ne me font pas de peine. Thot sort un peu du lot, mais je reste sur mes gardes. Ce soir, Proserpine s'impose comme amie avant de probablement disparaître en ayant tiré de moi… Je ne sais pas exactement ce qu'elle veut. Plus de contrôle sur Cupidon? Elle montre trop de dédain pour cacher une envie de le garder pour elle. Une réelle amitié avec une déesse qu'elle connaît à peine? La technique serait maladroite. Un jeu de pouvoir où elle me domine? J'excelle dans l'art de laisser les autres penser qu'ils ont le dessus sur moi.

Proserpine me révèle qu'elle a froissé Cupidon de la manière la plus facile : en le mettant devant l'évidence. Un sourire las accompagne mon soupir. Je ne l'ai jamais vu accepter des faits contredisant ce dont il a choisi de se convaincre.

Je lève les sourcils quand elle me dit qu'elle ne l'a plus revu depuis cette rencontre. Cupidon ne s'est pas vanté de ce froid entre eux, même en étant certain de pouvoir me forcer à oublier la conversation. Il devait craindre de m'entendre exprimer le même avis que Proserpine.

-Il te décrit pourtant comme une excellente amie.

Je ne doute pas des capacités de mon mari à se faire des illusions, mais j'ai saisi l'occasion de questionner Proserpine sur leur relation. Dès que j'ai fini ma phrase, je réalise que la réponse m'importe à peine; je suis davantage curieuse qu'intéressée. Cupidon m'a répété sur tous les tons que notre couple était tout ce qui comptait, en se gardant à côté une large vie sociale qui m'était interdite. Que Proserpine tienne à lui ou non ne change rien à mes siècles d'isolement.

Je me méfie modérément de Proserpine. Je ne crois aux bonnes intentions de personne, surtout les dieux, mais je vois mal ce qu'elle peut m'enlever, ni même ce qu'elle voudrait me prendre. J'ai dit du mal de mon mari, comme presque toutes les déesses le font – cette information n'intéresserait personne. Pas même Cupidon. Il tâcherait de l'oublier dans la minute.

Je ne sais pas quoi répondre quand elle me parle de l'envoûtement. C'est un sujet que j'ai laissé de côté depuis si longtemps. Je n'ai plus de mots pour le définir. Au début de mon mariage, je refusais de devoir à la magie l'homme qui se décrivait comme la seule personne à m'aimer. Comment un dieu pouvait-il être victime de sa propre magie? Cupidon intervenait dans les histoires d'amour des autres dieux. Il était donc puissant – assez pour contrôler ses propres pouvoirs, non? Je ne m'expliquais pas non plus la colère de Vénus dans le cas d'un accident. Si Cupidon s'était simplement blessé avec une flèche, elle m'aurait tuée et aurait tourné la page. Mais elle m'a laissée en vie, sans rien essayer contre la magie de son fils. À l'époque, j'avais conclu que Cupidon avait utilisé cette histoire pour se donner l'air innocent. Avec le temps, j'ai simplement voulu oublier tout ce qui n'était pas le moment présent, parce que je me sentais devenir folle avec ce passé terne et cet avenir vide.

J'avais bien sûr repensé à l'envoûtement en découvrant l'ampleur de l'éloignement de Cupidon, mais je n'y avais pas accordé d'importance. Que vaut un sort sur des siècles de vie ensemble? Possiblement beaucoup. Mais plusieurs éléments ne collent pas. Cupidon choisit encore de rester avec moi, même en rampant devant sa mère. Il m'impose magiquement sa volonté et ses mensonges, mais il ne part pas. Il veut me garder, ce qui ne fait pas de sens pour quelqu'un sachant que toute la relation a reposé sur la magie. Je ne crois pas donc pas à cet envoûtement. Ou plutôt, je ne pense pas qu'il ait été de longue durée. Il explique l'enthousiasme de Cupidon et son attitude rebelle au début de notre relation. Mais le comportement de mon mari n'a pas commencé à changer lors du passage par la brèche. Il y a des siècles qu'il ne me traite plus avec la passion et la dévotion qu'un sort d'amour commande. Il est donc resté avec moi pour d'autres raisons, mais je ne suis pas certaine qu'elles soient plus honorables que l'obligation magique.

-Beaucoup de changements sont survenus. Nous n'avons plus du tout la même vie, donc les comparaisons sont difficiles à faire.

Je m'arrête, étonnée par ma lâcheté. L'attitude inquisitrice de Proserpine, même tranquille, m'a donné envie de reculer. Je termine mon verre.

-Tu crois que Cupidon ne m'aime plus?

J'ai posé une question à laquelle elle a déjà répondu indirectement avec sa manière d'aborder l'envoûtement et d'essayer de me pousser vers des confidences sur le comportement de mon mari ces dernières années. Je veux la faire parler davantage, parce que je ne sais pas quoi lui dire qu'elle ne sache pas déjà. Ma question lui laisse aussi comprendre que je ne combats pas ce qu'elle a déjà avancé ni ne m'en étonne.
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyJeu 11 Fév - 18:18

Psyché se montre clairement surprise quand je lui affirme ne pas avoir revu Cupidon depuis maintenant deux ans. Aurait-il inventé d’autres rendez-vous avec moi pour qu’elle soit convaincue que nous entretenions une belle amitié ? Dans quel but ? Feindre une vie sociale qu’il n’a pas auprès des autres dieux ? Narguer de manière plutôt cruelle Psyché sur une amitié potentiellement ambiguë avec une autre déesse ? C’est curieux. Mais les décisions de Cupidon m’échappent souvent en partie, elles n’appartiennent pas à une logique visible, et je ne sais même pas si je peux dire qu’elles répondent efficacement à ses objectifs personnels. Pense-t-il à ce qu’il dit quand il évoque notre grande amitié ? Oui, je le pense. Je crois qu’il serait réellement ravi de me voir revenir vers lui comme si notre dernière conversation n’avait jamais existé dans son entier. Je me contente donc de lui dire la simple vérité :

– Nous avons été de bons amis. Je ne pourrais pas dire que nous le sommes toujours, mais je ne serais pas venue le trouver ce soir si je ne pensais pas qu’il m’aiderait au moins en souvenirs de cette amitié.

On pourrait croire que je cherche à profiter de la situation, du besoin qu’a Cupidon de continuer à revendiquer notre amitié, mais ce n’est pas tout à fait exact. Tout d’abord, j’ignorais qu’il nous attribuait actuellement une relation plus forte que la réalité. Ensuite, je n’aurais pas vu d’inconvénient à lui venir en aide s’il me l’avait demandé, tant que ça n’impliquait pas un grand investissement de ma part.
Mon discours sur l’envoûtement de Cupidon laisse Psyché silencieuse quelques temps. Visiblement, je lui donne encore beaucoup d’informations qu’elle ne possède pas et peine à assimiler. Elle ne sait rien, et c’est assez terrible à constater. Je regrette un peu mon élan. J’ai parlé parce qu’elle semblait chercher à fuir sa réalité mais elle n’en est peut-être pas au stade de pouvoir tout entendre. Elle pense peut-être pouvoir encore contrôler sa vie de couple malgré ses problèmes, et elle n’a pas forcément envie de savoir non plus à quel point des millénaires de vie commune ont pu tenir sur des mensonges. Les humains en souffrent déjà pour quelques années. Le retour sur terre pourrait être très compliqué. Cependant, son avantage par rapport aux humains est que, malgré tout ce temps « perdu », elle est toujours jeune et désirable, et peut espérer encore de longues années pour se reconstruire. Peut-être, qui sait, deux autres millénaires avec une personne qui l’aimera comme elle le mérite ?  

Elle me fait une réponse prudente et même fuyante. Beaucoup de choses ont changées, il n’est pas possible d’établir des comparaisons avec notre vie d’avant etc. Les gens utilisent souvent ce genre de faux prétextes pour ne surtout pas réfléchir. A ce moment, je suis prête à le lui concéder et clore la conversation sans aller plus loin. Je respecte son choix de préférer continuer à se voiler la face ou prendre du temps pour réfléchir seule. Je pense avoir dit l’essentiel de ce que j’avais à dire. Cependant, elle me relance soudain en me demandant si je croyais que Cupidon ne l’aimait plus. La question est assez étrange, ce n’est pas vraiment à moi d’avoir une opinion sur le sujet, n’ayant jamais vu de près leur relation, mais je crois en saisir l’intention. Elle est prête à entendre davantage. Mon visage se ferme un instant, le temps de trier mes idées et de sélectionner mon angle d’approche.

– Je n’ai pas de réponse à cette question, mais je peux te dire ce que j’ai observé. Notre conversation me donne par ailleurs l’impression qu’il ne te dit pas tout voire arrange beaucoup de choses et, c’est un avis personnel mais, je conçois mal une relation amoureuse qui oblige à se dissimuler autant à son partenaire. Nous n’avons pas parlé de votre couple quand nous nous sommes vus mais plusieurs éléments m’ont laissé penser que quelque chose était différent. Sa manière de parler de l’amour en général, d’en faire un business, n’a plus rien à voir avec celle du rêveur idéaliste que j’ai connu et je ne parierais pas sur une prise de conscience pragmatique tout à fait détachée de lui. Son discours et ses décisions étaient ceux d’une personne désabusée, qui n’avait plus envie d’y croire, et il était surtout préoccupé de retrouver une bonne relation avec sa mère, ce qu’il n’a jamais cherché à faire ouvertement avant. On pourrait estimer que notre nouveau mode de vie a pu mener à de nouvelles décisions mais, sauf si Gabrielle a finalement changé d’opinion sur toi, il n’y aurait pas de sens d’estimer avoir de bonnes chances de retrouver une relation sereine avec une personne qui désapprouve votre relation. Je sais que Christian est prêt à accepter un certain nombre de choses que je n’imaginerais pas accepter, bien sûr, mais je le crois capable de choisir la personne envers laquelle il pense avoir le plus d’intérêt à se dévouer. Maintenant, ce n’est rien de plus que mon opinion par rapport à l’expérience que j’ai de lui.

Je pourrais rappeler que mon opinion est aussi motivée par une expérience assez solide de l’esprit humain et maintenant plusieurs années de pratique dans le domaine de la psychologie, mais nous ne sommes pas en consultation et je ne veux pas faire sonner mes mots comme une vérité absolue. Le raisonnement le plus logique sera toujours tordu et réprimé par une personne qui veut absolument voir autre chose, alors je sais très bien que ma démonstration ne fera sens que si Psyché décide de m’accorder du crédit ou a observé les mêmes choses que moi. Il faudrait prendre du temps sur chaque élément pour prouver sa logique inattaquable. Là, quand je dis que Cupidon n’est pas capable de prendre des décisions pragmatiques mais peut tenir un discours qui laisserait y croire et qu’on me soutenait le contraire, on aurait parfaitement raison de dire qu’il ne s’agissait que de mon opinion, d’un ressenti. Des gens pourraient aussi me soutenir qu’une relation où l’on se mentait pouvait quand même être une relation amoureuse aussi et que j’étais trop fermée d’esprit. J’étais capable de faire une démonstration plus profonde de tout ce que j’avais dit, mais je n’en avais pas plus envie que ça. Nous n’étions pas dans une situation de joute verbale ou ma fierté était en jeu. J’avais cependant assez de patience et de temps à perdre pour approfondir encore si on me le demandait vraiment.
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MessageSujet: Re: Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] Briser de la vaisselle et réparer des pots cassés [TERMINÉ] EmptyLun 15 Mar - 19:24

Proserpine me confirme que sa relation avec Cupidon s’est ternie, sans me donner de précisions. Je n’ai pas envie de la faire parler davantage. Les détails sur les liens tordus que mon mari entretient avec elle risquent de m’offrir plus de questions que de réponses. Ses comportements manquent toujours de sens, je commence à en avoir l’habitude. Mais je me surprends trop souvent à les analyser et me fatiguer, alors que je ne leur trouve jamais d’explication satisfaisante.

Elle a choisi Cupidon pour l’aider ce soir par certitude de son soutien. Combien de dieux romains sont convaincus de pouvoir compter sur lui pour régler en secret un problème s’ils le lui demandent? Tous auraient raison de le croire. Je ne vois pas Cupidon refuser ce type de moyen sécuritaire de se valoriser et de gagner en importance aux yeux d’une personne de haut statut social. Amitié ou non, Cupidon plie si on secoue une friandise assez grosse.

Je n’ai pas expliqué à Proserpine que je ne crois pas vraiment en l’enchantement comme base de ma relation avec Cupidon parce que j’ai l’habitude qu’on me traite en petite sotte dès que j’exprime une idée qui peut être interprétée pour me coller ce rôle. Si je ne pense pas que je dois l’attachement d’un dieu à la magie, je suis certainement une romantique qui s’aveugle au nom du véritable amour. Et tout ce que je dirai ensuite sera rangé parmi les excuses et les preuves de mes limitations. Ce panthéon m’a fatiguée aux argumentations.

Le coup de foudre de Cupidon avait avant tout été une crise, comme la majorité de ses grandes actions. Son désir pour moi lui avait servi d’excuse pour courir à une liberté qu’il ne s’autorisait pas dans sa psychologie de soumission aux dieux qu’il traitait en autorité. Puis, il s’était lassé, il avait regretté – il regrette toujours ses débordements quand ils entraînent des conséquences –, et il avait dû trouver des excuses, des moyens de bien paraître. Il avait reculé dans son rôle de bon garçon en malheureuse situation, mais il m’avait gardée. Comme un trophée. Je suis encore aujourd’hui le rappel qu’il peut se rebeller.

Je ne nie pas avoir aimé Cupidon, ni même l’aimer encore, d’une manière que je m’explique à peine. Habitude? Fermeture émotionnelle? Désespoir? Je peux critiquer mon mari, mais je reste avec lui, moi aussi. Je n’ai rien à partager avec un mortel, et je ne sais pas comment communiquer avec les dieux. Ça se voit, encore ce soir.

Peut-être que le vide est mieux que Cupidon. Cette pensée refait surface et pour une fois, je ne la noie pas immédiatement.

Proserpine reste prudente. Elle ne condamne pas Cupidon, mais offre des pistes pour que je le fasse moi-même. Et entoure son discours de voies pour se rétracter ou jouer l’innocente si je m’insurge. Je la laisse parler sans l’interrompre, puis je la corrige sur quelques détails.

-Il a passé le plus clair de notre mariage à essayer de recoller les morceaux avec sa mère. Il a regretté de l’avoir perdue il y a très longtemps. Son manque de subtilité est toutefois récent, en effet.

Je termine mon verre en cherchant ce que Proserpine attend comme réponse. Elle s’est investie pour me donner une analyse aussi respectueuse que possible. Elle souhaite probablement une indication que son intervention est appréciée. Je n’ai rien à perdre à lui révéler mon côté de l’histoire. Je lui confirme donc qu’elle a vu juste :

-Christian fait durer ce mariage parce que son image vaut plus que son bonheur. Et de mon côté…

Je cherche mes mots. Je ne veux pas me présenter en victime. J’ai d’abord été piégée par des circonstances sur lesquelles je n’avais pas de contrôle, puis je suis restée par lâcheté – que je me justifiais comme de l’instinct de survie. Mais je ne trouvais pas comment bien réagir devant des problèmes que je ne pouvais pas régler par des moyens simples comme le meurtre ou la fuite.

-Je ne savais pas comment vouloir autre chose, dis-je en butant légèrement sur la formulation au passé. Mais en effet, notre nouveau mode de vie a changé notre relation. J’ai ma propre vie maintenant, et c’est probablement difficile pour lui.

Les siècles parmi des ennemis passifs m’ont formée à la lenteur. Il faut parfois s’endormir pour ne pas mourir, mais je réalise que je ne saurais aujourd’hui plus comment fermer les yeux pour sauver ma vie. Je me suis étourdie de nouveauté depuis mon passage par la brèche parce que seul le déni m’a permis de tenir toutes ces années sans me tuer, et que j’en suis un peu devenue dépendante. Mais les mensonge sont difficiles à tenir quand ils perdent leur sens et leur utilité.

-Je te remercie pour ta bienveillance envers nous, dis-je avec un sourire.

Je ne suis pas son amie, nous ne nous connaissons pas. Il est possible qu’elle ait tenté cette intervention seulement pour aider son vieil ami. Et comme elle le sait incapable d’agir par lui-même, elle a visé l’autre côté du couple. Dans tous les cas, son avis m’a mis ma propre incohérence au visage, et j’accuse le coup avec un grand sentiment de paix, parce que rien ne me rend plus calme que la perspective de prendre le contrôle.
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